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Gabriel SAJUS, le pere a laisse en mourrant une veuve et deux orphelins. Devinez la suite....

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Billet de blog 29 mai 2017

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Le piège, la cène à 33 ans de Gabriel SAJUS

Il y avait un avant familial, il y aura un après destructeur après ce jour d’août 1967. C’était un piège politique tendu pour le montrer du doigt comme on montre “le chien enragé” et se donner une raison de le tuer. La fabrication d’un motif.

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Illustration 1
Gabriel SAJUS (1933-1967)

Nous sommes en août 1967, dans le sud de la France, à Ramonville St Agne. Gabriel SAJUS, jeune élu de 33 ans est entré au Conseil Municipal de la ville. Très rapidement il accède à des responsabilités, notamment dans la jeunesse et dans l'urbanisme. Ramonville en 1967 est encore à construire et à se développer. Gabriel SAJUS vient d'y installer sa famille, en construisant une maison cubique, face à des champs. Un homme solide, ancien rugbyman, rôdé aux relations humaines du fait que pensionnaire au lycée Fermat depuis l'âge de 11 ans, il avait du se faire sa place et apprendre à se confronter à l'être humain. Puis, c'est à Saint Cyr qu'il cogna à la porte, qui lui ouvrit jusqu'en seconde année où la maladie cardiaque s'invita dans sa vie pour l'emmener à l'intervention chirurgicale à cœur ouvert qu'il devait subir en septembre 1967. 

Blond aux yeux bleus, cheveux en brosse, il représentait la classe politique du centre démocrate et s’était “miraculeusement” vu gravir tous les échelons sociaux, comme si des ailes lui avaient poussées, astiquées et en l’espace de dix ans, il avait été propulsé sur le devant de la scène politique comme le Messi. La maison était pleine des édiles, on lui demandait conseils à répétion et il se retrouva secrétaire général d’un parti politique. Impressionnant? Il se parlait même d’un possible tournant politique à la députation de 1968. Il était pressenti pour se présenter.  “Un phare de la région”.
Mais, ce ne fut pas le scénario retenu. Une chute sur le nez lui briserait le nez. Lui a-t-on livré des costumes à la Mairie? 33 ans, un âge qui n’est pas sans rappeler le dîner de 13 copains dont Judas.assombrit le tableau de la cène. Il ne se parle que de ce Judas. N’empêche que ce qui était prévu de se passer, se passa et il fut enseveli après avoir été livré à ses bourreaux.

Il s'avance vers la mairie, ouvre la porte et serrant les mains de toutes les personnes présentes, il sourit et réponds aux questions concernant sa santé qui lui sont posées. Chacun est conscient de la gravité de sa maladie. Il a bouclé tous ses dossiers, les conseils municipaux ont été concluants, le projet de la nouvelle école communale en cours et son petit dernier concernant des immeubles en projet a été voté à l'unanimité. Il avait pu, l'esprit tranquille partir avec sa famille à Capbreton, où il se reposerait et perdrait les derniers kilos et eaux que la circulation extra corporelle exigeait qu'il perde. Il était en insuffisance cardiaque sévère et l'opération urgeait. Il serait l'un des premiers à en bénéficier, mais à Plessis-Robinson (Paris), à la clinique Marie-Lanelongue.

Peu de courrier, il était serein, la ville de Ramonville se passerait bien de lui, le temps de l'opération et de la rééducation cardiaque de 3 mois, prévue à Dreux dans les suites post-opératoires. Il n'était pas sûr de revenir et n'avait pas bien le moral. Pour preuve, les bijoux d’au revoir qu'il avait offert à son épouse et à chacun de ses enfants. Il nous avait dit qu'on aurait un souvenir de lui. "Papa, c'est tous les jours que l'on se souvient de toi...après ce jour d'août 1967, où tu es venu lire ton courrier d’élu”.

Un petit verre d'eau et il allait repartir, lorsque la secrétaire de Mairie lui susurre que le projet immobilier qui lui tient à cœur a été modifié en son absence et que de moins de quatre étages, ils vont devenir bien plus hauts... Gabriel SAJUS, fatigué, reçoit cette information de plein fouet, comme une trahison. "Alors que voté en conseil municipal, approuvé, etc, alors qu'il était absent et ne devait pas revenir avant six mois, son projet immobilier avait été revu et corrigé". Aujourd'hui, on parle de moralisation de la vie politique, mais il y a bien longtemps que des hommes seuls, dans leur village, se battent contre des coups bas politiques. Il va s'employer à faire connaître sa position et faire en sorte que le projet initial voté par la commune soit celui qui sorte de terre.

En effet, nous pouvons admirer 50 ans après, les immeubles de moins de quatre étages, roses, paisibles, abritant des logements sociaux coquets, propres. Pas de drogue, pas de trafic. Ils sont sortis de terre, mais Gabriel SAJUS, mon père, fut porté en terre après son décès à Paris le 15 septembre 1967. J'avais 9 ans, il en avait 33. La ville entière était sous le choc après sa disparition brutale, il y a eu des discours. J'essaye de me rappeler le silence qui a débuté ce jour là, nous avons été enveloppés dans un sale drap et comme on veut étouffer un feu, ma famille fut placée sous une chape de plomb pour ne jamais revoir le soleil, papa.

Quel jour de la vie de Gabriel SAJUS a fait de sa vie un calvaire, dont il ne découvrira la révélation que sous le joug de la torture. Est ce, le jour où il été admis à Saint-Cyr COETQUIDAN en 1953, le jour où il en est parti ou le jour d'août 1967 où il est allé voir son courrier ou le 15 septembre 1967 ? Un bouquet de fleurs était posé tous les ans, un certain jour d'août, au cimetière de Ramonville devant sa tombe, comme si ce jour était celui où le piège s’était refermé.

Son nom fut donné à l’école maternelle et élémentaire qu’il avait travaillé avec le rectorat et aidé par ma grand-mère maternelle (Mme Juliette BRATIERES) Directrice d’école des Amidonniers.  Elle lui ouvrit toutes les portes de ses relations au sein de l’Academie de Toulouse et le projet était devenu réalité.

Plus de cinquante ans plus tard, la vie poursuit son cours, les enfants vont à l’école Gabriel SAJUS, insouciants et heureux de vivre protégés en ces murs. 

Marie-Pierre SAJUS, le 29 mai 2017, révisé le 18 décembre 2023.

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