Le 13 septembre 2025 s’est déroulée la 102ème manifestation de soutien à la Palestine à
Perpignan.
Chaque samedi depuis près de deux ans, à 14h00 place des Victoires au pied du
Castillet, se regroupent des gens armés de drapeaux, parés de keffiehs, qui arborent les
couleurs noire, rouge, blanche et verte.
Pendant une demi-heure, des représentants des associations et des mouvements
politiques présents prennent la parole.
Abdel, d’Urgence Palestine, annonce les dernières nouvelles du front, rappelle les
raisons d’être ici, ensemble. Sonia de l’UJFP- l’Union Juive Française pour la Paix-
précise que tous les juifs ne sont pas sionistes, et qu’ils soutiennent la lutte
palestinienne. Geneviève, de la Libre Pensée, apporte le soutien laïque des citoyens à la
lutte pour la paix des Palestiniens.
Un militant politique intervient pour montrer que son parti est présent. Un homme ou
une femme évoque des actions à venir.
Association France-Palestine, Le NPA- Nouveau Parti Anticapitaliste, , la CNT
Confédération Nationale du Travail, LFI- La France Insoumise…Micro à la main, des
hommes, des femmes, déclament un discours improvisé ou écrit, un poème lu ou
appris avec maladresse et émotion, à une foule attentive au son d’une sono qui porte la
voix d’une lutte menée par un peuple à 2 950km de là.
Les uns applaudissent, les autres bavardent. Des enfants rient. Les badauds
s’interrogent sur la présence de ce groupe bigarré, qui encombre la place de ses chants
et de ses cris, sous un soleil qui cuit la nuque des usagers des bus qui patientent au
bord de la route.
Deux peuples s’observent sans se parler. Celui des manifestants et celui des gens dont
le samedi s’occupe à tourner en rond dans la ville.
Une voix retentit, claire, forte et lumineuse, Yamina appelle les manifestants à former le
cortège pour parader dans la ville au son des slogans chantés à deux voix : la première,
celle d’une femme au regard intense, dont la parole entraine la seconde à répondre à sa
question.
1. - Qu’est-ce qu’on veut ?
2. – La Paix !
1. - Quand ça ?
2. « Maintenant ! »
Les bus patientent face au défilé, les automobilistes rongent leur frein devant le flot de
manifestants portés par le chant.
Les uns portent à quatre le drapeau palestinien, les autres dressent haut des pancartes
aux revendications improvisées. Tous scandent ensemble le message d’un peuple
bâillonné.
Le défilé glisse sur le pont Magenta vers le quai Vauban. Il marque une pause devant les
enseignes complices d’un Etat génocidaire : pour elles, « it’s business as usual », dans le
sang et dans les larmes, peu importe.
Yamina désigne, Yamina dénonce, Yamina appelle au boycott.
1. - Israël génocidaire
2. - KFC partenaire !
Sur les façades commerçantes, résonnent les noms de Starbucks et SFR, face à des
consommateurs bouche bée, les yeux écarquillés. Le cri des manifestants se perd dans
le vide de leur conscience, aveuglée par la lumière des publicités.
Le chant s’éloigne du quai par la rue Pasteur, escorté par les soldats municipaux et
nationaux aux ordres des vitrines marchandes dont les corps forment un rempart de
défense face au pacifisme de la manifestation.
Quand les voix marchent dans les rues du centre-ville de Perpignan, vers la place
Laborie, les consommateurs muets s’écartent sur leur passage, la tête baissée, la moue
inquiète d’une ignorance blessée.
Des sourires sympathisants les accompagnent sous les applaudissements, tandis que
d’autres visages se ferment, dérangés dans leur déni d’un massacre d’enfants.
Les chants s’écoulent dans les rues vers la place de la Loge. De la Mairie où se terre un
maire condamné, aucune voix ne sort pour parler à la foule de concitoyens qui chaque
samedi appelle les édiles à rejoindre le combat.
Certes, parfois nous ne sommes que 30, d’autres jours 100 ou 200. Mais chaque
samedi, au soleil ou sous la pluie, Bernard, Roland, Fatou, Malika, Christine, interrogent
la ville qui ne répond pas.
De retour sur la place des Victoires, un rappel du boycott de Carrefour est lancé. Les
uns repartent déjà. Nous restons là, pour échanger, nous réconforter, et dire que nous
reviendrons la semaine prochaine.
Alors que signifie manifester toutes les semaines à Perpignan pour soutenir la
Palestine ?
C’est être debout et marcher. Marcher au milieu des cadavres d’enfants assassinés par
des tueurs sadiques.
Être debout quand des hommes aboient leurs ordres cyniques à un peuple dressé à
obéir pour se coucher face aux premières sommations.
Nous marcherons encore dans les rues de Perpignan pour réveiller le souvenir d’un
peuple endormi. Nous marcherons encore dans les rues de Perpignan pour porter
l’espoir d’un peuple décimé par la barbarie.
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