[Artiste sortie des cadres institutionnels par choix, Sofi Hémon a un travail de recherche qui se traduit parfois sous forme plastique. À la temporalité de la recherche, longue, précise, labyrinthique, jamais exhaustive tant les chemins suivis sont méandres nombreuses, et à l’accumulation de matériaux, documents ou fragments (poteries, cailloux, papiers, objets…), autant d’archives classées dans son atelier-hangar, répondent des installations brèves, une seule photographie, ou encore des performances où, si l’écoute du présent est centrale, le temps s’écoule et dure. La tension entre ce qui est, ce qui a été, ce qui sera, est permanente. La préhistoire, ce qui y a été réalisé, rencontre le souvenir d’un arte povera, brutal, sec, et la joie du montage. Faire sens, visuellement, avec ce qui semble si peu, alors même que le si peu, quand il est décrit, a la densité d’une vie entière. Depuis ses œuvres, Sofi Hémon raconte, bondissante, ses recherches qui aujourd’hui questionne les rapports quotidiens, éphémères, rituels, personnels… que les femmes entretiennent depuis une certaine nuit des temps à la matérialité, vie et mort mêlées. Ici, dans ce texte, c’est prière pour une mère. Prière pour un père et deux mères. Prière et présence pour et avec une morte ou un mort pas encore morte. C’est mémoire et amour et réconciliation — à l’épreuve de leurs possibilités.]
Agrandissement : Illustration 1
La jument de trait rencontre
La lionne à la joue percée
La femme ancienne
arrive par la mer
lionne et jument
vivent dans la tourbière
femme ancienne
se dirige vers la montagne
[Refrain]
Bassine et bidet
Tu vas louper ton train
Mon enfant mon amour
Prends ta perruque ouvrière
Colère et volcan
Nous ne fabriquerons pas vos armes
Bien aimée maudite sauvagesse
La rose te va
râpe parole
l’agilité de ton corps
et ton audace
sont notre espace temps
Grand-mère a dit, va dans la forêt
Grand-mère, je n’irai pas dans la forêt
[Refrain]
Bassine et bidet
Tu vas louper ton train
Mon enfant mon amour
Prends ta perruque ouvrière
Colère et volcan
Nous ne fabriquerons pas vos armes
Agrandissement : Illustration 2
Agrandissement : Illustration 3
Agrandissement : Illustration 4
Agrandissement : Illustration 5
Agrandissement : Illustration 6
Agrandissement : Illustration 7
Agrandissement : Illustration 8
Agrandissement : Illustration 9
Agrandissement : Illustration 10
Agrandissement : Illustration 11
Agrandissement : Illustration 12
Recours au poème, femme ancienne, j’écris une chanson regroupe des notations diverses (paysages, corps, visages, objets, dessins, installation) suites à des lectures chemin faisant. Ce projet initie de longs dialogues qui enrichissent mes pensées. Je remercie le gang fictif qui m’accompagne : Annie, Patricia, Dada, Sylvia, Susan, Anick, Laure, Julie, Ida, Jacqueline, Félicie, Marc, Maryse, Tituba, André, Maria, Anne, Nancy, Dulce, Météora, Sandra, Françoise, Ricardo, Cathy, Donna, Ollvier, Mathilda, Luce, Virginie, Pol, Carol, Deborah, Mona, Phulan, Isabelle, Ana, Suzanne, Eva, Martin, Evelyn, Catherine, Enéas, Daria, Nastassja, Alena, Clarissa, Brigitte, Virginia, Anna.
Avec Le temps des ouvriers.
Eukuan nin matshi-manitu innushkueu – Je suis une maudite sauvagesse, An Antane Kapesh, éditions Mémoire d’encrier. Édité et préfacé par Noami Fontaine.
Sofi Hémon — Réparations, numéro zéro — Juillet 2022