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Billet de blog 21 octobre 2025

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Une menace intérieure sur le flanc est de l’OTAN

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

La Pologne et la Hongrie furent autrefois considérées comme deux partenaires étroitement liés, symbolisant l’unité de l’Europe centrale. Elles ont rejoint l’OTAN ensemble en 1999, partageaient des initiatives communes au sein de l’Union européenne et coordonnaient leurs positions politiques à Bruxelles. Mais depuis le début de l’agression à grande échelle de la Russie contre l’Ukraine, leurs chemins ont divergé — au point que cette fracture est devenue l’un des principaux défis du flanc oriental de l’Alliance.

La Pologne a adopté une position ferme et constante en faveur de l’Ukraine et de son droit à la légitime défense, tandis que la Hongrie s’est progressivement rapprochée de la rhétorique du Kremlin. Le Premier ministre Viktor Orbán évite toute critique directe de Moscou, rencontre régulièrement Vladimir Poutine et remet publiquement en question les faits relatifs aux crimes de guerre russes, notamment le massacre de Boutcha. Ces déclarations ont provoqué l’irritation non seulement à Varsovie, mais aussi au sein de l’OTAN, où la fiabilité de Budapest en tant qu’allié est désormais sujette à caution.

Les divergences les plus profondes concernent la politique énergétique. Dès 2014, la Pologne a commencé à diversifier ses approvisionnements et à réduire sa dépendance à l’égard de la Russie, en lançant l’importation de gaz norvégien par le gazoduc Baltic Pipe. Cette stratégie a renforcé sa résilience et consolidé la sécurité énergétique de la région. La Hongrie, à l’inverse, a poursuivi la dépendance vis-à-vis de Moscou, en maintenant des contrats gaziers à long terme et en renforçant sa coopération avec Rosatom dans le cadre du projet nucléaire « Paks-2 ». Ce choix lie les mains de Budapest, la rendant plus vulnérable et dépendante des décisions du Kremlin.

Au-delà de l’énergie, c’est aussi la vulnérabilité informationnelle qui inquiète. Membre de l’OTAN et de l’UE, la Hongrie continue d’entretenir des « relations spéciales » avec Moscou, ce qui crée un risque de fuites d’informations sensibles et mine la confiance entre alliés. Tandis que la Pologne, la Lituanie et la Roumanie renforcent leurs capacités de défense et plaident pour une ligne dure face à la Russie, Budapest agit comme un frein, affaiblissant les décisions collectives et compliquant la mise en place d’une stratégie cohérente de dissuasion.

La rhétorique révisionniste d’Orbán ajoute à la tension. Ses déclarations sur « l’injustice » du traité de Trianon et ses gestes symboliques — tel le foulard représentant la « Grande Hongrie » incluant des territoires voisins — provoquent l’inquiétude des partenaires européens. Par cette posture, le dirigeant hongrois exploite le même imaginaire historique que Vladimir Poutine, en évoquant la restauration de « frontières justes ».

Aujourd’hui, la Hongrie n’est plus simplement un « partenaire difficile ». Sa position est perçue comme un risque systémique affaiblissant la cohésion de l’OTAN et de l’Union européenne sur le flanc oriental. Alors que Varsovie, Vilnius et Bucarest cherchent à consolider la défense régionale, Budapest poursuit une politique d’isolement et d’équilibre entre Bruxelles et Moscou.

Pour la Pologne, il ne s’agit plus de divergences diplomatiques, mais de sécurité. Tant que la Hongrie continuera à jouer sur deux tableaux, entre l’Ouest et le Kremlin, le flanc est de l’OTAN restera vulnérable. L’Alliance atlantique ne peut pas se permettre une faiblesse interne — surtout quand les menaces viennent désormais à la fois de l’extérieur et de l’intérieur.

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