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Billet de blog 21 décembre 2008

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Quête, zapping et autre volontarisme

Lire n’est-ce qu’entrevoir les mots sans leurs interstices, regarder n’est-il que voir des images, ignorant leur hors champ ?

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Lire n’est-ce qu’entrevoir les mots sans leurs interstices, regarder n’est-il que voir des images, ignorant leur hors champ ?

Le zapping est-il un acte délibéré et volontaire, l’expression d’une liberté, ou un acte de libération, la tentative d’une échappée improbable qui, tout au plus peut nous faire espérer aller du pire au meilleur, le meilleur n’étant pas toujours sûr ? Le mal voter politique,par exemple, ne serait-il pas qu’un court instant de zapping aléatoire (souvent malheureux) ?

Nos libertés démocratiques d’aujourd’hui ne seraient-elles que celles de zapper, seulement théoriques et virtuelles ? Ne pouvons-nous zapper qu’entre des concepts de démocratie, en quête d’un absolu concept ?

D’avoir trop zappé certains soirs, m’a inspiré la réflexion suivante :

De plus en plus le jeu du comédien me semble se faire in vitro, je veux dire qu’il me paraît se jouer devant une caméra dont il serait séparé par une vitre impalpable mais bien réelle. Le comédien, en vitrine, se sait quelqu'un d’autre et il sait la présence d’une caméra : il joue pour elle (pour le spectateur), il ne joue pas avec elle (avec le spectateur), ne leur prêtant pas l’objectivité dont elle (la caméra) et dont il (le spectateur) sont capables. Le comédien sur joue alors qu’il devrait se comporter comme un quidam interrogé par une caméra anonyme, de passage, sur la raison de sa présence, non sur l’effet de cette présence.

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Il n’est de violence vraie, légitimée, que venue d’une instance supérieure, informelle, anonyme, fut-elle violence étatique, celle qui voudrait faire croire à la spontanéité de l’opinion publique, opinion formatée, que l’Etat médiatise par tous les moyens dont il dispose, et à travers ses supplétifs et autres auxiliaires de Propagande.

J’ai personnellement vécu cette violence, dans ma chair, dans mon esprit et dans ma création. J’ai du filmer comme d’autres filment clandestinement leurs prisons. Je suis un cinéaste clandestin, je suis culturellement clandestin.

La volonté politique derrière laquelle on se défausse et s’abrite, trop facilement, n’est que l’expression d’un lâche soulagement. Elle ne peut être d’abord, au 1er degré, qu’un volontarisme individuel. Ainsi avais-je voulu franchir sans succès l’obstacle, le faux et tartuffe alibi culturel que constitue ARTE. Je pourrais longuement m’étendre, mais je me dispense, je n’ai pas le besoin, dans cet espace libre qu’est Médiapart, d’attaquer, d’argumenter ad hominem. Je n’ai pas la crainte d’être politiquement incorrect, du haut des 80 ans qui me guettent. Je n’attends aucune discrimination positive, plus courante qu’on ne le dit, et parce-qu’il n’y aura jamais de discrimination qu’objective.

Je n’attends, ici même, qu’un juste et digne échange, sans polémique ni complaisance, si tant est, je l’espère, que cet écrit puisse provoquer un échange.

Marcel Hanoun - cinéaste

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