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Billet de blog 12 mai 2013

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Les baudets pesteux

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Les baudets pesteux,  une chronique d'Alain Accardo,  journal  La décroissance mai 2013:

Les meilleurs esprits de notre époque s'accordent à reconnaître que notre société est désormais placée devant un choix crucial : ou bien s'obstiner  dans  la  voie  suivie  jusqu'ici,   devenue celle d'une course à la perdition ;  ou bien tourner le dos à cette impasse pour essayer de construire un monde plus civilisé.

On peut évidemment, pour échapper à cette alternative, continuer à chercher de vaines échappatoires réformistes, comme on le fait depuis des décennies, en France et ailleurs. C'est peine perdue, on commence à le savoir, et chaque jour qui passe accumule les dégâts matériels et humains de « la crise ».

Malheureusement,  les  meilleurs esprits  de  notre  époque  ne  sont  pas  au  pouvoir.   D'abord parce que la plupart n'en ont pas le goût, ensuite parce que,  lorsqu'ils acceptent d'entrer dans l'arène, ils sont immédiatement  stigmatisés  et  disqualifiés  comme   « populistes » , « extrémistes » ,  voire « terroristes » ,  au seul motif de leur non-conformité au modèle dominant.

Il s'ensuit que la  conduite  de l'État  est  à  peu  près  entièrement  aux  mains  d'une « élite »  formée par et pour la gestion du système et rien d'autre.  Regardez-les parader devant les caméras :  c'est un ramassis de petits bonhommes et bonnes femmes,   dont l'égo énorme peut faire illusion un instant,  parce qu'ils présentent bien,   sortent des meilleures écoles,   et forment une caste fermée,  quasi endogamique ; mais il apparaît très vite que leur  vision  des choses  est incapable  d'échapper  aux déformations imprimées  par les  lunettes  intellectuelles et morales  du  néolibéralisme.

Le capitalisme : une école du crime autorisé

À  cet  égard  la distinction  traditionnelle  entre la droite  classique et la  gauche de gouvernement  (PS)  a perdu  toute espèce de pertinence. Il n'y a qu'à voir comment ils réagissent à la succession des « affaires » calamiteuses  qui  mettent  gravement  en  cause  l'honneur  et la  probité d'un  nombre  significatif  d'entre eux,  et non des moindres.   Leur commun réflexe est de recourir à la méthode éprouvée de l'individualisation de la faute,   en isolant le baudet galeux pour mieux le charger.   Vieux procédé  cautionné  par  toutes  les mythologies  du libre-arbitre.   Quelles que soient la matérialité et les circonstances du crime,  on se donne l'illusion d'aller à la racine du mal en mettant en cause la nature peccamineuse du seul criminel.   Le remède serait donc de  mettre  tous  ces  pervers  à l'abri  d'eux-mêmes  en multipliant les mesures personnalisées du type   « déclaration de patrimoine » ,   « non-cumul des mandats » ,   « contrôle fiscal », etc.   Pour combattre la peste, il suffirait d'établir un cordon sanitaire autour de chaque pestiféré.   Rares sont les hommes ou les femmes d'État pour dénoncer le lien que de tels agissements personnels peuvent avoir avec la logique objective et impersonnelle d'un système que ses  « ressources humaines »  les mieux formatées et les plus zélées,  telles que son patronat,  ses cadres,  ses politiciens ou ses intellectuels,  ont profondément intériorisée. Et il n'y aura personne au Parlement,  ni  à  l 'UMP  ni  au  Parti socialiste,  pour dire honnêtement :

« Non, ne nous racontons pas d'histoire et ne prenons pas les gens pour des imbéciles.  Les  tricheurs  et  les  fripouilles  ne sont pas des exceptions malheureuses dans nos rangs.   Partout, y  compris  dans  la  société  civile,  ces gens-là sont potentiellement légion,  ni meilleurs ni pires que les autres,  tous programmés pour jouer un rôle dans la grande arnaque de la « démocratie » libérale bourgeoise.  Ce  sont  les occasions  qui  font  les larrons  et le  Marché  fait  le  reste.   Car  c'est  bien  le  système  tout  entier,  dans son essence même,  qui en infusant  partout  sa  passion  du lucre,   son mercantilisme sans frontière,   son rentabilisme sans mesure,   son hédonisme sans pudeur et ses tolérances sans principe,  est à la source de tous ces errements qu'il suscite,  encourage et légitime pour son propre usage. C'est  ça  le  système capitaliste que  nous  gérons,  une  école  du  crime  autorisé  qui porte à son fronton l'implacable injonction :

« Que  nul  n'entre  ici,  s'il  répugne  à  servir  l'Argent  en  se  servant. »

Et c'est pourquoi, même parmi les meilleurs d'entre nous,  les « élites » proclamées de notre monde économique,  politique et culturel,  il ne cesse d'y avoir des gens enclins,  par avidité,  ambition,  orgueil ou bêtise,  à piétiner l'éthique afin de pousser toujours plus loin leurs avantages et donc les limites de l'impunité que leur assure le système.   Au risque de se faire pincer pour avoir bafoué le peu de décence ordinaire que la loi laisse subsister dans nos mœurs. »

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