« Un agriculteur se suicide tous les deux jours » est une affirmation inepte : nul ne peut mourir plusieurs fois.
Ceux dont le métier est de s’exprimer à l’oral ou par écrit devraient garder présent à l’esprit que, ce qui importe, n’est pas ce que l’on veut dire mais ce que l’on dit.
À l’exception de 007, héros de fiction, nul ne peut subir un tel sort plusieurs fois. En fait, aucun film de la série des James Bond n'évoque une mort multiple. On ne peut en remarquer une que dans son cinquième titre, On ne vit que deux fois (You Only Live Twice), si l’on note que, bien évidemment, pour être en mesure de mourir deux fois, il est nécessaire d’avoir vécu deux fois. En réalité, il n’est qu’une seule formule correcte : « tous les deux jours, on constate le suicide d’un agriculteur ».
Mon propos n’est pas de souligner la stupidité de l’expression employée mais plutôt de m’interroger sur ce qu’elle révèle de l’indifférence de notre gouvernement. Le monde paysan s’insurge devant le fait que, le 6 janvier 2025, après l’annonce de manifestations d’agriculteurs, le gouvernement déclare qu’il ne recevra leurs représentants syndicaux qu’une semaine plus tard. Il faut bien en conclure que notre gouvernement n’a guère conscience de l’urgence de la situation. Certes, il est évident que c’est la mise en place de mesures annoncées à l’issue de ces rencontres qui permettrait de résoudre les problèmes soulevés. Leur application impose bien sûr des délais mais pourquoi donc tarder à engager le dialogue nécessaire ? On nous objectera qu’ils sont dus à des contraintes de calendrier mais il faut s’étonner de ce que celles-ci soient aisément levées face à d’autres difficultés qui, elles, surgissent soudainement, à la différence de celles de l’agriculture.
N'y a-t-il pas là une ignorance de la gravité de ces problèmes et un mépris des paysans ?