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Billet de blog 18 août 2025

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La République à genoux : la macronnie ou le pari perdu de 2017

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7 mai 2017. Paris. Louvre. Je suis toujours un jeune idiot. Face à moi, le moment tant attendu arrive. Emmanuel Macron, le Président de la République française, traverse la cour de ce palais devenu musée, au son de l’hymne à la joie. L’hymne européen. Je pense alors que l’avenir de la France est liée à un destin tant attendu depuis 1951 et la CECA, à un avenir semblant devenir européen. 14 août 2025, le bilan est édifiant. Ce que je pensais n’être que symbolique est devenu réel. Le Louvre est le palais des rois de France, et, tel est le visage d’Emmanuel Macron. Aujourd’hui, j’ai pris de la maturité, et, je me rends compte de la catastrophe qu’il vient de s’écouler ces huit dernières années. On a souvent, peut-être à tort, qualifié le Président de la République de Jupiter. Ce n’était pas à tort. Voilà maintenant huit ans que nous sommes gouvernés par un Président autoritaire, n’écoutant personne, pas mêmes les institutions qui ont fondé notre République en 1958. Les scandales sont outrageants, et, l’actualité nous le rappelle.

Je ne vais pas détailler tout ce qui a été mauvais durant la macronnie. Je pense que vous, chers lecteurs, le savez déjà. Mais, il y’a trois faits majeurs qui prouvent l’échec de cette gouvernance : l’autoritarisme (I), le mépris social (II), et les risques emportés par l’avenir au regard de ces deux mandats (III).

            Le premier point sur lequel je souhaite revenir, et, je pense que vous l’avez deviné, est l’affaire Benalla[1]. Comment un Président de la République, en exercice, soutenu par le suffrage universel de la majorité des Français, a-t-il pu délibérément laisser le responsable de sa sécurité porter un casque de scooter afin de faire sa propre loi, dans la rue, en « cognant des manifestants », cela même soutenu par le Président. Chers amis, sommes-nous revenus au temps de Charles Pasqua ? Je ne pense pas, notre République a bien évolué. Mais, en faisant ça, Emmanuel Macron, nous replonge dans le passé, là, où les Présidents de la République gouvernaient seuls, par des moyens illégaux. Notre République est fondée sur sa devise, sur la conception d’un ordre social où nul n’est plus puissant qu’un autre, où nul ne peut s’arroger le droit de gouverner à la place d’un autre, selon l’article 3 de la Constitution du 4 octobre 1958. Emmanuel Macron serait-il donc plus puissant que la Constitution ? Je ne peux pas le croire, cela remettrait en cause tout ce qui a été accompli précédemment dans la fondation d’un État soumis au droit. Ce serait remettre en cause notre pacte républicain. Car, oui, nous sommes une République, gouvernée par des lois, des concepts et des modes de fonctionnement qui visent à garantir la liberté, l’égalité, la fraternité. Nous avons été choqués de voir un Président de la République mettre un casque et enfourcher son scooter en plein Paris pour aller voir sa maîtresse. Mais, chers amis, l’affaire Benalla est bien pire. Au nom de quoi un traître à la République a-t-il estimé qu’il était en droit de faire sa propre loi ? De violenter des manifestants ? De violer la Constitution et de supplanter les forces de l’ordre dans la gestion d’un mouvement légitime ? Je parle bien entendu de ce que l’on a qualifié de Gilets jaunes. À cet égard, le mouvement des Gilets jaunes n’est pas simplement un cri de colère. Il représente la voix du peuple, notre voix, et celle de tous les Français en colère, qui n’arrivaient plus à remplir leur plein. Ce mouvement était nécessaire, mais, à quoi a-t-il abouti ? À la consultation des maires par le Président, ce fameux Grand débat national, mais, comme je l’ai déjà dit, ce Président-là n’écoute rien ni personne. Le mouvement des Gilets jaunes représente ce que théorisait Locke[2], à savoir le droit inaliénable du peuple à se révolter lorsque la tyrannie l’emporte, mais, peu importe, le Président de la République n’en a eu que faire. Chers amis, je pense que je n’ai pas besoin de m’attarder sur ce sujet, je sais que vous avez compris.

            Je souhaite à présent attirer votre attention sur les dernières mesures annoncées par le Gouvernement de ce cher Monsieur Bayrou[3]. Et pour tout vous dire, je suis effaré, d’abord par l’opportunisme politique de l’ancien Garde des sceaux, mais surtout par ce qu’il propose. Mais, peuple de France, ne croyez pas que ces mesures sont l’œuvre du Premier ministre, qui n’est qu’un simple exécutant. C’est la voix du Président de la République qui résonne. D’abord, la suppression de deux jours fériés. C’est une honte quant à l’héritage que nous devons porter, quant à nos valeurs et quant à la République elle-même. Un jour férié n’est pas seulement un jour non-travaillé, c’est un jour de joie, afin de célébrer des choses qui nous sont chères et qui fondent notre singularité à travers le monde. Supprimer le lundi de Pâques ? Pourquoi pas, après tout nous sommes dans un État laïque. Mais cela est immoral. Car, en effet, le lundi de Pâques n’est pas la célébration de telle ou telle fête religieuse, mais un moment de passer du bon temps en famille, entouré de ceux qui vous sont le plus cher. Et, ce cher Monsieur Bayrou veut le supprimer ? Je n’ai pas besoin de m’étendre plus à cet égard. Mais ce qui doit nous choquer à nous, aux 68 millions de Français, c’est la remise en question du 8 mai. Ces gouvernants ne savent pas ce que célèbre le 8 mai ? Où sont-ils juste inconscients ? Ce que je refuse de croire. Le 8 mai est la célébration de la victoire des forces Alliées en Europe sur les régimes totalitaires qui constituaient les forces de l’Axe. Sommes-nous toujours en train de parler de la victoire de la liberté sur le plus grand tyran de tous les temps ? Oui. Le 8 mai, c’est la victoire contre le IIIème Reich, contre Hitler, lequel est à l’origine de la mort de 50 voire 60 millions de personnes, de la Shoah par balle, des camps de concentration, des camps d’extermination, des expériences odieuses du pseudo-docteur Mengele à Auschwitz, des tortures du Boucher de Lyon, de la collaboration de Vichy, de l’institutionnalisation de l’extermination à échelle industrielle et de la mort de 7 millions de personnes entièrement innocentes, mais coupables de leur simple origine, de leur orientation sexuelle ou encore de leurs problèmes de santé. Mes chers amis, comprenez bien là l’immondice de cette proposition. C’est odieux, insensé et cruel. Mais, au final, pourquoi diable devons-nous supprimer des jours fériés ? La clé d’une économie qui fonctionne, d’une dette et d’un déficit public soutenable, c’est la productivité et surtout une meilleure répartition du temps de travail. C’est là que les gouvernants doivent trouver leurs économies, et non en privant le peuple français de ses jours de repos. D’autant plus que ces mêmes gouvernants bafouent les traités européens alors mêmes qu’ils s’en servent d’arguments pour nous imposer une rigueur absolue et des politiques contraires aux intérêts de tous les Français. Mais, l’immondice ne s’arrête pas là : ce cher Monsieur Bayrou demande aux citoyens atteints de maladies de « consommer moins de médicaments » et de « moins se faire soigner »[4] Chers amis, sommes-nous devenus fous ? Je ne pense pas. Que ce cher Premier ministre aille faire un tour dans les services d’oncologie, de cardiologie, de neurochirurgie, de psychiatrie ou encore d’hématologie. Comment peut-on décemment demander aux personnes malades de faire des efforts et de consommer moins de médicaments ? Il en va de leur vie ! Monsieur le Premier ministre je m’adresse à vous : comment osez-vous ? comment osez-vous ? Pensez-vous que les malades ont choisi d’être malade ? Mesurez-vous la portée et la symbolique de vos propos ? Vous devriez avoir honte, oui, honte, déjà d’avoir proposé ça aux Français, mais surtout d’y avoir pensé. Et parallèlement à cela, Emmanuel Macron a osé augmenter le budget de l’Élysée de 8 millions en 2023[5]. Chers amis, voyez-là l’indécence de ces propositions mises en lien avec les dépenses démesurées de Monsieur Macron. 

            Et, pour finir, je tiens à souligner les dangers que font courir ce type de gouvernance à l’avenir politique français. Nous sommes à deux doigts de tomber aux mains de l’extrême droite. Peut-être avez-vous perçu l’inégibilité de Marine Le Pen[6] comme une délivrance. Mais, ne vous y trompez pas, ceci est encore plus dangereux. Et pour cause, Marine Le Pen n’aurait jamais été élue, tout simplement du fait de son nom de famille, un nom de famille lié à l’extrémisme le plus total, aux actes odieux de son père durant la guerre d’Algérie et à ses déclarations remettant en cause l’existence des chambres à gaz. Mais là n’est pas le sujet. Monsieur Bardella se présente maintenant comme une alternative plausible à la macronnie, à la gouvernance des partis traditionnels en proposant des idées simples mais efficaces dont on connaît la rengaine : priorité aux Français. Mais, la France n’est pas un pays comme l’Allemagne où prévaut le droit du sang. La France est un pays de droit du sol et du plébiscite de tous les jours[7]. La France est la patrie des Droits de l’homme et de la femme. Or, la gouvernance qui prévaut en France depuis ce fameux 7 mai 2017 a affirmé la légitimité des partis d’extrême droite à s’exprimer au nom du peuple, ce qui est la définition du populisme : faire entendre au peuple ce qu’il veut entendre afin de maximiser ses rétributions politiques. Mais, l’extrême droite c’est l’intolérance, la précarisation et la ruine économique. C’est donc face à ça qu’il nous faut désormais lutter. Et pour cause, ni la macronnie ni l’extrême droite ne peuvent assurer une gouvernance favorisant les intérêts du peuple français entendu au sens le plus inclusif. En 2027 s’opposeront donc la macronnie et l’extrême droite, laquelle peut prendre le pouvoir ! Quel candidat pour la macronnie ? Édouard Philippe, à l’origine des Gilets jaunes, Gabriel Attal, resté silencieux sur les incendies qui ont frappé l’Aude ces derniers jours tout simplement car c’est parce qu’il a lui-même refusé une dépense publique pour l’achat de deux canadairs supplémentaires, ou encore Elisabeth Borne qui prône l’austérité mais qui n’est elle-même pas capable de respecter les lois les plus élémentaires comme de ne pas vapoter dans les lieux publics dont la sacrée Assemblée Nationale ? Aucun des trois ne peut assurer le bien-être du peuple. Jordan Bardella le peut-il ? Non, plus jamais ça. Plus jamais ça. Faut-il également oublier le fait qu’Emmanuel Macron a nommé un Premier ministre de droite alors que la gauche a largement remporté les élections législatives anticipées de juin 2024[8] ? Je ne pense pas. Personne n’avait jamais osé faire ça sous la cinquième République. Et dans tout ce brouhaha des législatives anticipées de 2024, face à la victoire de l’extrême droite au premier tour, la Gauche s’est unifiée, et elle le peut encore à l’approche des élections présidentielles de 2027. En ce qui concerne Monsieur Macron, la seule sortie louable serait d’organiser un référendum afin de savoir si le peuple le désire toujours en tant que chef de l’État, comme l’a fait le général de Gaulle en 1969, et qui, après la victoire du non, a démissionné.

Peuple de France, là est notre seul espoir de faire face à la mise en place soit d’un État failli soit d’un État voyou. Allons ! Debout ! Je sais que vous entendrez mon message. Aux urnes ! Pour la République ! Pour la France !

[1] https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2019/02/11/la-chronologie-complete-pour-comprendre-les-affaires-benalla

[2] J. Locke, Essai sur le gouvernement civil, 1690

[3] https://www.lemonde.fr/politique/article/2025/08/10/suppression-de-deux-jours-feries-il-faut-bien-que-ce-travail-supplementaire-soit-realise-martele-francois-bayrou-dans-un-courrier-aux-partenaires-sociaux

[4] https://www.lepoint.fr/politique/soins-medicaments-arrets-maladie-ce-que-bayrou-veut-couper-dans-la-sante-15-07-2025 ; https://www.revuepharma.fr/2025/07/doublement-du-plafond-des-franchises-medicales-reforme-des-ald-les-annonces-de-francois-bayrou-pour-le-budget-2026

[5] https://www.economiematin.fr/elysee-budget-macron-cour-des-comptes

[6] https://www.justice-en-ligne.be/Justice-et-politique-ce-que-revele

[7] E. Renan, Qu’est-ce qu’une Nation ?, discours prononcé à la Sorbonne en 1882.

[8] https://fr.wikipedia.org/wiki/Élections_législatives_françaises_de_2024

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