Eichmann s'est rendu sans broncher aux espions israéliens venus pour l'emmener et le faire juger à Jérusalem, parce qu'il avait, finalement, la conscience tranquille.
Eichmann était un SS, responsable de l'émigration, puis du déplacement des juifs et enfin de la logistique de transport de la solution finale.
Je ne sais comment mieux résumer tout le propos de ce livre, dense et précieux.
La dernière déclaration d'Eichmann à son procès fut qu'il n'était coupable que d'avoir été vertueux, puisque l'obéissance était une vertu.
Comment des hommes ont-ils pu assister aux déportations et à la solution finale sans réagir? Comment des hommes, qui n'étaient ni des sauvages ni des sadiques, ont-ils pu y participer en gardant leur bonne conscience?
Hannah Arendt aborde toutes ces questions, que se pose toujours quiconque a eu connaissance de cette horreur. Mais elle ne fait pas que cela : en retraçant le procès d'Eichmann, elle retrace la manière méthodique dont l'élimination des juifs fut pensée et amenée, peu à peu, dans les consciences avant d'être effectivement réalisée, que cette "purification de l'Europe" était pour les nazis le but principal de la guerre, qu'ils continuèrent et accentuèrent contre leurs propres intérêts alors que les premiers revers apparaissaient sur le front. Pire, même, elle montre comment le machiavélisme nazi a fait des victimes des complices, empêchant toute révolte massive des juifs.
Bref, Hannah Arendt nous montre en acte comment le mal, dans toute sa violence, peu à peu, devient une chose banale et normale.
Un livre, dont on ne ressort pas indemne, à méditer de toute urgence : car les mécanismes qui ont fait le passé menacent toujours de faire l'avenir.