MarkoVidovic (avatar)

MarkoVidovic

Abonné·e de Mediapart

112 Billets

0 Édition

Billet de blog 19 mars 2025

MarkoVidovic (avatar)

MarkoVidovic

Abonné·e de Mediapart

Conversation téléphonique entre Trump et Poutine

Le 18 mars, un appel téléphonique a eu lieu entre le président américain Donald Trump et le dictateur russe Vladimir Poutine.

MarkoVidovic (avatar)

MarkoVidovic

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Le 18 mars, un appel téléphonique a eu lieu entre le président américain Donald Trump et le dictateur russe Vladimir Poutine. Cet échange, qui a duré une heure et demie, constitue le deuxième contact direct entre les deux dirigeants depuis le début du second mandat de Trump. Malgré des attentes élevées, les discussions n’ont pas abouti à une avancée significative : la Russie a en effet rejeté la proposition d’un cessez-le-feu total de 30 jours, à laquelle l’Ukraine avait précédemment consenti lors de négociations avec les États-Unis à Djeddah.

Principaux résultats des négociations

1. La Russie rejette la trêve de 30 jours

L’Ukraine avait accepté un cessez-le-feu de 30 jours, incluant une suspension des frappes sur les infrastructures énergétiques, à condition que la Russie soutienne cette initiative. Cependant, Poutine a refusé une trêve totale, posant des contre-conditions : l’arrêt des livraisons d’armes à l’Ukraine, la fin de la mobilisation et du soutien logistique occidental. Ainsi, la Russie continue d’utiliser des tactiques de pression et d’ultimatum, cherchant à affaiblir la capacité défensive de l’Ukraine.

2. Préparation de nouvelles offensives

Le refus de Moscou d’accepter la trêve s’accompagne de préparatifs pour de nouvelles opérations offensives dans les régions de Zaporijjia, Kharkiv et Soumy. L’armée russe intensifie ses attaques, recourant à des assauts massifs et augmentant la pression sur les positions défensives ukrainiennes. Ces actions démontrent clairement que le Kremlin entend atteindre ses objectifs par la force militaire, malgré les efforts diplomatiques des États-Unis.

3. La Russie tente d’imposer un "contrôle" de la trêve

Poutine a également exigé un "contrôle garanti du cessez-le-feu". En pratique, cela signifie une tentative de figer la ligne de front et de légitimer l’occupation des territoires capturés. De plus, sous prétexte de contrôler la trêve, le Kremlin pourrait exiger l’envoi d’observateurs internationaux "neutres", qui agiraient en réalité dans l’intérêt de Moscou.

4. Échange de prisonniers et geste de bonne volonté ?

Selon le Kremlin, un échange de prisonniers est prévu le 19 mars, avec 175 prisonniers de chaque côté, ainsi que la remise à l’Ukraine de 23 militaires grièvement blessés. Ce geste est présenté par la Russie comme une "marque de bonne volonté", mais dans le contexte des négociations, il semble plutôt être une tentative d’atténuer la pression internationale sans faire de concessions stratégiques.

Position des États-Unis et réaction de la Maison Blanche

La porte-parole de la Maison Blanche, Caroline Levitt, a déclaré sur le réseau social X que Trump et Poutine avaient discuté de la nécessité d’un cessez-le-feu et d’une paix durable. Selon elle, les dirigeants ont convenu d’entamer des négociations pour mettre fin aux combats en mer Noire et limiter les frappes sur les infrastructures critiques. Cependant, la question clé d’un cessez-le-feu complet reste sans réponse concrète.

Dans une déclaration sur Truth Social, Trump a qualifié les discussions de "très bonnes et productives", sans toutefois révéler de détails. Cela laisse place à diverses interprétations, allant de la préparation d’un véritable processus diplomatique à des accords secrets.

Réaction des dirigeants mondiaux

Le président français Emmanuel Macron et le chancelier allemand Olaf Scholz, commentant les résultats des négociations, ont déclaré que l’accord sur la cessation des frappes sur les infrastructures énergétiques n’était qu’un premier pas, mais qu’il ne remplaçait pas la nécessité d’un cessez-le-feu total. Scholz a également souligné qu’aucun accord ne pouvait être conclu sans tenir compte de la position de l’Ukraine.

Par ailleurs, Emmanuel Macron a conclu que la menace de guerre entre l’Europe et la Russie s’était accrue. Cette prise de conscience pousse Paris non seulement à renforcer ses forces armées, mais aussi à accroître son soutien à l’Ukraine, qui est un facteur clé de la sécurité européenne.

Macron a à plusieurs reprises appelé l’Europe à l’autonomie stratégique, insistant sur la nécessité de renforcer les capacités de défense et de réduire la dépendance vis-à-vis des États-Unis. Cependant, les circonstances actuelles exigent des mesures encore plus résolues en matière d’aide militaire à l’Ukraine. Paris comprend clairement que cesser de soutenir Kiev équivaudrait à une capitulation face au révisionnisme russe et ouvrirait la voie à une agression accrue de Moscou.

L’une des principales entraves à la paix reste l’exigence du Kremlin de mettre fin à l’aide militaire à l’Ukraine. Vladimir Poutine espère convaincre Washington de franchir ce pas en utilisant Trump et son éventuel retour à la Maison Blanche. Cependant, même si ce scénario se concrétisait, cela ne signifierait pas que l’Europe abandonnerait sa position. Au contraire, une telle pression ne ferait que renforcer la détermination européenne, car la menace russe est désormais fermement ancrée dans les esprits des élites politiques de l’UE.

De plus, Washington lui-même ne semble pas prêt à franchir ce pas. Abandonner l’Ukraine non seulement saperait la confiance des alliés des États-Unis, mais porterait également un coup sévère au complexe militaro-industriel américain, qui bénéficie de milliards de dollars grâce aux livraisons d’armes. Une telle capitulation aurait également des conséquences réputationnelles et politiques durables, tant pour Trump que pour le Parti républicain. Les États européens augmenteraient probablement leurs efforts pour fournir des armes à Kiev, conscients que l’Ukraine est leur dernière ligne de défense face à une éventuelle agression russe.

Le Kremlin, quant à lui, envisage sans aucun doute d’étendre son influence en Europe, notamment en tentant d’établir un corridor terrestre vers Kaliningrad, isolant ainsi les pays baltes, ou en déstabilisant la situation en Lettonie, Lituanie et Estonie. Pour Moscou, il ne s’agit pas seulement d’ambitions géopolitiques, mais aussi d’une tentative de détruire l’OTAN et de se venger de l’Occident pour sa défaite dans la Guerre froide. Ce scénario représente une opportunité que la Russie ne voudra pas laisser passer.

Macron semble bien conscient de ces risques. Sa déclaration selon laquelle la France et l’Europe doivent "s’armer pour éviter la guerre" témoigne de la gravité de ses intentions. Paris comprend que si l’Europe ne fait pas preuve de suffisamment de détermination maintenant, elle devra faire face à la menace russe sur son propre territoire dans un avenir proche.

Position ukrainienne : les lignes rouges

Le chef du comité des affaires étrangères de la Rada, Oleksandr Merezhko, a souligné dans une interview à la BBC trois conditions clés que l’Ukraine ne compromettra jamais :
- Intégrité territoriale : L’Ukraine ne consentira à aucune concession territoriale à la Russie.
- Politique étrangère indépendante : La Russie ne peut dicter les conditions d’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN ou à d’autres organisations internationales.
- Capacité de défense : Kiev n’acceptera aucune restriction affaiblissant son armée.

L’Ukraine avait précédemment proposé aux États-Unis un cessez-le-feu temporaire dans les airs et en mer, car ces zones sont plus faciles à contrôler. Cependant, la partie américaine insistait sur un cessez-le-feu total de 30 jours. La réunion en Arabie saoudite du 11 mars a permis de débloquer l’aide militaire à l’Ukraine, ce qui n’a manifestement pas plu au Kremlin.

L’appel entre Trump et Poutine n’a pas abouti à des accords concrets, mais a montré que la Russie continue de faire chanter l’Occident, espérant des concessions stratégiques. Poutine tente d’imposer des conditions de trêve favorables tout en intensifiant son agression militaire. L’Ukraine, quant à elle, soutenue par ses alliés, est prête à poursuivre la lutte.

Les négociations au Moyen-Orient pour une nouvelle trêve devraient commencer dans les prochains jours, mais leur succès dépendra en grande partie de la fermeté avec laquelle l’Occident soutiendra l’Ukraine.

Les prochaines semaines révéleront si l’appel entre Trump et Poutine marque le début d’un véritable processus diplomatique ou s’il s’agit d’un nouveau jeu géopolitique du Kremlin.

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.