On s’étonnera peut-être de me voir, à mon âge, rejoindre un mouvement de jeunesse. Pourtant, après avoir participé à la manifestation d’avant-hier organisée à Tanger, j’ai ressenti le besoin d’y retourner ce soir, Place des Nations, à dix-huit heures. Ma femme, elle aussi, a tenu à m’accompagner. Pour nous, ce n’est pas un simple élan de sympathie, encore moins une nostalgie passagère, mais un choix réfléchi. Par fidélité à nos valeurs, à notre passé, à nous-mêmes, et à tous les absents tombés pour leurs idées.
Dans notre jeunesse, nous avons rêvé de justice, de liberté et de dignité. Nous avons porté haut ces mots, parfois à contre-courant, souvent au prix fort. Beaucoup d’entre nous ont connu la prison, l’exil ou le silence imposé. Mais rien de tout cela n’a éteint notre conviction que ce pays mérite mieux : une véritable démocratie, où la parole des citoyens compte, et où le pays, avec toutes ses richesses, appartient à tous les Marocains.
Aujourd’hui, je retrouve dans le mouvement Génération Z 212 quelque chose de cette flamme, mais avec une fraîcheur nouvelle. Ces jeunes ne s’enferment pas dans le ressentiment ; ils refusent la peur, la résignation et la récupération. Ils parlent d’avenir, de justice sociale, d’égalité réelle entre les territoires, de lutte contre la corruption. Et cela, à nos yeux, mérite d’être entendu et soutenu.
Nous savons qu’il y a des différences entre notre jeunesse et celle qui bat le pavé aujourd’hui. Nous étions pressés, naïfs, parfois violents ou aventureux : nous voulions tout changer, tout de suite. Eux sont plus calmes, plus lucides, plus patients, moins utopiques. Et c’est sans doute cela, leur force. Pourtant, nous marchons à leurs côtés pour bâtir ensemble une vision plus large que la colère, plus durable que l’urgence. Par notre présence, nous voulons contribuer à transformer le refus de l’injustice en un projet de société juste et égalitaire. Inventer un Maroc où les voix des jeunes, les nôtre aussi, celles d’hier et celles de demain, se rejoignent pour tracer un avenir commun.
Nous ne rejoignons donc pas Génération Z 212 « malgré » notre âge, mais « à cause » de lui. Parce que nous savons, d’expérience, que les moments où notre peuple s’est remis à espérer ont été rares et précieux. Et parce que nous croyons qu’il faut, lorsque la jeunesse prend l’initiative de se lever, marcher au moins un bout de chemin à ses côtés — ni devant, ni derrière, sans paternalisme ni tutorat. L’essentiel est de faire ce premier pas sur la voie du changement, puis de leur laisser le champ pour poursuivre leur marche vers la prochaine étape. La lumière perce déjà au bout du tunnel. L’avenir, c’est eux.