APRES LES ROMS, LES AGRICULTEURS
Vous les avez vus à la TV ? Il y a Arfi, Ries, Mauduit et, bien sûr, Plénel. C’est passionnant. Lorsque Ries, par exemple, rencontre Clémentine et que, bouleversé, il ne trouve rien de mieux que de l’initier au maniement du dernier traitement de texte. Emouvant ! Et puis, c’est fou ce que sa maladresse nous rend séduisants, nous les spectateurs. Le titre de cette émission ? Vous l’aurez compris : « Le bonheur est dans la rédaction ».
Je me trompe ? Ah oui ? Vous dites ? « Le bonheur est dans le pré, pas dans la rédaction de Mediapart, tout de même ! Non mais… »
Mais quoi ? Quelle est au fond la différence entre les agriculteurs et les rédacteurs de Médiapart ?
Pour qu’un producteur imagine une émission telle que « le bonheur est dans le pré », il doit mettre en scène une catégorie sociale que le téléspectateur puisse se représenter comme extérieure à son monde, dévalorisée, pathétique, voire grotesque : On se tape sur les cuisses, non, en voyant les techniques de drague maladroites des bouseux. Cette chosification et cette mise en scène d’un problème réel (le célibat) qui affecte une catégorie sociale défavorisée, extérieure à une identité urbaine, nous renvoie à bien d’autres sinistres réalités. « Le bonheur est dans le pré », au fond, renoue avec la tradition des « villages nègres » qui faisaient le bonheur ( !) des expositions universelles, comme des prétendus reportages sur des population africaines permettant au quidam métropolitain de se rincer l’œil au spectacle de femmes à la poitrine dénudée. Au fond, les agriculteurs, comme le furent les nègres, les roms, les…relèvent d’une extériorité qui autorise la légitimité de la stigmatisation, du rire, voire même d’une compassion paternaliste. On ne peut pourtant parler de racisme. Etre agriculteur n’est pas une caractéristique raciale. On voit alors que la même catégorisation qui peut frapper un groupe « racial » peut aussi défigurer l’identité d’un groupe social, l’une n’excluant pas l’autre, bien sûr.
Mais alors revenons à nos amis rédacteurs de Médiapart. Pourquoi l’émission que je suggérais au début de cet article n’est-elle pas possible ? Vous l’aurez compris : Il existe une forme de consensus chez les lecteurs de ce site, pour considérer, avec des nuances, bien sûr, que ces rédacteurs sont des types « bien ». Il serait dès lors malséant, bien sûr, d’imaginer que des êtres d’une telle valeur puissent avoir des difficultés à nouer une vie amoureuse…Tout le contraire des agriculteurs, en somme…
Mettons maintenant du sable dans les rouages stigmatisants du « bonheur est dans le pré » : Vous l’aurez compris : Des agriculteurs sont abonnés à Mediapart ! Le monde à l’envers ! C’est sain, le monde à l’envers !