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Billet de blog 8 novembre 2025

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Israël-Palestine, entre deux mauvaises notes, la justesse comme dernière utopie

Et si la paix n’était pas une harmonie mais une dissonance assumée ? De la phrase d’un pianiste autrichien à un film franco-maghrébin, cette réflexion mêle musique, sciences dures, sociologie et politique pour comprendre pourquoi la vérité, comme l’amour ou la justice, ne se trouve jamais dans la pureté… mais dans l’art fragile de l’entre-deux.

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Illustration 1
Image tirée du film “Mauvaise foi” de 2006

Pianiste autrichien du début du XXᵉ siècle, Arthur Schnabel fut connu autant pour son interprétation exigeante de Beethoven que pour sa réflexion sur la nuance et l’imperfection. Lorsqu’il écrit : « L’inconvénient du piano, c’est que chaque bonne note est située entre deux mauvaises », il ne parle pas seulement de musique, mais du monde, il énonce, presque sans le vouloir, une loi universelle de la justesse humaine. Entre ordre et chaos, entre certitude et erreur, l’homme cherche le ton juste celui qui ne supprime pas la dissonance mais l’habite. Cette phrase, apparemment anodine, devient ainsi une métaphore du vivre ensemble, la perfection n’existe que dans son instabilité, comme un équilibre fragile entre deux excès.

Cette idée engage trois dimensions fondamentales, le social, où la norme ne vit que par la déviance; le scientifique, où la vérité se définit entre deux marges d’erreur; et le politique, où la justice s’égare entre la rigidité de la loi et l’arbitraire du pouvoir. La justesse, dès lors, n’est ni morale ni esthétique, elle est une praxis, un art de l’ajustement. C’est ce que l’on pourrait nommer une éthique du rythme une manière de conjuguer raison et résonance, rigueur et sensibilité.

Cette réflexion trouve un écho dans la pensée d’Ibn Khaldoun, grand historien et sociologue du XIVᵉ siècle, pour qui l’histoire humaine est faite d’alternances entre cohésion et désagrégation, entre ʿasabiyya (solidarité collective) et dissolution du lien social. Il écrivait : « La rivalité des groupes, lorsqu’elle cesse d’être une force d’union, devient la cause de leur ruine. » Cette formule éclaire avec une puissance troublante le conflit israélo-palestinien, né d’une mémoire partagée, il s’est figé dans la séparation, chaque peuple cherchant à préserver son unité contre l’autre au lieu de la penser avec lui. Ce qui liait la langue, la terre, la foi, le commerce s’est retourné en principe d’exclusion. Entre deux mauvaises notes de l’histoire, la “bonne” celle du vivre ensemble semble toujours manquer.

Le film Mauvaise foi (Roschdy Zem, 2006) transpose cette tension à l’échelle intime. L’histoire est simple, presque banale, Clara, juive, et Ismaël, musulman, s’aiment et attendent un enfant. Mais autour d’eux, tout se crispe, les familles, les identités, les traditions. L’amour devient un champ de bataille symbolique, où chaque mot pèse comme une frontière. Ce film, tendre et cruel à la fois, ne raconte pas seulement une romance, il interroge la possibilité même d’un accord dans un monde de dissonances. À travers le couple, il met en scène la société entière, comment aimer, juger, décider ou coexister lorsque chaque bonne note semble menacée par deux fausses ?

Ce problème dépasse la sphère morale; il touche à la structure du réel. Comme le suggérait déjà Baudrillard, nos sociétés modernes vivent dans la simulation du vrai, nous cherchons l’harmonie par excès de maîtrise, jusqu’à produire l’inverse de ce que nous voulions préserver. À force de vouloir corriger la dissonance, nous détruisons la musique. La justesse devient alors un défi politique, comment retrouver un sens de la mesure dans un monde saturé de systèmes, d’algorithmes, d’images et de dogmes ?

Dès lors, comment penser la justesse humaine, sociale, scientifique et politique dans un monde où chaque vérité, chaque amour, chaque paix semble suspendue entre deux erreurs ?

Pour y répondre, il s’agira d’abord d’examiner la justesse sociale, ce fragile équilibre entre cohésion et conflit qui fonde toute vie collective.

Nous verrons ensuite comment la justesse scientifique, née du calcul et de l’incertitude, éclaire notre manière de concevoir la vérité et la connaissance.

Enfin, nous montrerons que cette tension culmine aujourd’hui dans la justesse contemporaine, où la responsabilité humaine s’efface derrière les systèmes techniques et les procédures juridiques, et où repenser la paix comme dans le couple de Mauvaise foi exige d’apprendre à jouer à nouveau entre les dissonances du monde.

La justesse sociale: l’équilibre instable des valeurs humaines

« L’inconvénient du piano, c’est que chaque bonne note est située entre deux mauvaises », écrivait Arthur Schnabel. Cette phrase, à la fois légère et vertigineuse, dit l’essence même de la condition humaine, l’impossibilité d’atteindre la justesse autrement qu’en oscillant entre deux erreurs. Cette oscillation ne relève pas seulement d’une morale individuelle, mais d’un processus social de régulation, comme l’a montré Durkheim, la norme ne tient que par le jeu dialectique entre conformité et transgression, et c’est précisément cette tension qui fonde la possibilité du collectif. Durkheim montrait déjà donc que la norme n’existe qu’à travers sa transgression, sans déviance, la société ne sait plus ce qu’elle valorise. Le « bon » ne se définit que face au « mauvais ». La morale, comme la musique, se construit dans le contraste.

C’est aussi vrai à l’échelle collective, trop d’ordre tue la liberté, trop de désordre détruit le lien. Simmel parlait du conflit comme d’une « forme de socialisation », la tension n’est pas ce qui menace la société, mais ce qui la rend vivante. On pourrait dire, dans une perspective plus contemporaine, que le conflit agit ici comme opérateur d’individuation, il ne détruit pas le lien social, il le reconfigure. Cette idée rejoint l’intérêt de Haber pour une sociologie du conflit comme moteur d’émancipation et non comme menace de dissolution. Le juste se situe toujours entre le conformisme paralysant et la rupture anarchique. La tolérance n’est donc pas absence de conflit, mais gestion créative des dissonances.

Le film Mauvaise foi (Roschdy Zem, 2006) transpose parfaitement ce principe. Clara, juive, et Ismaël, musulman, s’aiment au sein de deux familles qui s’opposent, deux identités qui s’excluent. Leur couple devient une métaphore de la note juste, fragile, dissonante, mais vraie. La pureté identitaire y est stérile; seule la tension permet la sincérité.

Anthropologiquement, cette histoire rejoint une réalité antérieure à toute géopolitique moderne, avant la division coloniale et nationale, Juifs et Arabes faisaient partie d’un même monde sémitique. Langues, rites, métiers, musiques s’entremêlaient. Ce rappel historique invite à dépasser la lecture culturaliste de la différence pour la penser comme construction politique. C’est ici que l’analyse rejoint les questionnements de la sociologie critique, comment les dispositifs de pouvoir produisent-ils des identités antagonistes à partir d’une continuité vécue ? L’Europe a figé ce tissu vivant en opposition binaire, le XXᵉ siècle a transformé la cohabitation en conflit. De 1917 (Déclaration Balfour) à 1948 (création d’Israël et Nakba), puis à 1967 (occupation de la Cisjordanie et de Gaza), la coexistence possible s’est durcie en rivalité existentielle. Comme dans Mauvaise foi, la “bonne note” celle du vivre ensemble s’est perdue entre deux dissonances, la peur de disparaître et la tentation de dominer.

Ainsi, la justesse sociale apparaît comme une forme d’équilibre entre des forces contraires, une composition fragile entre cohésion et singularité. La justesse n’est donc pas une vertu morale mais une forme de rationalité située, toujours menacée de se perdre dans ses propres excès, ce qui en fait un objet à la fois éthique et politique. Mais cet équilibre, déjà précaire dans la vie collective, devient encore plus complexe lorsque l’on s’aventure sur le terrain du savoir et de la vérité scientifique. Car là aussi, la justesse n’est pas donnée, elle se cherche entre deux erreurs.

La justesse scientifique: entre deux marges d’erreur

Dans les sciences dures, l’idée de Schnabel trouve une traduction littérale. Chaque mesure, chaque théorie se situe entre deux marges d’erreur. Le réel n’est jamais capturé sans reste. L’incertitude n’est pas un accident, elle est une loi du monde, Heisenberg, Prigogine ou Popper ont tous montré que la vérité scientifique se définit comme un mouvement d’ajustement permanent. L’intérêt d’une telle analogie est de rappeler que la rationalité scientifique, loin d’être l’idéal d’une pure objectivité, s’inscrit dans une économie de l’erreur, elle ne supprime pas le réel, elle l’interprète. C’est aussi une idée que Haber développe dans ses analyses du réalisme critique, toute vérité suppose une part d’incomplétude assumée. Connaître, c’est mesurer entre deux imprécisions; la perfection est un horizon, non un état.

Cette logique s’applique aussi aux relations humaines. Nous voulons souvent prouver notre sincérité, démontrer notre justesse morale, comme si le sentiment pouvait se calculer. Or la vérité humaine, comme la donnée expérimentale, se joue dans la marge, elle n’existe qu’entre deux excès, la froide rigidité du raisonnement et l’aveuglement de la passion. Dans Mauvaise foi, tout s’effondre quand Clara et Ismaël cherchent à prouver ce qui ne peut que se vivre. Leur couple, comme une équation sensible, n’a de sens qu’à travers la reconnaissance de son imprécision.

L’histoire du conflit israélo-palestinien illustre cette même illusion de pureté. Chacun cherche la preuve irréfutable,  continuité biblique, antériorité historique, droit divin ou national. Pourtant, l’histoire du Levant est faite de strates, de conquêtes, de retours, d’exils. Elle n’est pas univoque, elle est palimpseste. Vouloir la réduire à une donnée fixe revient à falsifier le réel. Le regard sociologique gagnerait ici à déplacer la question de la vérité vers celle des usages de la vérité, qui, à chaque époque, a le pouvoir de définir ce qui compte comme récit légitime ? Ce renversement méthodologique, inspiré par Foucault ou Elias, permettrait de penser le conflit non comme divergence d’héritages, mais comme lutte pour la reconnaissance symbolique du vrai. L’enjeu n’est pas de déterminer qui “a raison” depuis trois mille ans, mais d’accepter que la vérité historique, comme la vérité scientifique, ne se situe ni d’un côté ni de l’autre, mais dans la capacité à composer les contradictions.

L’équilibre dynamique de la nature offre une métaphore puissante. Dans un écosystème, la stabilité n’est pas l’immobilité, mais la régulation continue d’énergies contraires. Une société, un couple, une région peuvent se maintenir vivants à condition d’accepter la variation, la plasticité. Chaque fois qu’on a voulu figer le Proche-Orient dans un ordre définitif, partition, mur, colonisation, ou plan de paix unilatéral, l’instabilité est revenue avec plus de force. Mauvaise foi en est l’écho intime, le couple ne survit que lorsqu’il cesse de chercher le point fixe et accepte d’être un équilibre mouvant.

Mais cet équilibre, si difficile à atteindre dans la connaissance comme dans les relations humaines, devient encore plus fragile lorsque la responsabilité se dilue dans la complexité des systèmes contemporains. La justesse, autrefois affaire de conscience ou d’instinct, est aujourd’hui menacée par la logique des algorithmes et l’inertie du droit international. C’est là que se joue la dernière forme de cette réflexion, la justesse contemporaine.

La justesse contemporaine: l’humain entre algorithme et responsabilité

Cette dialectique entre incertitude et régulation ne se limite plus aujourd’hui aux domaines de la connaissance, elle s’étend aux dispositifs techniques et politiques eux-mêmes. La question devient alors de savoir qui, dans cette architecture de médiations, détient encore la capacité d’agir.

À l’époque des systèmes automatisés, la question de la justesse dépasse l’individu, elle devient structurelle. L’article du Financial Times sur « The Unaccountability Machine » décrit comment les grandes institutions délèguent leurs choix à des procédures, des algorithmes, des niveaux hiérarchiques toujours plus abstraits. Le résultat, plus personne n’est réellement responsable. La bonne décision celle qui serait humaine, réfléchie, éthique se perd entre deux mauvaises, la froideur du système et la faiblesse de l’individu.

Ce schéma s’observe aussi dans la gouvernance du conflit israélo-palestinien. Chacun invoque des contraintes supérieures, l’ONU, la sécurité, la mémoire, la vengeance. Or le droit international lui-même, censé servir de clavier commun, produit ici des dissonances. La Résolution 181 de 1947 (Plan de partage) prévoyait deux États; la Résolution 242 de 1967 exigeait le retrait des territoires occupés; la Résolution 338 de 1973 réaffirmait ce principe. Ces textes existent, mais leur application reste suspendue, comme une partition jamais jouée. Ce hiatus entre la norme et sa mise en œuvre illustre ce que Jürgen Habermas nomme la “crise de légitimité” des institutions modernes, la rationalité procédurale ne suffit plus à garantir la justice sans une adhésion éthique partagée. C’est ici que le droit rejoint la philosophie politique.

Le droit humanitaire international, notamment les Conventions de Genève de 1949, interdit le transfert de population et la colonisation dans les territoires occupés, tandis que le Statut de Rome(1998) de la Cour pénale internationale qualifie ces pratiques de crimes de guerre. Pourtant, les colonies s’étendent, les violations perdurent, et les responsabilités se renvoient d’un acteur à l’autre. Le principe d’autodétermination des peuples, consacré à l’article 1 de la Charte des Nations Unies, s’oppose ici au droit à la sécurité invoqué par Israël, deux principes également légitimes, mais incompatibles dans leurs applications concrètes.

Ainsi, la scène juridique mondiale reproduit la métaphore de Schnabel, la “bonne note” celle de la justice équilibrée se trouve étouffée entre deux extrêmes. Trop de règles sans incarnation mènent à la paralysie; trop de pragmatisme sans droit conduit à l’arbitraire.

Face à cette impasse, une pensée nouvelle de la responsabilité s’impose. Ni le juridisme froid ni l’émotion brute ne suffisent. Il faut une raison sensible, capable d’articuler la loi et la compassion. Le philosophe Hans Jonas en esquissait les fondements, une éthique de la responsabilité tournée vers la protection du vivant, donc du futur. Dans Mauvaise foi, cette idée se traduit à une échelle intime, la responsabilité ne consiste pas à choisir un camp, mais à maintenir le lien, à préserver la possibilité de dialogue.

Penser juridiquement la paix, ce serait reconnaître les fautes non pour les hiérarchiser, mais pour en faire une base commune de droit. Les résolutions de l’ONU, au lieu de rester des symboles, pourraient redevenir des instruments vivants, capables d’intégrer la mémoire des souffrances croisées Shoah, Nakba, occupation, attentats sans les opposer. Ce serait une manière d’inventer ce que l’on pourrait appeler une écologie de la justesse, un droit accordé aux dissonances, où la fragilité humaine devient un matériau de paix plutôt qu’un obstacle à la vérité.

Mauvaise foi, dans cette perspective, n’est plus une comédie romantique, mais une allégorie politique. Le couple juif-musulman y incarne la possibilité d’un “vivre malgré”, malgré la peur, malgré les règles, malgré l’histoire. Leur amour échoue peut-être, mais il ouvre un espace de nuance que ni la religion, ni le droit, ni la société n’avaient su préserver.

En dernière instance, cette réflexion invite à concevoir la justesse non comme harmonie mais comme praxis critique, un travail permanent de redéfinition du sens commun à partir des tensions qui le traversent. C’est peut-être là, au fond, ce que Schnabel pressentait sans le dire, la vérité, dans l’art comme dans la société, n’est pas l’absence de fausse note, mais la capacité d’en tirer une nouvelle mélodie.

En conclusion, cette réflexion conduit à concevoir la justesse non comme harmonie paisible, mais comme praxis critique, un travail continu de réajustement entre normes, affects, savoirs et institutions. Être juste, ce n’est pas éliminer la dissonance, c’est la reconnaître comme le lieu même où le sens se forme. L’histoire, la science et la société ne se construisent pas sur des équilibres figés, mais sur des oscillations réglées, sur un mouvement perpétuel de correction et de réinterprétation. La justesse suppose un effort de lucidité, elle demande de ne pas confondre la stabilité avec la vérité, ni la vitesse avec le progrès.

Ainsi comprise, elle devient une catégorie du temps autant que de l’action, elle ne dit pas seulement ce qu’il faut faire, mais quand le faire, comment ajuster le geste au contexte mouvant du monde. La pensée contemporaine, en cherchant à mesurer, prévoir, modéliser, oublie souvent cette dimension temporelle de la justesse cette nécessité de s’accorder non à une norme abstraite, mais au rythme du réel. La vérité ne tient plus dans la fixité d’un principe, mais dans la capacité à maintenir le mouvement sans se dissoudre, à conjuguer raison et résonance.

Dans cette perspective, la métaphore musicale retrouve toute sa portée, dans l’art comme dans la société, la vérité ne se mesure pas à l’absence de fausse note, mais à la capacité de transformer la dissonance en force de composition. Être juste, c’est accepter la tension entre rigueur et fragilité, entre structure et souffle. La justesse sociale, scientifique et juridique devient alors l’épreuve de notre maturité politique et morale, acceptons-nous d’habiter l’entre-deux cet espace où l’incertitude devient féconde ou préférons-nous la brutalité des certitudes univoques ?

Cette exigence de justesse prend une portée encore plus aiguë lorsqu’elle touche à la guerre et à la paix. Non pas au sens abstrait d’un idéal lointain, mais dans la manière dont nous écoutons, nommons et jugeons les violences réelles. Le monde contemporain semble condamné à choisir entre la surdité du dogme et la cacophonie du désordre, oubliant que la paix véritable ne naît pas du silence, mais de l’écoute. Comme l’écrivait Albert Einstein : « Peace cannot be kept by force; it can only be achieved by understanding. »

Cette phrase ne vaut pas comme slogan moral, mais comme diagnostic, tant que nous traiterons la paix comme un état imposé, une suspension mécanique du conflit, nous manquerons cette intelligence fine des dissonances qui seule permet de recomposer le commun. L’enjeu n’est pas d’effacer la guerre, mais d’en comprendre la grammaire d’y déceler les rythmes, les pulsations, les raisons cachées qui la traversent afin de rendre possible une autre forme d’équilibre, plus organique, plus consciente.

La paix ne relève pas d’un miracle ni d’un consensus définitif, mais d’une vigilance, d’un art du tempo, elle suppose que l’on sache distinguer la tension qui fait vivre de celle qui détruit. Elle demande, autrement dit, une éthique du rythme une capacité à tenir la note juste entre mémoire et avenir, entre peur et responsabilité, entre vérité et compassion. La guerre est la saturation du bruit; la paix, l’accord fragile qui s’en dégage. Tout l’enjeu humain réside peut-être là, savoir, dans la dissonance du monde, reconnaître encore le son d’une mélodie possible.

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