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Billet de blog 4 septembre 2025

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UE-Chine : jusqu’où ira le bras de fer commercial ?

À l’occasion du 25e sommet UE-Chine, tenu à Pékin le 24 juillet, la présidente de la Commission européenne a réaffirmé sa volonté de rééquilibrer la balance commerciale entre les deux puissances. Une orientation déjà à l’œuvre depuis 2022, en témoigne l’intensification des enquêtes antisubventions ouvertes à l’encontre d’entreprises chinoises.

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Alors que l’UE et la Chine fêtent le 50e anniversaire de leurs relations diplomatiques, le porte-parole du ministère des affaires étrangères chinois a rappelé que « depuis un demi-siècle (…) les échanges commerciaux annuels entre la Chine et l’UE sont montés en flèche, passant de 2,4 milliards de dollars à 785,8 milliards de dollars ». Des enjeux financiers devenus colossaux qui expliquent les tensions croissantes entre Bruxelles et Pékin.

Quand l’UE représente 14,5 % des exportations chinoises, la Chine ne représente que 8 % des exportations européennes. « Les relations commerciales actuelles restent très déséquilibrées, avec un déficit commercial en biens atteignant les 305 milliards d’euros », comme le constate Ursula von der Leyen. La présidente de la Commission européenne appelle ainsi à un rééquilibrage des relations commerciales en trois axes, dont la limitation de l’impact extérieur de la surcapacité chinoise. Et von der Leyen d’ajouter, « nous mettons en œuvre avec précaution une stratégie de réduction des risques ». 

Le Foreign Subsidies Regulation (FSR), règlement européen applicable depuis le 12 juillet 2023 - objet d’une procédure de révision juste lancée - s’inscrit précisément dans cette stratégie. Il vient combler un vide juridique en soumettant les investissements étrangers à des règles de transparence sur les subventions reçues dans le but de maintenir des conditions de concurrence équitables. Il couvre ainsi toutes les entreprises qui exercent une activité économique dans le marché intérieur, ce qui inclut les cas de concentrations, les procédures de passation de marchés publics et de concessions. Jusque-là, la réglementation ne couvrait que les importations de produits. Par ailleurs, la Commission peut désormais ouvrir des enquêtes dites ex officio, de sa propre initiative.

Une dizaine d’enquêtes a ainsi été ouverte à l’encontre de la Chine depuis 2022, dont certaines sur des secteurs stratégiques en lien avec la transition énergétique. C’est le cas de l’enquête sur les importations de véhicules électriques à batterie pour passagers, lancée en octobre 2023. En réponse, la Chine a lancé le 5 janvier 2024 une enquête antidumping sur les eaux-de-vie de vin européennes puis deux autres en juin et en août 2024 sur les produits porcins et les produits laitiers européens. L’enquête européenne s’est soldée en octobre 2024 par l’institution d’un droit compensateur définitif sur les importations de véhicules électriques chinois allant jusqu’à 35,3 %, l’enquête chinoise sur les eaux-de-vie de vin européennes par l’imposition de droits antidumping allant jusqu’à 34,9 % le 5 juillet 2025, sauf accords particuliers. 

Les vélos électriques originaires de Chine ont également été ciblés en janvier 2024, après que les précédentes mesures compensatrices imposés par l’UE aient expiré. Puis cela a été au tour des fournisseurs chinois d’éoliennes, en avril 2024, soupçonnés de bénéficier de subventions étrangères dans le cadre de projets de parcs éoliens dans plusieurs États européens. Et plus récemment, c’est le projet d’implantation d’une nouvelle usine en Hongrie du constructeur chinois de véhicules électriques BYD, qui a été visé en mars 2025, ainsi que le vitrage solaire en provenance de Chine, deux jours seulement avant la tenue du 25e sommet sinoeuropéen.

Dans ce contexte d’escalade des mesures de rétorsion économique, Pékin a rappelé à plusieurs reprises que sa politique de subventions industrielles se conformait strictement aux règles de l’OMC, notamment par l’intermédiaire de l’ambassadeur de Chine en France, à l’occasion d’une rencontre organisée par le Mouvement des entreprises de France (MEDEF) le 27 août. Les deux puissances ont toutefois réitéré leur engagement à préserver le multilatéralisme à l’occasion du 25e sommet bilatéral. Comme l’a souligné von der Leyen, « les 50 prochaines années des relations entre l’UE et la Chine dépendront des choix que nous faisons aujourd’hui », la question étant : combien de temps cette stratégie du coup pour coup va-t-elle durer — et à quel prix pour les industries des deux côtés ?

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