La rédaction de ce billet a servi de délassement, pendant la rédaction d'un article difficile, et après l'écoute d'un sermon néolibéral particulièrement poisseux du révérend père Brice Couturier. Je demande donc au lecteur éventuel un peu d'indulgence.
Dans ma jeunesse et plus tard, on entendait crier dans les rues : "Police partout justice nulle part". Certains diraient ,dix ans après 1995, que ce n'est pas complètement faux. Mais il y a quand même des avocats qui se crèvent la paillasse à défendre la veuve, l'orphelin et les souverains nord-africains injustement calomniés.
Les Romains n'ont rien inventé... sauf le droit, c'est une vieille plaisanterie des Enseignants du Droit C'est moins drôle qu'il n'y parait. On peut, en effet, se demander pourquoi les Romains, qui n'étaient pas des rigolos, mais plutôt de francs salauds, avaient "jugé bon" (!) d'inventer le Droit. Mais parce que "c'était bon pour eux" évidemment ! Pour Zbignew Brzezinski, les Américains sont les Romains de l'époque moderne et eux aussi pensent que le droit c'est bon pour eux.
Les Américains se sont toujours considérés comme les propriétaires légitimes de tous les territoires qu'ils pouvaient atteindre commodément, à pied à cheval ou en char d'assaut, c'est-à-dire aujourd'hui le monde entier. Pourquoi ? Parce qu'ils ont "une destinée manifeste" et que le monde est pour eux (ici je laisse le lecteur traduire) "a land of opportunity". En clair ils sont depuis le 17éme siècle le nouveau peuple élu.
Je conseille à ceux qui ont envie d'approfondir le sujet de lire comment le soi-disant philosophe Locke démontre que les Indiens, que les Américains avaient déjà à l'époque commencé à exterminer avec soin, sont en fait des agresseurs, et ceci à l'aide de la Bible et du Droit de Propriété, c'est à dire de la "tradition judéochrétienne" (locution à prononcer comme si on en avait plein la bouche).
On entend aussi, en particulier pendant les campagnes électorales, que nous jouissons de "la Démocratie et l'Etat de Droit "(à prononcer comme si on en avait plein la bouche, comme François Hollande, Nicolas Sarkozy ou le regretté VGE). C'est légèrement inexact. Nous vivons, comme tous les pays du "monde libre", dans :
des Démagogies et des Etats de Droit du Plus Fort.
Si l'on n'est pas millionaire inutile de s'aventurer à réclamer justice, sauf si un ténor du barreau a bien voulu vous ranger, pour sa publicité, dans son quota de bonnes oeuvres. Par contre si vous en avez les moyens (argent, hommes de main ou autres) vous pouvez parfaitement, et impunément sauf manque de bol crasse, "vous faire justice", exproprier des gèneurs, virer des journalistes, vivre confortablement, en paix avec soi-même. Victor Hugo le disait déjà : "C'est juste, puisque l'un a tout et l'autre rien"
Que faire ? (comme disait Tchernichevski, et non Lénine comme des ignorants le pensent encore). La justice bien évidemment n'est pas de ce monde. On peut néanmoins réfléchir à la manière de réaliser au moins la version probabiliste de la justice, c'est-à-dire d'accorder à chacun les mêmes chances de gagner à la loterie judiciaire. Comme on dit, littéralement :"C'est pas gagné" : le syndicat de la magistrature est plutôt sympathique mais représente une minorité et en plus laisse entrer n'importe quel fouille merde dans ses locaux. La convenable USM et l'ordre des avocats représentent un compromis raisonnable mais probablement pas la majorité de la population judiciaire, qui, comme les autres majorités, est généralement silencieuse. Il existe en fait encore beaucoup de familles où l'on est juge ou avocat de père en fils depuis Louis-Philippe. On y a traversé sans encombre les périodes glorieuses où l'on savait "rendre la justice" (vous avez remarqué ce léger goût de de régurgitation ?) et ou l'on maintient la tradition de fermeté contre la canaille.
Du côté "profession" donc tout va bien, l'intégrité est au moins aussi répandue qu'au Burkina Fasso qui est sa patrie comme le nom l'indique.
Dans ces conditions il y a évidemment une solution pour donner à tous les mêmes chances : ce ne sont pas seulement les jurés qu'il faut tirer au sort mais aussi les juges et les avocats. C'est un minimum. On rève de voir la tête d' un ancien petit prince du CAC 40, défendu vaillamment par un avocat débutant altermondialiste, face à des paysans cambodgiens, ou même un journaliste, défendu par un acquitator (quel nom ridicule!) en mal de bonne action. Ca aurait de la gueule !
Ce serait évidemment ça la justice ! On rève ...