Dans ce 20e roman, Amélie Nothomb nous plonge au coeur du Nevada. A Las Vegas où il n'est pas seulement question de casinos mais ici de magie. L'histoire pose donc Joe, adolescent de 14 ans, magicien précoce et surdoué. Ainsi que Norman, son maître et mentor. De tours de cartes aux illusions provoquées par la prise de LSD dans une ville éphémère du désert, Tuer le père est l'histoire d'une quête. Intérieure et viscérale, en atteste le rouge sang qui orne la couverture -d'un effet dramatique absolument exagéré-.
Amélie Nothomb est une formidable conteuse. Une amoureuse des mots dont elle abuse jusqu'à plus soif. Elle partage avec d'autres rares cette capacité extraordinaire de savoir créer des personnages improbables mais vrais. Mais ce qui m'étonne chaque année un peu plus c'est son sens de la fin. Toujours anticipées, toujours atypiques, les conclusions d'Amélie Nothomb sont d'une originalité presque brutale. Tuer le père ne déroge pas à la règle. Et ne serait-ce que pour la façon dont est amené cet épilogue, le roman mérite d'être lu.
Nous voici donc avec de chouettes personnages et une conclusion imprévisible. Reste donc à meubler entre les deux. Malheureusement c'est ici que les choses se gâtent. Car malgré toute sa bonne volonté Amélie Nothomb ne parvient pas dans un roman aussi court à faire vivre suffisamment son récit. Cette quasi nouvelle égrène les poncifs du complexe d'Oedipe pages après pages. Amélie mâche, mâche et mâche encore, n'en reste qu'une bouillie plutôt insipide. Freud dégouline de l'ouvrage et ne laisse aucune place au rythme dans ce roman. Pas de place pour grand chose d'ailleurs, puisqu'en un espace aussi restreint, il faut ancrer les idées, les choses sont dites et redites. C'est tout de même assez dommage en 150 pages de parvenir à se paraphraser. On se retrouve aux prises avec une Amélie à l'écriture automatique, bien dans son chapeau qui écrit comme elle sait le faire, sans plus flirter avec la mise en danger de son style qu'avec l'originalité.
Tuer le père n'est en fin de compte pas un mauvais roman. Il chagrine simplement, pour ce qu'il présage des futures oeuvres de son auteur.
Frédéric Javelas
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