Il y a plus d’un siècle, la France était déchirée entre dreyfusards et anti-dreyfusards. On pensait cette querelle éteinte. Il semble que non : des médiocres, aujourd’hui en responsabilité, se montrent incapables de tirer des leçons de l’Histoire.
Le 28 mai 2025, le député Charles Sitzenstuhl a rapporté une proposition de loi visant à élever le capitaine Alfred Dreyfus au grade de général de brigade. Cette initiative visait à reconnaître officiellement l'injustice dont Dreyfus avait été victime et à réhabiliter pleinement sa mémoire.
Le 30 mai 2025, le président du groupe MoDem à l’Assemblée, Marc Fesneau, publiait dans FigaroVox une tribune expliquant pourquoi son groupe ne « participerait pas au débat », jugeant que « la mémoire d’Alfred Dreyfus ne doit pas servir à s’acheter un brevet d’honorabilité » et arguant que « ce vote pourrait être instrumentalisé» par LFI et le RN ». Plusieurs membres de ce groupe, comme Jean-Paul Mattei, Olivier Falorni, Sandrine Josso ou Franz Gumbs, s’étaient eux abstenus de signer cette tribune et trois d’entre eux – Bruno Fuchs, Delphine Lingemann et Géraldine Bannier – avaient voté en faveur du texte.
Le 2 juin 2035, la proposition de Charles Sitzenstuhl a été adoptée à l’unanimité des 197 députés présents. Le député Sitzenstuhl a ensuite fait part de sa « tristesse » à l’idée que le parti de François Bayrou ne se soit pas rendu compte du caractère historique de cette initiative. Ainsi donc seul le MoDem aura refusé de participer à cet hommage à la mémoire de Dreyfus. On peut relever dans cette attitude une certaine cohérence avec les propos tenus en 2006 sur LCI par François Bayrou, alors président de l’UDF. Il expliquait en quoi la panthéonisation du capitaine Dreyfus ne lui semblait « pas justifiée » : « Le Panthéon, c’est pour des gens qui ont eux-mêmes changé l’histoire, mais qui malheureusement n’ont pas subi l’histoire ».
Rappelons brièvement ici le parcours d’Alfred Dreyfus, cet officier français accusé de trahison et bagnard pendant cinq ans à l’île du Diable, en Guyane.
Le 22 décembre 1894, à Paris, le conseil de guerre à Paris condamne Alfred Dreyfus « à la destitution de son grade, à la dégradation militaire et à la déportation perpétuelle dans une enceinte fortifiée ». Innocenté le 12 juillet 1906 par la Cour de cassation, Alfred Dreyfus est ensuite réintégré dans l'armée avec le grade de chef d'escadron.
N’ayant pu obtenir l’intégration de son temps de détention à son ancienneté de service, il fait valoir ses droits et est mis à la retraite le 25 octobre 1907. Pendant la Première Guerre mondiale, engagé volontaire à l’âge de 58 ans, il est affecté à partir de 1917 au parc d'artillerie de la 168e division et participe aux combats du Chemin des Dames. En septembre 1918, il est élevé au grade de lieutenant-colonel et, le 9 juillet 1919, promu officier de la Légion d'honneur.