Le départ de Ráhel Orbán, la fille du Premier ministre hongrois, vers les États-Unis à la fin du mois d’août a d’abord semblé être une décision personnelle. Mais la presse hongroise a rapidement découvert qu’il s’agissait d’un projet minutieusement préparé.
Ráhel avait suivi un programme d'été à l’Université de Boston et a déjà reçu une confirmation d’admission dans un établissement américain — un processus engagé depuis au moins un an.
À Budapest, cette histoire a immédiatement pris une dimension politique. Comme le souligne HVG, la famille du Premier ministre se prépare visiblement à d'éventuels bouleversements liés aux élections de 2026 — les premières depuis longtemps à menacer réellement le système de Viktor Orbán, au pouvoir depuis près de quinze ans.
Tiborcz, moteur financier de l’entourage Orbán
La pièce centrale de ce puzzle est István Tiborcz, gendre d’Orbán et l’un des hommes les plus riches de Hongrie. Les enquêtes de Direkt36 le décrivent depuis des années comme la « tirelire d’Orbán », ses entreprises ayant bénéficié de contrats publics massifs dans l’énergie, les infrastructures et l’immobilier.
Selon HVG, Tiborcz a intensifié ces deux dernières années les transferts de capitaux vers l’étranger, les États-Unis étant sa destination privilégiée. Politico Europe note que les biens immobiliers achetés aux États-Unis au nom de Ráhel Orbán pourraient avoir été financés en partie via les structures liées à Tiborcz.
Ce déménagement apparaît ainsi bien plus comme une préparation financière en vue d’un éventuel changement de pouvoir que comme un simple choix éducatif.
En cas de victoire de l’opposition en 2026, de nombreuses enquêtes seraient ouvertes. Politico estime même qu’Orbán pourrait devenir le premier chef de gouvernement hongrois menacé de poursuites pénales après avoir quitté ses fonctions.
L’option africaine : la seconde voie de repli, au Tchad
En parallèle, Orbán construit une seconde ligne d’évacuation — cette fois en Afrique, centrée sur le Tchad. Depuis 2022, Budapest a signé plusieurs accords de coopération militaire avec N’Djamena. Reuters indiquait que le Tchad a autorisé la présence d’environ 200 soldats hongrois, qualifiant la Hongrie de « partenaire stratégique ».
Ce dossier est piloté par le fils du Premier ministre, Gáspár Orbán. Selon Der Spiegel, il se rend régulièrement au Tchad, entretient un accès direct au président Mahamat Idriss Déby et supervise des programmes présentés comme « humanitaires » mais servant de couverture aux intérêts familiaux.
Après le retrait des troupes françaises en 2024, le Tchad est devenu un espace d’influence croisée russo-hongroise. Le Monde affirme qu’un agent du FSB, Artyom Kireev, coordonne la partie russe, notamment l’accès à des ressources en uranium et certaines activités de renseignement.
Le Robert Lansing Institute estime pour sa part que la Hongrie cherche à bâtir au Sahel une infrastructure de renseignement parallèle, échappant au contrôle de l’UE et de l’OTAN.
Une stratégie de survie sur deux continents
Tout indique donc la mise en place d’une architecture de repli en deux volets :
— l’axe américain, avec la relocalisation de la famille et le transfert d’actifs ;
— l’axe africain, fondé sur les accords militaires au Tchad et la création d’une zone d’influence hors du champ européen.
Comme le résume Telex.hu, Orbán ne mise plus sur la stabilité de son propre régime : il s’organise déjà pour l’après. Et lorsque le système qu’il a bâti commencera à vaciller, les issues seront prêtes — l’une aux États-Unis, l’autre en Afrique.
D’après les informations du média porteedevue.fr