A mes ami(e)s Américain(e)s.
5 novembre 2024… C’est comme si c’était la face noire de la lune qui s’était levée cette nuit-là. Une claque d’obscurité nous a laissés sans voix. Comme cloués au mur du désespoir. Depuis, la part du monde nourrie de lumière tremble. Nous sommes tous sous le choc. Mais vous plus que nous, qui vivez au cœur de la tourmente. Chaque jour je pense à vous, j’aimerais pouvoir vous entendre, vous parler. Pour retrouver la confiance en nous. Il faudra du temps pour que le monde que nous partageons retrouve le goût de la vraie vie. Quand les démocrates de partout retrouveront le goût de faire de la politique. C’est-à-dire apprendre à regarder et penser au-delà de nous-mêmes.
Que nos meilleures pensées surnagent jusqu’à vous, en compagnie de ce poème…
M.D.
Lune noire
Oserai-je le dire au milieu des ruines qui m’environnent ?
Ce que je redoute le plus pour les générations à venir, ce ne sont pas les révolutions.
Alexis de Tocqueville, De la démocratie en Amérique
Quand c’est la face cachée de la lune qui s’est levée cette nuit-là
jetant une poignée de boue dans la flaque du ciel
on ne pouvait en croire ses yeux.
La lune salissait la nuit
comme une tache de graisse sur un manteau de cuir.
Tendant les bras, avançant à tâtons,
broyant l’obscurité avec des poings rageurs
sous le regard de la lune mauvaise, chacun cherche en aveugle
l’ombre d’autres aveugles
certains pleurant, certains criant, certains muets de stupeur
tous mâchant la salive amère et noire d’encre d’une langue blessée.
Peut-être que le jour ne reviendra pas
ou bien dans si longtemps qu’on ne le verra pas renaitre.
Dans la poussière git un stylo brisé
un homme se penche et le ramasse…