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Billet de blog 5 février 2019

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Faire taire une fake news

Bonjour, je viens par le présent démonter les fausses rumeurs qui courent sur les pratiques des urgences. En effet depuis deux mois on voit apparaitre des posts où des gilets jaunes seraient fichés lors de leur venue aux urgences. Tout est employé pour convaincre, articles de journaux, communiqués de la police. Tout cela est faux.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Bonjour, je viens par le présent démonter les fausses rumeurs qui courent sur les pratiques des urgences. En effet depuis deux mois on voit apparaitre des posts où des gilets jaunes seraient fichés lors de leur venue aux urgences. Tout est employé pour convaincre, articles de journaux, communiqués de la police. Tout cela est faux. Les médecins et le personnel de santé est tenus au secret professionnel et au secret médical. La mission de l'hôpital public est de soigner toutes personnes sans distinction de race de religion de sexe et d'opinions. le simple fait de dévoiler le nom d'un patient est considère comme une violation du secret professionnel et médical . Voici les textes qui le régissent :

Article 4 (article R.4127-4 du code de la santé publique)

Le secret professionnel, institué dans l'intérêt des patients, s'impose à tout médecin dans les conditions établies par la loi.

Le secret couvre tout ce qui est venu à la connaissance du médecin dans l'exercice de sa profession, c'est-à-dire non seulement ce qui lui a été confié, mais aussi ce qu'il a vu, entendu ou compris.

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De très ancienne tradition, le secret médical reste un des piliers de l'exercice de la médecine contemporaine (voir note [1]). En effet, « il n’y a pas de soins sans confidences, de confidences sans confiance, de confiance sans secret » (voir note [2]). Le médecin ne doit rien révéler de ce qu’il a connu ou appris sur son patient.

Le secret professionnel du médecin ou secret médical – les deux termes sont employés indifféremment - est à la fois d'intérêt privé et d'intérêt public :

  • D'intérêt privé : le médecin doit garantir le secret à la personne qui se confie à lui; elle doit être assurée de ne pas être trahie. Sa confiance doit être sans faille, si elle a à donner une information intime utile au médecin et aux soins. Respecter le secret est un comportement imposé par la nature des informations dont la divulgation à des tiers pourrait porter atteinte à la réputation, à la considération ou à l'intimité de la personne qui s'est confiée au médecin ; le droit au respect de l'intimité est inscrit dans la déclaration universelle des Droits de l'Homme.
  • D'intérêt public : l'intérêt général veut que chacun puisse être convenablement soigné et ait la garantie de pouvoir se confier à un médecin, même s'il est dans une situation sociale irrégulière/marginale, pour bénéficier de ses soins, sans craindre d'être trahi ou dénoncé.


Le secret est un devoir du médecin.

Le code de déontologie formule la règle du secret médical, dès son article 4 pour en montrer l'importance. Il le fait de façon beaucoup plus explicite que le code pénal et sur le seul terrain de l'exercice de la médecine. L'article 4 en pose le principe et en définit la substance. Ses conséquences sont développées à l'article 72 en ce qui concerne les personnes qui assistent le médecin, aux articles 73 et 104 en ce qui concerne les documents médicaux.

Le secret n’est pas opposable au patient. Au contraire, le médecin lui doit toute l’information nécessaire sur son état, les actes et soins proposés ou dispensés (article 35). Si le médecin est amené à retenir une information vis-à-vis du patient, usant ainsi de la faculté que lui ouvre l’article 35, c’est pour le protéger d’une révélation traumatisante et non au nom du secret médical.

1 - Le secret professionnel s'impose à tout médecin dans les conditions établies par la loi

Chronologiquement, c’est d’abord le code pénal qui, en sanctionnant toute violation du secret auquel sont astreints certains professionnels – au premier rang desquels les médecins – donne un support légal à cette obligation. Elle figure aujourd’hui sous l’article 226-13 du code pénal.

Les codes de déontologie médicale successifs viendront en préciser la définition avant que n’intervienne l’article L.1110-4 du code de la santé, introduit par la loi n°2002-303 du 4 mars 2002 qui consacre un droit du patient.

A – LA LOI

  • Code de la santé publique - Article L.1110-4 :

« Toute personne prise en charge par un professionnel, un établissement, un réseau de santé ou tout autre organisme participant à la prévention et aux soins a droit au respect de sa vie privée et du secret des informations la concernant.

Excepté dans les cas de dérogation, expressément prévus par la loi, ce secret couvre l’ensemble des informations concernant la personne venues à la connaissance du professionnel de santé, de tout membre du personnel de ces établissements ou organismes et de toute autre personne en relation de par ses activités avec ces établissements ou organismes. Il s’impose à tout professionnel de santé ainsi qu’à tous les professionnels intervenant dans le système de santé.

Deux ou plusieurs professionnels de santé peuvent toutefois sauf opposition de la personne dûment avertie, échanger des informations relatives à une même personne prise en charge, afin d’assurer la continuité des soins ou de déterminer la meilleure prise en charge sanitaire possible. Lorsque la personne est prise en charge par une équipe de soins  dans un établissement de santé, les informations la concernant  sont réputées confiées par le malade à l’ensemble de l’équipe.

Les informations concernant une personne prise en charge par un professionnel de santé au sein d’une maison ou d’un centre de santé sont réputées confiées par la personne aux autres professionnels de santé de la structure qui la prennent en charge, sous réserve :

1° du recueil de son consentement exprès, par tout moyen, y compris sous forme dématérialisée. Ce consentement est valable tant qu’il n’a pas été retiré selon les mêmes formes ;

2° de l’adhésion des professionnels concernés au projet de santé mentionné aux articles L.6323-1 et L.6323-3.

La personne, dûment informée, peut refuser à tout moment que soient communiquées des informations la concernant à un ou plusieurs professionnels de santé.

Afin de garantir la confidentialité des informations médicales mentionnées aux alinéas précédents, leur conservation sur support informatique, comme leur transmission par voie électronique entre professionnels sont soumises à des règles définies par décret en Conseil d’Etat pris après avis public et motivé de la Commission nationale de l'informatique et des libertés. Ce décret détermine les cas où l’utilisation de la carte professionnelle  de santé mentionnée au dernier alinéa de l’article L.161-33 du code de sécurité sociale est obligatoire. La carte de professionnel de santé et les dispositifs équivalents agréés sont utilisés par les professionnels de santé, les établissements de santé, les réseaux de santé ou tout autre organisme participant à la prévention et aux soins.

Le fait d’obtenir ou de tenter d’obtenir la communication de ces informations en violation du présent article est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende.

En cas de diagnostic ou de pronostic grave, le secret médical ne s’oppose pas à ce que la famille, les proches de la personne malade ou la personne de confiance définie à l’article L.1111-6 reçoivent les informations nécessaires destinées à leur permettre d’apporter un soutien direct à celles-ci sauf opposition de sa part. Seul un médecin est habilité à délivrer, ou à faire délivrer sous sa responsabilité, ces informations.

Le secret ne fait pas obstacle à ce que les informations concernant une personne décédée soient délivrées à ses ayants droit, dans la mesure où elles leur sont nécessaires pour leur permettre de connaître les causes de la mort, de défendre la mémoire du défunt, ou de faire valoir leurs droits, sauf volonté contraire exprimée par la personne avant son décès. »

On note que cet article (alinéa 2) donne une définition large du secret professionnel : il couvre l’ensemble des informations sur la personne venues à la connaissance du professionnel de santé, non seulement en ce qui concerne son état de santé mais aussi son identité, ce qu’il a confié ou ce que le médecin a compris à son propos.

L’alinéa 3 précise la notion de secret partagé et en fixe les limites. La règle générale est que le partage n’intervient qu’entre professionnels de santé, pour la prise en charge et la continuité des soins et sauf opposition de la personne dûment avertie. Elle connaît deux variantes, l’une concernant les établissements de santé publics et privés, l’autre des maisons ou centres de santé dont les professionnels qui y exercent ont adhéré au projet de santé mentionné aux articles L.6323-1 et L.6323-3.

Dans les établissements de santé, le consentement du patient au partage des données le concernant au sein de l’équipe qui le prend en charge est présumé acquis (3ème alinéa, 2ème phrase). Dans les maisons ou centres de santé, les informations sont réputées confiées par le patient aux autres professionnels de la structure qui le prennent en charge, sous réserve de son consentement exprès et de l’adhésion des professionnels concernés au projet de santé mentionné aux articles L.6323-1 et L.6323-3 (voir note [3]). La personne, dûment informée, peut refuser à tout moment que soient communiquées des informations la concernant à un ou plusieurs professionnels de santé (alinéas 4 à 7 introduits par l’article 2 de la loi n° 2011-940 du 10 août 2011).

Il n’y a aucune justification, déontologique ou médicale, à ce que les droits des patients au respect du secret des informations les concernant fassent l’objet de régimes différents selon le cadre d’exercice du professionnel de santé auquel ils s’adressent.

Le Conseil national a fait connaître son opposition à ces distinctions.

L’alinéa 9 punit par ailleurs d’amende et d’emprisonnement, non seulement celui qui a trahi le secret mais aussi celui qui obtient ou tente d’obtenir des renseignements en violation de la règle.

Enfin, si les ayants droit se voient reconnaître sous certaines conditions l’accès aux éléments du dossier d’une personne décédée (dernier alinéa) ce n’est que dans la limite de ce qui leur est nécessaire pour connaître les causes de la mort, défendre la mémoire du défunt, faire valoir des droits, et sous réserve que le patient n’y ait pas fait opposition de son vivant (CE - 26 septembre 2005, Conseil national de l’Ordre des médecins, req. n°270234).  

  • Code pénal - Article 226-13 :

«La révélation d'une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par état ou par profession, soit en raison d'une fonction ou d'une mission temporaire, est punie d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende. »

Le code pénal ne fait pas référence aux médecins. Il traite du secret professionnel en général et non de façon spécifique du secret médical.

Cependant, il serait faux de croire que le médecin peut partager les informations qu’il détient à raison de son activité professionnelle avec un autre professionnel, lui-même tenu au secret dans les termes de l’article 226-13 du code pénal. Le secret médical est le secret professionnel du médecin, comme le secret notarial est celui du notaire.

Même entre médecins, le secret ne se partage pas dès lors qu’ils ne participent pas à la prise en charge d’un même patient.

  • Code de la sécurité sociale

Le code de la sécurité sociale rappelle lui aussi que le secret professionnel est au nombre des grands principes de la médecine en France. L'article L.162-2  est ainsi libellé :

« Dans l'intérêt des assurés sociaux et de la santé publique, le respect de la liberté d'exercice et de l'indépendance professionnelle et morale des médecins est assuré conformément aux principes déontologiques fondamentaux que sont le libre choix, la liberté de prescription, le secret professionnel, le paiement direct des honoraires par le malade, la liberté d'installation... ». 

B-  JURISPRUDENCE

La jurisprudence (voir note [4]), tant judiciaire qu'administrative, renchérit encore sur ces dispositions en proclamant que le secret médical revêt un caractère général et absolu. La Cour de Cassation l'a affirmé la première, dès le XIX° siècle (1885 - arrêt Watelet) et surtout dans un arrêt de la chambre criminelle du 8 mai 1947 (Degraene) : «L'obligation du secret professionnel s'impose aux médecins comme un devoir de leur état. Elle est générale et absolue et il n'appartient à personne de les en affranchir».

Cette portée générale et absolue du secret médical est reconnue également, avec toutefois quelques nuances, dans les arrêts de la chambre civile de la Cour de Cassation, dans ceux du Conseil d'Etat (arrêt d'assemblée du 12 avril 1957 - Deve) et même dans les avis de la Section sociale du Conseil d'Etat (6 février 1951 - 2 juin 1953).

De ce caractère général et absolu du secret médical, les jurisprudences de ces deux cours souveraines tirent des conséquences importantes. Ainsi, il a été admis que :

  •  le patient ne peut délier le médecin de son obligation de secret ;
  •  cette obligation ne cesse pas après la mort du patient ;
  •  le secret s'impose même devant le juge ;
  •  le secret s'impose à l'égard d'autres médecins dès lors qu'ils ne concourent pas à un acte de soins ;
  •  le secret s'impose à l'égard de personnes elles-mêmes tenues au secret professionnel (agents des services fiscaux) ;
  •  le secret couvre non seulement l'état de santé du patient mais également son nom : le médecin ne peut faire connaître à des tiers le nom des personnes qui ont (eu) recours à ses services.

Il ne peut donc être dérogé au secret médical que par la loi. Cela explique l'annulation par le Conseil d'Etat de plusieurs décrets ou circulaires organisant des procédures portant atteinte au secret médical. Mais ces dérogations législatives peuvent ne pas être toujours formelles ou explicites. Une atteinte au secret médical peut être jugée légale si elle est la conséquence nécessaire d'une disposition législative (CE 8 février 1989 - Conseil national de l'Ordre des médecins et autres, req. n°54494).

C -  DEROGATIONS LEGALES

Elles sont justifiées par la nécessité d'établir une communication maîtrisée d'informations médicales (pour leur détail, voir annexe p.40). Seule une loi peut les instituer.

Le médecin est obligé :

  • de déclarer les naissances ;
  • de déclarer les décès ;
  • de déclarer au médecin de l’ARS les maladies contagieuses dont la liste est fixée par voie réglementaire.
  • d'indiquer le nom du patient et les symptômes présentés sur les certificats d’admission en soins psychiatriques ;
  • d'établir, pour les accidents du travail et les maladies professionnelles, des certificats détaillés décrivant les lésions et leurs conséquences ;
  •  de fournir, à leur demande, aux administrations concernées des renseignements concernant les dossiers des pensions militaires et civiles d’invalidité ou de retraite ;
  • de transmettre à la CRCI ou à l’expert qu’elle désigne, au fonds d’indemnisation, les documents qu’il détient sur les victimes d’un dommage (accidents médicaux, VIH, amiante…) ;
  • de communiquer à l’Institut de veille sanitaire les informations nécessaires à la sécurité, veille et alerte sanitaires.
  • de communiquer, lorsqu'il exerce dans un établissement de santé, au médecin responsable de l'information médicale, les données médicales nominatives nécessaires à l'évaluation de l'activité.

Le médecin est autorisé :

  • à signaler au procureur de la République (avec l'accord des victimes adultes) des sévices constatés dans son exercice et qui permettent de présumer de violences physiques, sexuelles ou psychiques ;
  • à transmettre au président du Conseil général toute information préoccupante sur un mineur en danger ou risquant de l’être (voir note [5]) ;
  • à communiquer les données à caractère personnel qu’il détient strictement nécessaires à l’exercice de leur mission, aux médecins conseils du service du contrôle médical, aux médecins inspecteurs de l’inspection générale des affaires sociales, aux médecins inspecteurs de la santé, aux médecins inspecteurs de l’ARS, aux médecins experts de la Haute Autorité de Santé, aux inspecteurs médecins de la radioprotection ;
  • à transmettre les données nominatives qu'il détient dans le cadre d'un traitement automatisé de données autorisé ;
  • à informer les autorités administratives du caractère dangereux des patients connus pour détenir une arme ou qui ont manifesté l’intention d’en acquérir une.

Ces dérogations légales prescrivent ou autorisent seulement une certaine révélation (maladie contagieuse désignée par un numéro, symptômes d'un état mental dangereux, etc.) et pas n'importe quelle indiscrétion, à n'importe qui, de n'importe quelle manière. Il faut s'en tenir à une information «nécessaire, pertinente et non excessive». L'obligation du secret demeure pour tout ce qui n'est pas expressément visé par le texte.

2- Le secret couvre tout ce qui est parvenu à la connaissance du médecin dans l'exercice de sa profession

Le texte du code pénal parle d'une «information à caractère secret» ce qui pourrait faire penser que le médecin n'a de secret à garder que lorsqu'il a reçu d'intimes confidences.

L’article L.1110-4 pour sa part précise : «  ce secret couvre l’ensemble des informations concernant la personne venues à la connaissance du professionnel de santé, … »

Le secret s’impose pour tout ce que le médecin a pu voir, entendre ou même deviner ou déduire. Même les constatations « négatives » doivent être tues. Il n’y a donc pas de différence entre le « renseignement administratif » (nom, adresse…) et « médical » (diagnostic, traitement…), entre la confidence et le renseignement « anodin ». On attend du médecin une discrétion totale (même sur ce qu’il peut avoir appris en dehors des soins qu’il donne).

Dans une décision du 24 septembre 2014 n°11888 de la chambre disciplinaire nationale, confirmée par le Conseil d’Etat (CE, 17/06/2015, n°385924), il a été jugé que le secret médical s’étend à toute information de caractère personnel confiée par un patient ou vue, entendue ou comprise par le praticien dans le cadre de son exercice.

Dès lors qu’un médecin reçoit des informations personnelles de caractère médical de la part d’une personne qui s’est adressée à lui en tant que médecin, même s’il n'est pas son médecin traitant (Au sens usuel du terme et non le médecin traitant mentionné à l'article L.162-5-3 du code de la sécurité sociale), celles-ci sont réputées avoir été données dans le cadre de l'exercice professionnel : « ni les relations amicales anciennes nouées par le passé entre Mme B… et le Dr C, ni les circonstances dans lesquelles il a été amené à recueillir ses confidences avant la consultation de son épouse dans leur cabinet médical commun, ne sont détachables de l’exercice de sa part de la profession médicale ; que, même s’il n’a procédé à aucun examen de la patiente et n’assurait pas son suivi médical comme médecin traitant, les faits qui lui ont été confiés lors de cet entretien étaient couverts par le secret professionnel et ne devaient, alors même qu’il ne justifiait d’aucune dérogation légale en la matière, être divulgués à un tiers ». En révélant ces informations à un tiers, le médecin a méconnu l'obligation de secret instituée par les dispositions des articles L. 1110-4 et R. 4127-4 du code de la santé publique.

Toute personne doit avoir la certitude absolue qu’elle peut, même après sa mort, se fier à la discrétion du médecin.

Ainsi le secret professionnel est la «pierre angulaire de la morale médicale» (voir note [6]).

3- Le secret professionnel est institué dans l'intérêt des patients

L'adjonction «institué dans l'intérêt des patients», voulue par le Conseil d'Etat, est importante. Elle coïncide avec une évolution de la jurisprudence et l'assouplissement dans certains cas de la doctrine traditionnelle du «secret absolu».

Le secret médical a été institué dans l'intérêt des patients, mais ce n'est pas sa seule raison d'être puisque, nous l'avons indiqué, il a un intérêt public. Il compte autant par sa virtualité que par son existence, il est fait pour les personnes malades présentes comme pour les personnes malades futures ou potentielles.

Rien n'autorise le médecin à livrer des renseignements hors des dérogations légales. Même entre médecins, la discrétion est de règle. La notion de «secret partagé» reste limitée aux membres de l'équipe soignante - qui doivent partager certaines informations pour assurer des soins corrects - dans l'intérêt du patient (expressément mentionné par l’article L.1110-4, al. 3 du code de la santé publique qui définit la notion de secret partagé) ainsi qu'aux médecins des régimes obligatoires de protection sociale (article 50).

Il ne s'agit pas là d'un réflexe corporatiste. La rigueur des dispositions actuellement en vigueur et le caractère impératif des règles déontologiques sont destinés à protéger le patient, non le médecin. Le respect du secret médical est un devoir du médecin et non un droit.

Faire tomber en désuétude cette conduite séculaire du médecin serait mépriser l'un des droits fondamentaux de l'homme : tous les patients doivent être assurés que leur confiance ne sera pas trahie lorsqu'ils livrent à leur médecin une information les concernant ou mettant en cause des tiers.

Les médecins sont confrontés à des sollicitations et situations diverses où ils doivent apprécier ce qu’ils peuvent dire ou au contraire, taire. Les plus courantes sont évoquées ci-dessous.

Il leur est recommandé s’ils sont embarrassés sur la réponse à apporter, de prendre conseil auprès des instances ordinales.

3-1. Secret, famille et entourage

Le secret s’impose vis à vis de la famille et de l’entourage, mais en cas de diagnostic ou de pronostic grave, il ne « s’oppose pas à ce que la famille, les proches, ou la personne de confiance définie à l’article L.1111-6 reçoivent les informations nécessaires destinées à leur permettre d’apporter un soutien direct à celle-ci, sauf opposition de sa part » (article L.1110-4, avant dernier alinéa du code de la santé publique).

De même après le décès : «  Le secret ne fait pas obstacle à ce que les informations concernant une personne décédée soient délivrées à ses ayants droit, dans la mesure où elles leur sont nécessaires pour leur permettre de connaître les causes de la mort, de défendre la mémoire du défunt, ou de faire valoir leurs droits, sauf volonté contraire exprimée par la personne avant son décès. » (article L.1110-4, dernier alinéa du code de la santé publique).

Seules les informations « nécessaires » peuvent être révélées dans l’un et l’autre cas (CE 26 septembre 2005, Conseil national de l’Ordre des médecins, req. n°270234). D’autre part, si les ayants droit ont accès au dossier d’une personne décédée, il faut que la demande soit explicitement motivée et que ce droit s’exerce dans une des trois intentions citées : connaître les causes de la mort, défendre la mémoire du défunt ou faire valoir des droits. Le patient, de son vivant, peut avoir fait opposition à cet accès. Sa volonté doit être respectée.

Le secret est également dû aux mineurs.

Les mineurs viennent souvent se confier aux médecins et, comme les adultes, ils ont droit au respect et à la discrétion. Il est important, surtout à l’adolescence, qu’un mineur puisse trouver en son médecin un confident qui n’ira pas révéler à ses parents les secrets qui lui sont confiés. Mais lorsque l’intérêt du mineur l’exige, ou qu’une décision importante est à prendre, le médecin doit tout faire pour le persuader de tenir ses parents au courant, en sachant garder le secret sur ce qu’il n’est pas nécessaire de révéler.

Cependant, en dérogation au principe très général de l’autorité parentale, le médecin est tenu au secret professionnel vis-à-vis des parents d’un mineur, qui s’oppose expressément à la consultation des titulaires de l’autorité parentale :

« Toutefois, le médecin doit dans un premier temps s’efforcer d’obtenir le consentement du mineur à cette consultation. Dans le cas où le mineur maintient son opposition, le médecin peut mettre en œuvre le traitement ou l’intervention. Dans ce cas, le mineur se fait accompagner d’une personne majeure de son choix. » (Article L.1111-5 du code de la santé publique)

L'infection due au VIH a provoqué une controverse quant au caractère intangible de la notion du secret professionnel. Elle est fondée sur le constat du conflit entre le droit des personnes infectées à la confidentialité et le droit de leurs partenaires d'être avertis du danger qui les menace directement.

Le Conseil national de l'Ordre des médecins (Bulletin de l'Ordre, décembre 1992) et la Commission de réflexion sur le secret professionnel (1994) ont formulé les recommandations suivantes :

  • dès lors qu'elle est faite à un proche ou à un tiers par la personne séropositive, mise en face de ses responsabilités, la révélation ne pose pas de problème juridique en matière de secret ;
  • lors de cette révélation au partenaire, par celui qui est séropositif, le médecin peut, selon la déontologie traditionnelle, assister à l'entretien à la demande des intéressés et leur donner les éclaircissements et conseils utiles en la circonstance ;
  • la loi n'autorise pas le médecin à révéler au partenaire du patient séropositif le danger que lui fait courir le comportement de ce dernier si celui-ci s'oppose obstinément à toute révélation ; il lui faudrait d'ailleurs une certaine naïveté pour prétendre connaître le ou les partenaires exposés.

La commission René (voir note [7]) sur le secret professionnel a conclu en ces termes :

«Aucune dérogation, implicite ou même explicite, n'autorise le médecin à rompre le silence qui s'impose à lui et les conditions d'application de la notion de non-assistance à personne en danger ne sont pas réunies. Il revient alors au praticien, après avoir tout fait pour convaincre le patient et son entourage, du danger que fait courir son état de santé, et, si possible, après avoir pris l'avis de confrères compétents, d'évaluer la situation et de prendre, en conscience, sa décision et d'assumer les conséquences d'une liberté qu'il revendique ; les juges apprécieront en fonction de ces cas d'espèces... Les dangers sont certains. Mais les conséquences de la révélation doivent être aussi lucidement mesurées. En présence de ce dilemme, et même avec l'aval de confrères expérimentés, c'est d'abord sa responsabilité personnelle, tant morale que juridique, qu'engage le médecin en prévenant lui-même le partenaire de son patient

3- 2. Secret, police et justice

a. Réquisitions

Pour rapporter la preuve d’une infraction ou l’implication de la personne poursuivie, les officiers de police judiciaire (OPJ) vont, sur autorisation et sous le contrôle du procureur de la République ou sur commission rogatoire du juge d’instruction, procéder à un certain nombre d’investigations. Ils peuvent alors requérir le concours des médecins.

Le terme « réquisition » et le caractère contraignant qu’il suppose est source de confusion pour les médecins. Schématiquement, on peut distinguer selon l’objet de la réquisition :

1/ S’il y a lieu de procéder à des constatations, examens techniques ou scientifiques–par exemple examen de garde à vue, prise de sang en vue de la vérification de l’alcoolémie,… - qui ne peuvent être différés, l’OPJ a recours à toute personne qualifiée (articles 60 et 77-1 du code de procédure pénale – voir notes [8] et [9]).

Sous peine d’amende (voir note [10]), le médecin est tenu de déférer à la réquisition. Il remet son rapport à l’autorité requérante.

Il peut néanmoins récuser son concours en cas d’inaptitude physique, technique ou lorsqu’il est le médecin traitant de la personne à examiner.

Pour éviter tout malentendu sur le secret médical, il doit prévenir la personne de la qualité en laquelle il l’examine et de la nature de sa mission.

Le certificat rédigé, après examen, ne doit faire état que des conclusions. Par exemple : « l’état de santé est compatible (ou non) avec la garde à vue ; il y a lieu (ou non) de poursuivre un traitement médical pendant celle-ci, de procéder à de nouveaux examens ou à une hospitalisation… »

2/ La réquisition a pour objet d’obtenir le témoignage du médecin sur des faits qu’il a connus dans son activité professionnelle : date de consultation, adresse du patient, objet de la consultation, nature des traitements,… et plus généralement ce qui a trait au patient pris en charge.

La réquisition n’a pas pour effet de délier le médecin de son obligation au secret professionnel et quelle que soit la nature du renseignement demandé (« administratif » ou purement médical), il ne peut que refuser de répondre à la réquisition.

Il n’encourt ce faisant aucune sanction.

3/ La réquisition a pour objet la remise de documents et listes. Depuis la loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice et la loi n°2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, le procureur de la République ou l’OPJ, sur autorisation de celui-ci (enquête préliminaire, article 77-1-1 du code de procédure pénale) ou sous son contrôle (enquête de flagrance article 60-1 du même code) « peut requérir de toute personne, de tout établissement ou organisme privé ou public, de toute administration qui sont susceptibles de détenir des documents intéressant l’enquête, y compris ceux issus d’un système informatique ou d’un traitement de données nominatives, de lui remettre ces documents, notamment sous forme numérique, sans que puisse lui être opposé, sans motif légitime, l’obligation au secret professionnel. Lorsque la réquisition concerne des personnes mentionnées aux articles 56-1 à 56-3 (avocat, journaliste, médecin), la remise des documents ne peut intervenir qu’avec leur accord. »

Ces articles font donc dépendre la remise de documents couverts par le secret médical de l’accord du médecin, ce qui apparaît incompatible avec la conception traditionnelle du secret professionnel général et absolu en matière médicale.

Les dispositions des articles 77-1-1 et 60-1 sont de plus en plus souvent invoquées par les OPJ pour obtenir sans saisie les documents détenus par les médecins.

Il faut conseiller aux médecins requis dans cette situation de refuser leur accord. Ce refus ne peut être sanctionné. La procédure de saisie sera alors mise en œuvre dans les conditions habituelles (présence d’un conseiller ordinal, mise sous scellés fermés des documents saisis) éventuellement opérée par le magistrat lui-même.

b. Saisies et perquisitions

Le code de procédure pénale prévoit que «le juge d'instruction procède conformément à la loi, à tous les actes d'information qu'il juge utiles à la manifestation de la vérité» (voir note [11]). Il peut procéder à la saisie d'objets ou de documents relatifs aux faits incriminés et «doit provoquer toutes mesures utiles pour que soit assuré le respect du secret professionnel et des droits de la défense».

Conformément à l’article 56–3 «les perquisitions dans le cabinet d'un médecin... sont effectuées par un magistrat et en présence de la personne responsable de l'Ordre... ou son représentant».

Il est admis lorsque la saisie du dossier a lieu sans perquisition que le magistrat qui l’ordonne (juge d’instruction, procureur de la République) mandate à cet effet un officier de police judiciaire. La présence du représentant ordinal reste obligatoire.

c. Témoignages en justice

Ce que le médecin a pu connaître à l'occasion des soins donnés ne peut lui être demandé en témoignage devant la justice. Interrogé ou cité comme témoin sur des faits connus de lui dans l'exercice de sa profession, il doit se présenter, prêter serment et refuser de témoigner en invoquant le secret professionnel.

L’accord ou la demande du patient ne saurait le délier du secret (voir note [12]).

En revanche, le médecin peut signaler et témoigner dans des affaires de sévices à mineurs (maltraitances, incestes, viols, attentats à la pudeur, etc.) ou personnes vulnérables qu’il a constatés.

Enfin, bien qu'il n'y soit pas tenu, un médecin peut estimer devoir témoigner en justice si son témoignage peut empêcher de condamner un innocent (article 434-11 du code pénal). Par ailleurs sa profession ne lui interdit pas de témoigner à titre de simple citoyen, indépendamment de tout élément recueilli au cours de son exercice professionnel

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