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Bobonne est une inconditionnelle. Moi c’est rare, mais je m’y suis trouvé un jeudi soir où ce Alain Mabanckou était invité à la LGL de François Busnel. Le bonhomme était affublé d’une casquette incongrue alors qu’une exquise finesse d’esprit, un véritable talent dans l’humour et un discours étincelant suffisaient amplement à son personnage. Mais soit, et foin de cet « attribut » surperfétatoire : Je viens aujourd’hui contester une chronique dans laquelle Mabanckou désapprouve un groupe d’écrivains de langue anglaise. Six membres du jury d’un Pen World Voices Festival dont j’avoue n’avoir jamais entendu parler.
En substance, cette institution aurait décidé de remettre un prix à Charlie-Hebdo pour son « arrogance française ». Ceci, vous l'aurez deviné, contre l’avis des susdits écrivains.
Prenons acte que dans l’affaire Mabanckou préfère judicieusement impertinence ou insolence à arrogance... et cautionne donc dans la foulée la remise de ce prix. D'où la controverse : Titre d'un article de L'EXPRESS.fr
De leur côté les adversaires de cette distinction arguent qu’en l'acceptant la France ne respecterait pas "son devoir moral à l'égard d'une grande partie de sa population". Suggestion disconvenant à notre compatriote, qui pose alors cette question à laquelle je n’ai rien compris : « Quel est ce devoir moral qui serait au-dessus des percepts constitutionnels même si ceux-ci demanderaient à être appliqués dans la réalité quotidienne et devant toute forme d'injustice? »... ??
En tout état de cause je suis, moi, d’accord avec ces jurés : Je fais partie d’une multitude de pékins qui, suite à l’expédition meurtrière des frères Kouachi ne se sont absolument pas reconnus dans le « Je suis Charlie » parisianiste du 11 janvier. Un affiquet verbal que la presse française, gauchiste dans son ensemble, et donc aux ordres du gouvernement, s'est dépêchée d'impacter dans le logiciel commun d’une population finalement manipulable à souhait.
Car pour ma part je tenais feu les « humoristes » de ce torchon scatologique pour des obsédés. Leur follicule, nourricier du pilon que plus personne ne lisait, était tenu hors-d'eau depuis des lustres par les prébendes de l’État (Votre pognon, M'sieurs-Dames!). Possiblement étaient-ils des immatures demeurés au stade anal, assurément des inconscients qui ont cherché ce qu’ils ont trouvé, des floromagotins dans l’accoutrement frivole de ce m’as-tu-vu de Pelloux/ Cochise lors du grand raout politique du 11 janvier.
Mabanckou écrit par ailleurs : « Par conséquent, la libre expression fait partie de cette "impertinence française" véhiculée à travers sa culture et sa manière de percevoir le monde. En reprochant à la France cet attribut, on reprocherait presque au zèbre d'avoir des zébrures et à la tortue de porter sa carapace ».
Je ne suis pas un intellectuel et encore moins un « lettré » mais je prétends que si l’impertinence est nécessaire, elle a néanmoins sa limite aux prodromes de l'abjection, et se manifeste au contraire dans l’élégance de la satire ou de la parodie humaniste d’un génie rabelaisien, par exemple, pas dans des gribouillages minables, obscènes et roboratifs d'enculages en série, de trous du cul et de couilles pendantes. Pas plus que dans l’injure caricaturale et antireligieuse que des gens dignes du respect social ont le droit de considérer comme un sacrilège. Comme une atteinte à leurs convictions les plus intimes.
Pour continuer les comparaisons de Mr Mabanckou, je dirai que si la zébrure est en effet naturelle au zèbre comme sa carapace l'est à la tortue, Charlie-Hebdo est une verrue adventive sur le nez en l’air d’une très chimérique impertinence française. Un furoncle sur la liberté d'expression.
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