Malesherbes

Abonné·e de Mediapart

175 Billets

0 Édition

Billet de blog 23 février 2025

Malesherbes

Abonné·e de Mediapart

La guerre à nos portes

Ne risquons pas notre liberté pour éviter de perdre une élection nationale. Accepter l'abandon de régions de l'Ukraine, c'est capituler devant la Russie.

Malesherbes

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

La France avait bâti un empire qui lui a permis de figurer parmi les vainqueurs de la deuxième guerre mondiale. Quatre-vingts ans de paix lui ont fait oublier la phrase de Von Clausewitz : « La guerre n'est rien d'autre que la continuation de la politique par d'autres moyens ». Des dictateurs rappellent aujourd’hui cruellement à notre monde cette évidence. Le mot guerre avait tant été effacé de notre vocabulaire que la France n‘avait présenté sa lutte contre la rébellion algérienne que comme une opération de pacification. Au dix-septième siècle, notre État s’était doté d'un ministère de la Guerre. En 1947, il avait répudié ce mot pour créer un ministère des Armées qu’il avait, en 1958, transformé en ministère de la Défense. Pourquoi une telle frilosité ?

Pour conduire leur politique étrangère, nos gouvernants s’appuient  désormais sur l’opinion du peuple. Afin d'éviter quelque intervention armée, nos démocraties ont, en 1938, abandonné la Tchécoslovaquie, répondu mollement quand, en 2013, franchissant une ligne rouge, la Syrie gazait ses citoyens et, en 2014, peu réagi à l’annexion de la Crimée et à la proclamation des Républiques populaires de Donetsk et de Lougansk.

Après avoir déclaré :  « L’OTAN est en état de mort cérébrale », notre Président affirme aujourd’hui : « Nous n’enverrons pas des soldats français combattre en Ukraine ! ». Je rappelle que, en 1914 la France avait déclaré la guerre aux puissances impériales et ensuite sacrifié une génération d’hommes, des généraux pouvant aller jusqu’à faire fusiller ceux qui refusaient de sortir des tranchées.

La menace nucléaire a évité (différé ?) l’apocalypse. En octobre 1962, la crise des missiles de Cuba, avant une élection présidentielle américaine, avait failli déclencher une troisième guerre mondiale. Mais les armes nucléaires tactiques n’ont pas pour autant été proscrites. En Indochine, en 1954, les Américains n’avaient pas autorisé la France à exercer des frappes nucléaires pour réduire le Viet-Minh. L’auteur de ces lignes, à l’automne 1965, alors simple fantassin dans les plaines inondées par la Meuse, avait participé à un exercice sur le thème de l’emploi d’une arme nucléaire tactique : pour éviter de frapper les troupes amies, la bombe employée devrait être de faible puissance et lancée sur un point très précis des forces adverses. Comme il subsisterait alors, autour du point d’impact, des soldats ennemis, il fallait tester notre capacité à « casser la croûte nucléaire » avec des armes conventionnelles.

Au cours de l’ « opération militaire spéciale » entreprise en Ukraine en février 2022, la Russie a rencontré quelques difficultés mais n’a pas jusqu’ici recouru à des armes nucléaires tactiques. Mais a-t-elle exclu leur emploi ? Dans n’importe quel jeu, il est indispensable de dissimuler sa stratégie à l’adversaire. Les dictateurs abjects qui sévissent  ne sont pas fous et il est vital de ne pas laisser percer nos intentions.

Même si l’on n’est pas prêt à envoyer des combattants sur le théâtre des opérations, pourquoi dissiper toute incertitude sur la nature de notre réaction ?

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.