Alain,
Comme le remarque le Général X..., qui nous avait été si agréable à Washington, il faut se garder des risques évidents de partialité dans cette remémoration (Il s'agit du pas de clerc de Macron sur la colonisation). Or en effet, fils d’un Dunkerquois et d’une Lilloise j’ai néanmoins un « certain lien avec l’Algérie » : Être né à sa frontière, à Oujda au Maroc et y avoir vécu mes vingt premières années m’oblige à me méfier d’un inévitable parti-pris « pied-noir ».
Il n’est donc pas question de défendre la colonisation d’un point de vue moral, mais la conquête et la domination font partie de la nature humaine, comme chez de très nombreuses espèces vivantes. L’expansion nord-africaine de la France au XIXème siècle l’a amenée à entrer en conflit avec des populations rustiques, disons franchement féroces, guerrières et dont la vive intelligence se manifeste en plus dans une duplicité et une sournoiserie qu'incite un précepte religieux, la Tâki-ia.
Il faut tenir compte du relativisme historique. Et ainsi, sous des prétextes civilisateurs que tout le monde connaît, le gouvernement français de l’époque, lui-même cavilleux, a missionné pour la conquête de ce territoire un État-major d’anciens combattants des guerres napoléoniennes, rodés aux rudesses des combats. Souvent d’excellents stratèges, comme j’en faisais état pour Bugeaud ou Pelissier dans un récent billet de blog que je t’ai adressé, mais peu enclins à l’édulcoration de leurs pratiques. L'expérience saint-simonienne et plus "modérée" d'un Lamoricière en remplacement de Bugeaud, me semble-t-il avoir lu, avec comme conséquence le soulèvement immédiat de la Mitidja et la mort de centaines d'ouvriers agricoles espagnols et italiens, avait d'ailleurs prouvé la pertinence des manières "fortes"... et Bugeaud fut rappelé.
Les uns n’étant pas décidés à se laisser faire, les autres résolus à vaincre : cela a donc ouvert immédiatement la voie aux pires exactions de chaque camp.
Macron pour qui ma fille aînée va voter... vient de commettre un nouvel impair en politique étrangère peu relevé par la presse : en décrétant que Bachar El Assad était l’ennemi de son peuple. Non ! Nonobstant sa sauvagerie, il a pour lui une bonne partie de la population syrienne. Cette affirmation de Macron participe du même faux-pas que ses jugements hasardeux sur la colonisation algérienne : Ce jeune financier habile, « mercuriel », parle trop et trop vite dans un domaine bien connu du Général X, un domaine qui demande au contraire beaucoup de réflexion et souvent de silence. Au moins de la distanciation... et des mensonges fréquents et éhontés : la diplomatie.
Henry/Marius
Le Général X..., à qui a été communiqué ce mel, m’a directement répondu. Je ne peux faire état de son propos, car il demeure en activité de toute façon militaire et je crois diplomatique.
Je lui adresse ce retour obligé :
Merci Mon Général.
En effet beaucoup de jeunes maghrébins et français refusent d’aborder pour l’instant une période de l’Histoire commune encore trop récente à leur sens pour être l’objet d’une recension objective, ni surtout d’une historiographie qui serait inévitablement marquée d’aigreurs. De toute façon ces jeunes gens regardent l’avenir... et non le passé. Et ils ont raison.
Par exemple, ma fille aînée, manager dans une société d’audit, vient d’engager dans son équipe trois jeunes marocaines dont la bonne volonté, la disponibilité et l’intelligence l’épatent. Absorbées par le souci de réussite professionnelle. Et de leur libération d'un milieu éminemment sexiste.
Certes, j’ai trouvé le contraire à mon arrivée sur Mediapart et de quoi satisfaire mon goût de l’éristique. Auprès d’intellectuels d'origine lisiblement maghrébine, ou prétendus tels, qui ont leurs pénates sur ce site. Revanchards d’un colonialisme caricaturé, ils ont été surpris et outrés par mon irruption adventice. A cet égard, Monsieur Yves Bonnet, ancien Patron de la DST, ex-Président d’une Amicale Franco-Algérienne, homme vigilant sur les réalités historiques que je salue ici respectueusement, m’y fait parfois l’honneur de venir me lire, amusé d’une tonalité sans concession aux obséquiosités requises par ces vengeurs d'un fantasme entretenu. Une déférence à laquelle les avaient habitués ceux que nous, Pieds-Noirs, surnommons les « Patos ».
Très cordialement
HC