Généralement, on ne quitte sa terre natale, ce depuis très longtemps, que pour deux raisons. Par la misère sociale ou par l’oppression politique. Mme Nafissatou Diallo, cette victime présumée sexuelle de l'ex directeur général du FMI, semble être bien touchée et par la misère sociale comme le montrent ici ces quelques lignes; et, par l'oppression politique aussi, puisque, c'est en tant que réfugiée politique (statut qui lui a été accordé), que Nafissatou vit aux Etats-unis depuis 1998.
Nafissatou Diallo, aujourd'hui âgée de 32 ans, est née à Tchiakoullé, hameau complètement isolé du nord de la Guinée. A peine quelques maisons au milieu de falaises rudes et âpres, dépourvu d’eau, d’électricité et de téléphone.
Au bord de la rivière, sans route pour y accéder, on y vient à pied, Tchiakoulé est un bâti de sept maisons, dont une est construite par les sœurs de la présumée victime, avec une dizaine de cases en torchis dans les montagnes de Fouta Djallon: berceau de la communauté Peule.
C’est là, ici même, qu’est née celle qui accusera l’un des plus forts hommes de la planète. « Son père également y est née », a déclaré Boubakar, son demi-frère, à un journaliste guinéen de l’AFP qui s'est rendu sur les lieux, à Tchiakoullé où il a rencontré aussi un oncle de la jeune femme.
D'après l’AFP, son journaliste« a réussi à localiser le lieu comme étant celui d'où est elle [Nafissatou] est originaire grâce à des recoupements et vérifications auprès de sa propre famille installée à New York et auprès de celle de la jeune femme ». Le demi-frère, âgé de 42 ans, rencontré par le journaliste affirme que Nafissatou a vécu jusqu’à la l’âge de 13 ans dans ce hameau. Puis ensuite elle est allée à Labé, ville principale du Fouta Djallon, située à environ 80 km, avant de revenir se marier à Tchiakoullé, à 17 ans. La jeune femme aurait aussi vécu avec sa mère Adja Aïssatou Diallo à Ziguinchor au Sénégal.
De son mariage avec un fils d’un riche marabout Peul qui décédera très peu après est née une fille. C’est après le décès de son mari que la jeune femme, Peule aussi, est partie avec sa fille aux Etats-Unis. Son voyage a été financé par une de ses sœurs, Hassanatou et son mari, déjà sur place et qui l’ont accueillie à New York avec son enfant.
Lorsque le journaliste de l’AFP s’est rendu dans le Hameau, leur mère qui y vit habituellement était partie à Dakar pour se faire soigner. Les informations recueillies par le journaliste des membres de la famille restées au village, la présumée victime est « très jolie n’a jamais été à l’école ». « Elle a seulement été à l’école coranique de Tchialkoulé ou elle apprenait et récitait les versets du Coran, en arabe sous une véranda ».
« Elle n’était pas turbulente », selon son oncle Mody. Elle est plutôt « une fille très sérieuse, très gentille et personne ne lui connaît d'histoire » affirme encore une tante, âgée d’une soixantaine d’années que le journaliste AFP a rencontré à l’Abé. Son oncle rajoute qu’il a entendu « sur une radio locale qu'un Blanc a abusé d'une fille aux États-Unis. Je ne pouvais pas imaginer que c'était ma nièce».
Nafissatou Diallo est la benjamine de la famille. Elle a trois frères et trois sœurs, nés des mariages de son père qui avait deux épouses. Son père se prénomme Thierno Ibrahima, cultivateur pauvre, mort en 2009 à l’âge de 90 ans, mais qui était également, selon la même source, « un dignitaire musulman respecté dans la région ».
La jeune femme, manifestement, n'a pas gardé de relations avec Tchiakoullé depuis son départ contrairement à sa sœur. Son demi-frère, cité encore par l'AFP, affirme que « depuis que ma sœur est partie, il y a plus de dix ans, je ne lui ai parlé qu'une seule fois, c'était après le décès de papa. J'étais à Bissau, je l'ai appelée pour lui présenter mes condoléances, mais dès qu'elle a vu le numéro, elle a compris que c'était l'Afrique et elle a répondu: "c’est pas la peine de m'appeler" , elle ne savait pas qui était au bout du fil, quand je lui ai dit, elle s'est ressaisie ». Son oncle Mody résume bien cette coupure de Nafissatou avec sa terre natale : « depuis qu'elle est partie, je n'ai jamais reçu de courrier, de photos, rien. »
Aux Etats-Unis où elle s'est donc installée depuis 13 ans, elle a vécu semble-t-il sans histoire particulière jusqu'à ce fameux samedi 14 mai sur son lieu de travail à New York. Mère veuve, très grande -au moins 1,80 m-, plutôt francophone, elle abandonnera son prénom africain, Nafissatou, pour se faire appeler « ophelia ». Elle détient une carte de résident permanent aux Etats-Unis.
A l' hiver dernier, elle a emménagé avec sa fille dans le Bronx, quartier populaire du nord de New York. Elle loge dans un petit appartement vétuste, au quatrième étage d'un immeuble fait de brique rouge où sont logés également de nombreux locataires d'origine immigrée africaine. «Ce sont de braves gens », rapporte le New York Times d'une voisine, également immigrée africaine qu'il a interrogé.
Ophelia travaille depuis trois ans comme femme de chambre pour la chaîne hôtelière Sofitel à New York où elle remplie son travail avec satisfaction et exemplarité que ce soit aux yeux de son employeur ou de ses collègues.
D'ailleurs, dès dimanche, le lendemain du scandale, la direction de l'hôtel a indiqué dans un communiqué que « nous sommes entièrement satisfaits de son travail et de son comportement ». Ses collègues l'a trouvent « une femme bien, très agréable et très amicale ». La jeune femme n'a pas d'antécédent judiciaire, ni de problème psychologique. Elle est notée 4,5 sur 5, toujours impeccable, sans quoi d'ailleurs, elle n'aurait jamais pu faire partie des rares employés à avoir accès au 28e étage, celui des suites de luxe.
Ophelia « n'a jamais posé de problème », elle est « une grande bosseuse comme sa sœur », disent ses proches. «Elle est très calme, renfermée. Elle ne sourit qu'à certaines personnes», a ajouté un de ses voisins, Mark Gangadeen, au New York Post; « La connaissant, je pense qu'elle doit retenir sa colère. »
Chérif Diallo, parent de la victime de 35 ans, qui travaille pour une agence de la ville de New York, et chargé de représenter la famille, dira au New York Post: « Franchement, Dominique Strauss-Kahn est tombé sur la mauvaise personne ! C’est un scandale et c’est vraiment triste, cet accident ! »
Photo: AFP