Madame la Ministre,
Permettez-moi de vous faire part de mes réflexions et d'attirer votre attention sur ma situation afin d'obtenir une réponse qui vaille pour moi-même et pour tous.
Je pense que vous et tous les membres de votre gouvernement manquez absolument d'EXPÉRIENCE.
Vous ne savez pas ce que c'est que d'accompagner une personne dépendante dans les conditions de tout le monde.
Si vous êtes malade ou qu'un de vos proches est malade, vous allez à l'hôpital accompagnée de votre réputation : vous n'êtes pas une personne lambda.
Si vous vous rendez dans un hôpital ou une maison de retraite pour vous rendre compte par vous-même : rien n'est normal dans ces lieux ce jour là.
Vous n'avez donc aucune idée de ce que représente la vraie vie d'une personne malade ou dépendante ou simplement âgée dans une structure. Je ne parle même pas de ce qu'est la solitude d'une personne dépendante à domicile, au milieu du turn-over des aides qui défilent chez elle, n'ayant moi-même pas d'expérience assez longue dans ce domaine.
Si vous aviez l'expérience d'un vrai travail incognito d'A.V.S. ou d'Aide Soignante ou d'Infirmière pendant 6 mois ou un an dans une structure hospitalière ou une maison de retraite vous pourriez peut-être comprendre ce que vous ne supporteriez en aucun cas pour vous-même ou pour un proche que vous aimez.
Moi, je suis l'épouse d'un malade alzheimer. Il réside depuis 4 ans dans une petite structure(30 malades atteints de maladies neurologiques dégénératives), appartenant à un groupe à but non lucratif où le malade est au centre du projet d'établissement. Pourtant, depuis quelques mois, j'assiste à une dégradation de la qualité liée au problème de manque de personnel structurel et occasionnel.
En effet, personne ne veut plus faire un travail si peu reconnu alors qu'il est si important.
Savez-vous que des écoles d'aides-soignant(e)s sont sur le point de fermer faute de candidatures?
Les personnels en place dans les structures sont cassés physiquement et moralement, ils n'en peuvent plus d'assurer des heures supplémentaires pour pallier aux absences liées aux vacances, aux maladies, à la formation. Leur grand professionnalisme et leur grande empathie pour les personnes qu'ils soignent les contraint à ne pas prendre tout le repos dont ils ont pourtant absolument besoin pour récupérer. Combien de nouvelles recrues pour des remplacements repartent au bout de deux jours ou une semaine reculant devant la très grande difficulté de la prise en charge de personnes tellement désorientées et dépendantes.
Comment fera-t-on quand tous les arrangements internes possibles pour soigner les personnes seront épuisés?
Que feriez-vous, Madame la Ministre, si votre mère, votre père ou votre époux baignait dans ses excréments des heures entières parce que personne n'a le temps de venir la ou le changer? De manière très ordinaire, que diriez-vous si votre parent était obligé de porter une protection et de la garder parfois un long moment souillée parce que dans la structure où il réside le personnel, même présent en totalité, ne peut assurer l'accompagnement aux W.C. de chacun, même continent, à sa demande,
Ce sujet trivial est pourtant central dans la vie d'une personne. C'est ici que commence l'humiliation et la perte du sentiment d'appartenance à la condition humaine.
Je salue et soutiens les personnels qui ont le courage de faire grève pour protester contre leurs conditions de travail ainsi que pour la maltraitance institutionnelle dont sont forcément victimes leurs résidents quand même une douche par mois devient un luxe.
Que comptez-vous faire, Madame la Ministre, pour répondre à ma révolte ?
Moi, je vous demande un plan d'urgence pour le recrutement massif de personnels soignants formés et payés dignement ( pas moins de 1800€ pour un A.V.S.).
Nous serons TOUS vieux un jour et parfois malades. Ne vous laissez pas manoeuvrer par un ministre du budget trop jeune pour comprendre. Il n'y a aucune économie à faire sur l'humain.
Une réponse à la hauteur des humains dont vous avez la charge sera à la mesure du respect que vous portez à vous-même et à vos très proches.
Citoyennement vôtre.