A ma grande fille, à mon aînée (33 ans), qui vient donc, sourcil haut, suveiller ici son vieux papa, ce gribouillage qui traine dans mes tiroirs. Et qui ne parle pas de politique... :
A St Jeannet...
Nous allions les chemins qui mènent au Baou
Parmi chênes et pins, roc fier baigné d’aurore.
La nuit pâle fuyait. Nous regardions là où
La mer, de mil reflets, touche aux cieux qu’elle honore.
Nous foulions l’asphodèle et la sauge et le thym
A la ronce cueillant l’inaccessible mûre
L’air était parcouru d’un étrange murmure
Des cris d’oiseaux perçaient ce frémissant matin…
Sa voix, écho céleste, y mêlait tant de rêve
Alors que nous marchions. Elle avait bien douze ans
Cet âge où l’on sait tout et l’exprime sans trêve.
Moi, je tenais sa main, répétant : « Viens-nous en !...»
Maintenant silencieux, mon cœur est une tombe
La mer, l’oiseau, le vent, le sévère rocher
Tout cela m’indiffère… Il est vain de chercher
Un bonheur envolé avec une colombe.
…Ô, mon enfant chérie, en quels bras t’endors-tu ?
Quand au bord du néant végète un sort hybride
Il doit en advenir de fantasmes qu’on bride
Comme de vils chevaux ou d’un désespoir tu.