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Billet de blog 2 mai 2025

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EN FINIR AVEC LA MYSTIFICATION DE LA PRETENDUE LUTTE CONTRE LA VIE CHERE

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Il faut en finir avec la mystification de la prétendue lutte contre la vie chère initiée et entretenue par des individus venus de nulle part au parcours pas très net ; cheval de Troie d’un petit groupe improbable de parlementaires de la République dont les liens de certains avec un pays en guerre ouverte avec la France sont avérés - une cyberguerre sans merci avec des opérations de désinformation, de manipulation, de provocation et de sabotages du pays dont ces élus sont des représentants.

Notons que tous ce petit monde interlope qui n’en finit pas de s’agiter dans les travées du parlement français et sur les réseaux sociaux où certains profèrent des menaces à peine voilées de nouveaux embrasements si l’on ne se soumettait pas à leur volonté ; tout ce petit monde profite à satiété de la société de surconsommation. Il n’est pas si loin pourtant, un peu plus de 60 ans, où le modèle de la frugalité, des dons et contre dons et de la réduction des dépenses alimentaires était encore une valeur dominante, notamment dans les classes défavorisées, dans nos campagnes et les quartiers populaires urbains.

Il faut en finir avec cette mystification pour s’engager dans une approche plus globale et non racoleuse. Le spectacle de petits groupes de personnes retraités, au chômage, ou même salariés pour certains, faisant des poubelles de super marché dans l’hexagone pour se nourrir nous y invite : ce qui est fondamentalement en jeu dans ce consternant tableau dans un pays dit avancé ce n’est pas la cherté de la vie mais le « pouvoir d’achat » ; s’y ajoute dans les Outre-mer, la question de la production locale et d’un projet réel de développement et de société. L’administration préfectorale a mis le doigt avec raison sur cette contradiction de contestataires permanents sans véritable projet global pour leur pays.

https://actu.fr/normandie/neufchatel-en-bray_76462/ils-doivent-fouiller-les-poubelles-pour-manger_4558044.html

https://www.ladepeche.fr/article/2008/04/01/445611-ils-font-les-poubelles-pour-se-nourrir.html

« Le pouvoir d'achat correspond à la quantité de biens et de services qu’un revenu permet d’acheter.  Le pouvoir d’achat dépend alors du niveau du revenu et du niveau des prix. L’évolution du pouvoir d’achat correspond donc à la différence entre l’évolution des revenus des ménages et l’évolution des prix. Si la hausse des revenus est supérieure à celle des prix, le pouvoir d’achat augmente. Dans le cas contraire, il diminue. » (Economie-Gouv)

https://www.economie.gouv.fr/facileco/comprendre-pouvoir-achat#

Le niveau des prix est un des éléments de la définition du pouvoir d’achat comme l’indique la citation précédente. Il était donc normal d’agir à ce niveau. Ce qui l’est moins c’est de polariser le débat sur ce seul aspect et s’enfermer sous la pression d’une petite minorité dans un « débat alibi » dont la finalité est plus que trouble. On escamote ainsi l’autre terme du problème : le « niveau du revenu » et par conséquent la responsabilité patronale, l’impact de certaines politiques publiques et le rôle d’institutions publiques majeures (Sécurité sociale, CAF, France Travail, ex Pôle Emploi, CTM) sur la détermination de cet élément constitutif du pouvoir d’achat. Il faut ici insister, concernant les institutions publiques citées, sur le fait que les retards de paiement, les traitements trop sommaires ou trop lents des dossiers, les réclamations indues de trop perçu jettent dans le stress et la détresse sociale les plus fragiles dont les petites entreprises.

Il faut maintenant en venir à une question cruciale, celle de notre mode de consommation ; question bien évidemment escamotée dans le débat alibi de la vie chère puisque d’inspiration fondamentalement consumériste. Aucune interrogation donc à ce niveau. Peu d’études critiques d’ailleurs y ont été consacrées à notre connaissance*, preuve de notre submersion totale dans le modèle américain de consommation de masse ainsi définit par Emily S. Rosenberg (« Le « modèle américain » de la consommation de masse », Cahiers d’histoire. Revue d’histoire critique, 108 | 2009, 111-142) :

« Ce système de masse, combinant consumérisme et publicité, se développa dans le monde entier et, comme aux États-Unis, s’adapta facilement. Il séduisit au-delà des différences nationales, régionales, ethniques, mais aussi de genre, de classe et d’idéologie. »

https://journals.openedition.org/chrhc/1809

Reste à savoir si ce modèle est compatible avec un petit territoire insulaire en crise sociale et économique endémique et qui se trouve dans une impasse de gestion de ses propres déchets depuis des années avec toutes les conséquences écologiques induites. La réflexion sur les modèles de consommation se devrait de commencer par restituer aux consommateurs leur statut d’acteur. C’est ce à quoi s’emploie Gaëlle Pothin dans une excellente thèse de doctorat soutenue en 2017 à l’Université de la Réunion (« La cherté de la vie du point de vue du consommateur : définition, antécédents et conséquences).

Un des premiers constats de l’auteure est celui de la « dissonance » entre les statistiques officielles et la perception des consommateurs, une perception qui n’est pas sans rapport avec un « vouloir d’achat ». Je cite :

« Alors que les statistiques officielles font état d’une augmentation, certes faible, du pouvoir d’achat des français, ces derniers ne cessent d’affirmer l’inverse. Une dissonance susceptible d’être expliquée notamment par l’écart grandissant entre le rythme de croissance du pouvoir d’achat, en stagnation, et celle du « vouloir d’achat », en constante croissance (Dupré and Geradon de Vera, 2008). » (p.385)

Si le consommateur est bien un acteur cela signifie, par ailleurs, qu’il développe ses propres stratégies en fonction des situations. L’auteure n’insiste peut-être pas suffisamment sur la consommation alternative. Je la cite :

« Ainsi, l’examen de ces résultats permet d’en déduire que l’évaluation de la cherté de la vie n’incite pas les individus à sortir du marché. Ils sont à la recherche de nouvelles façons de consommer afin de maintenir un certain niveau de vie et de bien-être malgré une contrainte budgétaire de plus en plus forte. Pour ce faire, les consommateurs peuvent opter pour des comportements de consommation leur permettant soit de maintenir une relation avec le marché malgré la cherté de la vie (smart shopping), soit de reprendre le contrôle de leur consommation (attitude d’autoconsommation) ou soit de se détourner partiellement du marché (Attitude réfléchie dans les achats). » (p.390)

S’agissant de consommation alternative, puisqu’on l’a évoquée plus haut, la « consommation collaborative » en est l’exemple le plus commenté. Elle est ainsi définie par la publication en ligne « Pour la Solidarité » :

« Achats groupés, covoiturage, finance participative, troc de jouets ou de vêtements, échange de maisons… La consommation collaborative ne cesse de s’étendre en Europe. Fille de la crise et de la révolution numérique, cette nouvelle économie est porteuse d’espoir pour le Vieux Continent… Tous les milieux – ou presque – font l’éloge de ses mille vertus.

Le consensus apparent autour de cette économie émergente n’est pourtant pas sans soulever de questions quant à sa nature et à son ambition. La consommation collaborative constitue-t-elle un mouvement citoyen porteur d’un modèle économique alternatif et durable ou offre-t-elle, au contraire, un nouveau souffle au capitalisme ? »

https://pourlasolidarite.eu/publication/la-consommation-collaborative-une-revolution-citoyenne/

Le lecteur aura vite compris, en conclusion, que la vision étriquée, assimilationniste et démagogique des « aligneurs de prix » ne peut déboucher sur rien de constructif et de durable mais n’est qu’un paravent, un prétexte au chaos.

* Une des rares recherche d’envergure sur notre mode de consommation est la thèse de doctorat d’Etat de Michel LOUIS (Paris IX, Dauphine juin 1981) L’échange idéal. Essai sur une problématique de la consommation en Martinique.

                                                                                                                                                              Fort-de France le 1/5/25

                                                                                                                                                                Marie Laurence DELOR

https://actu.fr/normandie/neufchatel-en-bray_76462/ils-doivent-fouiller-les-poubelles-pour-manger_4558044.html

https://www.ladepeche.fr/article/2008/04/01/445611-ils-font-les-poubelles-pour-se-nourrir.html

(2) Catherine la Grande (1) une cyberguerre sans merci avec des opérations de désinformation, de manipulation, de provocation et de sabotage contre la France

Le pouvoir d'achat correspond à la quantité de biens et de services qu’un revenu permet d’acheter.  Le pouvoir d’achat dépend alors du niveau du revenu et du niveau des prix. L’évolution du pouvoir d’achat correspond donc à la différence entre l’évolution des revenus des ménages et l’évolution des prix. Si la hausse des revenus est supérieure à celle des prix, le pouvoir d’achat augmente. Dans le cas contraire, il diminue. (Economie-Gouv)

La cherté de la vie est un phénomène multifactoriel avec des problèmes structurels et de plus en plus conjoncturels du fait des changements des systèmes de production et de consommation. Sur le plan structurel, nous sommes aujourd'hui plus une société de consommation que de production des biens et services vitaux.12 a

https://theses.hal.science/tel-01845500/file/2017lare0046_GPothin.pdf

Gaëlle Pothin. La cherté de la vie du point de vue du consommateur: définition, antécédents et conséquences. Gestion et management. Université de la Réunion, 2017. França

Alors que les statistiques officielles font état d’une augmentation, certes faible, du pouvoir d’achat des français, ces derniers ne cessent d’affirmer l’inverse. Une dissonance susceptible d’être expliquée notamment par l’écart grandissant entre le rythme de croissance du pouvoir d’achat, en stagnation, et celle du « vouloir d’achat », en constante croissance (Dupré and Geradon de Vera, 2008). Les nouvelles technologies de l’information ainsi que les innovations de plus en plus rapides n’ont eu de cesse d’intégrer de nouveaux biens et services au mode de vie standard. Disposer de l’ensemble de ces standards de consommation exige un sacrifice monétaire de plus en plus conséquent pour les ménages alors que l’évolution de leur pouvoir d’achat ne suit pas la même tendance. « Un hiatus s’est ainsi progressivement affirmé entre l’entretien continu de l’envie de consommer et le tarissement des moyens pour le satisfaire » (Moati, 2016: 65). (p. 385)

Les résultats de la recherche permettent de constater que l’évaluation de la cherté de la vie conduit les consommateurs à développer différents types de comportements compensatoires. Ces derniers sont déployés par les consommateurs dans l’optique de profiter des opportunités que leur offre le marché (promotions), de reprendre le contrôle de leur consommation ou encore dans l’optique de se détourner du marché. « Loin d’être abattu ou résigné, le consommateur français se révèle au fond déterminé et pugnace et se transforme en véritable stratège de la consommation, n’hésitant pas à adopter une attitude nouvelle vis-à-vis des marques, de la distribution et d’une façon générale de la consommation » (Jourdan et al., 2011: 16). L’évaluation de la cherté de la vie amène ainsi les individus à explorer de nouvelles tactiques de consommation dans l’optique d’optimiser leur consommation. (p.386)

Même s’il est logique de penser que les gens aux faibles revenus sont plus disposés à évaluer la cherté de la vie que ceux aux revenus élevés, les résultats de l’étude démontrent que le niveau de revenu ne détermine pas l’évaluation de la cherté de la vie. Une personne dont le revenu s’avère être élevé est tout autant susceptible de percevoir que la vie est chère qu’une personne dont le revenu s’avère être moins élevé. L’évaluation de la cherté de la vie alimentée par la contexte de crise a fini par traverser les différentes couches de la société contribuant à ce que le revenu ne permette que peu de prédire cette évaluation. En d’autres termes, disposer de revenus élevés ne dispense pas une personne de la possibilité d’évaluer que la vie chère. En revanche, les résultats ont souligné le rôle du pouvoir d’achat perçu dans le cadre de la détermination de l’évaluation de la chertéde la vie. C’est la perception qu’ont les individus de leur capacité d’achat, c’est-à-dire le ressenti qu’ont les individus de leur situation financière (confortable ou contrainte), qui détermine l’évaluation de la cherté de la vie. Autrement dit, plus les individus ressentent une contrainte budgétaire, plus ils tendent à évaluer la cherté de la vie. (p.389)

Ainsi, l’examen de ces résultats permet d’en déduire que l’évaluation de la cherté de la vie n’incite pas les individus à sortir du marché. Ils sont à la recherche de nouvelles façons de consommer afin de maintenir un certain niveau de vie et de bien-être malgré une contrainte budgétaire de plus en plus forte. Pour ce faire, les consommateurs peuvent opter pour des comportements de consommation leur permettant soit de maintenir une relation avec le marché malgré la cherté de la vie (smart shopping), soit de reprendre le contrôle de leur consommation (attitude d’autoconsommation) ou soit de se détourner partiellement du marché (Attitude réfléchie dans les achats). (p.390)

Dans sa définition la plus large, la consommation collaborative permet à une communauté de particuliers de prêter, louer, donner, partager, échanger, acheter des biens ou des services.20 mai 2020

Enjeux et perspectives de la consommation collaborative

Direction générale des Entreprises

https://www.entreprises.gouv.fr › la-dge › publication

https://pourlasolidarite.eu/publication/la-consommation-collaborative-une-revolution-citoyenne/

Pour la solidarité

Achats groupés, covoiturage, finance participative, troc de jouets ou de vêtements, échange de maisons… La consommation collaborative ne cesse de s’étendre en Europe. Fille de la crise et de la révolution numérique, cette nouvelle économie est porteuse d’espoir pour le Vieux Continent… Tous les milieux – ou presque – font l’éloge de ses mille vertus.

Le consensus apparent autour de cette économie émergente n’est pourtant pas sans soulever de questions quant à sa nature et à son ambition. La consommation collaborative constitue-t-elle un mouvement citoyen porteur d’un modèle économique alternatif et durable ou offre-t-elle, au contraire, un nouveau souffle au capitalisme ? Tel est le fil directeur de cette note de PLS.

https://www.vie-publique.fr/eclairage/19381-leconomie-collaborative-un-nouveau-modele-socio-economique

L’économie collaborative, également appelée économie de partage, est une économie de pair à pair. Elle repose sur le partage ou l’échange entre particuliers de biens (voiture, logement, parking, perceuse, etc.), de services (covoiturage, bricolage, etc.), ou de connaissances (cours d’informatique, communautés d’apprentissage, etc.), avec échange monétaire (vente, location, prestation de service) ou sans échange monétaire (dons, troc, volontariat), par l’intermédiaire d’une plateforme numérique de mise en relation.

L’économie collaborative se développe dans tous les secteurs d’activité :

https://journals.openedition.org/developpementdurable/10222

Isabelle Robert, Anne-Sophie Binninger et Nacima Ourahmoune, « La consommation collaborative, le versant encore équivoque de l’économie de la fonctionnalité », Développement durable et territoires [En ligne], Vol. 5, n°1 | Février 2014, mis en ligne le 04 février 2014, consulté le 30 avril 2025. URL : http://journals.openedition.org/developpementdurable/10222 ; DOI : https://doi.org/10.4000/developpementdurable.10222

Indéniablement, la consommation collaborative contribue à démocratiser les modèles économiques orientés usage et permet d’atténuer les obstacles psychologiques inhérents au rapport à la possession des biens. En ce sens, elle permet d’expérimenter cette transition de la propriété à l’accès et au partage et permet au consommateur de se distancier de l’objet lui-même en construisant de nouveaux rapports individuels et sociaux à l’objet. Elle déclasse les valeurs conférées usuellement à la propriété (indépendance personnelle, sécurité, liberté ….) et dote de valeurs positives les modèles basés sur l’accès (simplicité, tranquillité, flexibilité, réduction du risque perçu…). Ainsi, ces nouveaux modèles ébranlent la suprématie incontestée de la logique de propriété. 

68La consommation collaborative qui réinvente de nouvelles formes de relations entre consommateurs et producteurs et entre consommateurs permet aussi de sortir des logiques économiques, organisationnelles et productives descendantes souvent propres à l’économie de la fonctionnalité qui en oubliait le consommateur. Elle confirme également l’autonomisation croissante de ce consommateur, son désir de « redevenir acteur » dans le processus de consommation (Lallement, 2010) et sa méfiance grandissante envers les modèles préétablis imposés par les marques et les distributeurs. Ce nouveau mode de partage de biens tangibles et intangibles répond également à une nouvelle logique de participer, de co-produire ensemble et à une volonté de réduire la médiation entre production et consommation.

69Mais elle reste révélatrice également de la dualité de ce consommateur, enclin à être à la fois en dehors et dans le système. Comme le précise Lallement (2010 : 36), « chez tous ces consommateurs d’un nouveau type se joue certes une méfiance vis à vis du monde marchand mais dans le même temps le désir de participer à l’échange marchand. Plus encore peut-être, leur rejet des systèmes d’échanges existants traduit une volonté d’être acteur dans l’échange. En quelque sorte c’est comme s’il s’agissait surtout d’entrer, en tant qu’acteur, dans la vaste ronde des échanges. C’est toujours quelque part consommer ; c’est surtout être acteur du monde marchand ». Comme cet article l’a montré, la consommation collaborative va dans le sens du renforcement de l’hédonisme expérientiel du consommateur et peut combler son avidité à vivre des mini-expériences (Lipovetsky, 2006) à la fois émotionnelles et ludiques. Elle peut alors contribuer à assouvir le pouvoir de consommation des citoyens dans un processus d’optimisation de leur pouvoir d’achat.

70La consommation collaborative alimente le débat qui se situe autour de la question clé de la consommation durable : le développement durable exige-t-il de consommer autrement ou de consommer moins (Jackson et Michaelis, 2003) ? Elle s’inscrit dans des schémas de consommation durable mettant l’accent sur "consuming more efficiently" as opposed to "consuming less", qui s’apparente à "the ecological modernization of consumption" (Spaargaren, 2000). Modèle alternatif possible de la consommation, elle ne pourra contribuer à installer l’économie de la fonctionnalité que si le paradigme social dominant caractérisé par une croyance en une croissance matérielle indéfinie et le mythe de la consommation illimitée sont interrogés (Prothero et al, 2011). Les valeurs portées par cette hyperconsommation ont radicalement modifié le rapport à la consommation en la déconnectant de l’environnement. Comme le rappelle Dolan (2002), le sentiment de supériorité de l’homme sur la nature n’est pas « simplement le produit de l’imagination de l’individu mais le résultat des interdépendances tant entre les hommes et la nature qu’entre les différents groupes sociaux au sein de la société ».

La problématique du pouvoir d’achat intéresse principalement les salariés et les retraités précarisés ainsi que les chômeurs, pas cet attelage de petits bourgeois en échec et aigris, de curé défroqué et de gens au parcours problématique qu’on voit gesticuler au nom d’une représentativité dont on cherche encore la légitimité.

https://journals.openedition.org/chrhc/1809

Emily S. Rosenberg, « Le « modèle américain » de la consommation de masse », Cahiers d’histoire. Revue d’histoire critique, 108 | 2009, 111-142.

Le modèle américain de consommation de masse prit forme dans les circonstances historiques de la fin du dix-neuvième siècle et du début du vingtième siècle. Il se développa au moyen d’outils de plus en plus sophistiqués pour stimuler les marchés, notamment la publicité. Il permit aussi à une nation très diverse de nouer des liens à travers un « nationalisme matériel » fondé sur la communauté de consommation de masse.

67Ce système de masse, combinant consumérisme et publicité, se développa dans le monde entier et, comme aux États-Unis, s’adapta facilement. Il séduisit au-delà des différences nationales, régionales, ethniques, mais aussi de genre, de classe et d’idéologie. Les aspirations qui marquèrent la fin de la guerre froide et de l’après-guerre froide montrent que des traditions idéologiques et des gouvernements différents ont essayé d’adopter les icônes et les imaginaires de la consommation de masse pour renforcer leur propre légitimité. La consommation de masse devint de moins en moins synonyme « d’américanisation », car elle appartint à la fois au global et au local.

  • 66  Thomas L. Friedman, Hot, Flat, and Crowded : Why We Need a Green Revolution and How It Can Renew A (...)

68Toutefois, ce système qui s’étendait dans le monde entier demeura ancré dans ses origines américaines, basé sur des ressources bon marché et une force de travail relativement insuffisante. Pendant la guerre froide notamment, les entreprises américaines et les élites dirigeantes s’enorgueillirent de la capacité du système consumériste et de la publicité à stimuler la demande et à revivifier le tissu industriel et le monde de l’emploi, amenant à un niveau de vie plus élevé pour les citoyens et les travailleurs partout dans le monde. Mais aujourd’hui, une telle vision productiviste universelle apparaît définitivement incompatible avec le vingt et unième siècle et ses enjeux environnementaux.

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