Martine Chantecaille
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Billet de blog 29 août 2012

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Non-cumul : faire ce que nous avons décidé, un point c’est tout!

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Dans son discours de clôture de l’Université d’été du Parti Socialiste, Martine Aubry a rappelé que la question du non-cumul du mandat deparlementaire avec un autre mandat exécutif avait été tranchée par un vote militant sans appel et devait donc s’appliquer, comme prévu par ce vote, dès septembre et cela sans attendre la loi qui imposera à tous les partis cette avancée démocratique que nous aurons impulsée de manière exemplaire. Elle vient ainsi d’écrire une lettre aux parlementaires pour leur rappeler la nécessité de tenir leur engagement et de respecter notre décision commune (http://www.parti-socialiste.fr/articles/non-cumul-la-lettre-de-martine-aubry). 

Martine Aubry a pleinement raison de faire preuve de détermination sur ce sujet (et de la détermination…il en faut comme le savent toutes celles et tous ceux qui plaident pour ce changement depuis longtemps !). Rappelons ici quelques arguments de fond qui montrent que le cumul est une pratique pathogène et le non-cumul une avancée démocratique nécessaire.

-Le non-cumul des mandats (en nombre et dans le temps) c’est d’abord une des clefs décisives pour que la démocratie représentative évite un « malaise dans la représentation » dû à son manque de « représentativité ». Moins de cumuls, c’est plus d’élus différents, plus de citoyens impliqués. C’est un moyen institutionnel de lutte contre une conception trop passive du rôle des citoyens, majoritairement cantonnés à la désignation de représentants quasi – professionnels entrant dans la « carrière » sans jamais en sortir. Le non-cumul contribue donc à la mise en place du renouvellement générationnel, de la diversité et bien sûr de la parité et, nous le savons, nous sommes encore vraiment perfectibles de ce point de vue là !

-Le don d’ubiquité ne faisant pas partie de la valise parlementaire, le cumul des mandats est générateur d’absentéisme. Dans une étude récente[1], Laurent bach l’a démontré :  » la participation aux séances publiques et aux commissions parlementaires serait pour l’ensemble de l’Assemblée supérieure d’au moins un quart si tous les députés se comportaient comme ceux qui aujourd’hui n’ont pas de mandat local et ne cherchent pas à en obtenir « .

-Quant au fameux lien avec le « terrain » qui rendrait indispensable le cumul, il demanderait ( si ce principe était juste) en fait encore plus de cumuls ! Ainsi, selon cette logique, un-e député-e devrait être maire de toutes les communes et conseiller-e général-e de tous les cantons de sa circonscription afin de ne privilégier aucun de ces « terrains locaux » et de ne manquer à aucun d’entre eux. Certains « terrains » risquent donc de pâtir de la pratique du cumul et, notamment, celui sur lequel les parlementaires devraient jouer : celui de  la Nation car là encore l’étude de L.Bach le montre très clairement : la pratique du cumul « renforce le désintérêt pour les questions liées à la nation plutôt qu’à la circonscription et entretient la confusion des genres entre les différents niveaux d’adminstration« . Et puis, rappelons aussi que le cumul n’est pas une pratique universelle : les parlementaires d’autres pays qui ne cumulent pas ne sont pas pour autant coupés du réel et du terrain, ayant même plus de temps pour s’y consacrer ! Travailler avec les autres élus est nécessaire, cela ne signifie pas se substituer à eux.

- Enfin, le non-cumul rend plus crédible la parole des élus en empêchant le soupçon si dangereux en démocratie d’une instrumentalisation des mandats à des fins personnelles et carriéristes. C’est  une avancée démocratique majeure pour une pratique en phase avec nos valeurs que les militants socialistes ont décidé collectivement de mener. Nous sommes des « partageux » a rappelé Emmanuel Maurel dans son discours de clôture dimanche dernier : n’est-il pas alors logique pour nous, socialistes, qui prônons le partage du travail et des richesses de nous opposer au « cumuler plus » des mandats ? Par la mise en oeuvre exemplaire du non-cumul, nous crédibilisons notre parole et plus généralement la parole politique.

Cette crédibilité -si nécessaire- serait, bien évidemment, remise en question si, par des contorsions sophistiques diverses, ce que nous avons voté venait à ne pas être respecté. Cet écart entre le « dire » et le « faire », la « promesse » et l’ »acte » ne concerne pas seulement les parlementaires qui « oublieraient » l’engagement qu’ils ont eux-mêmes signé : c’est la parole collective des socialistes pour la rénovation démocratique qui serait ainsi méprisée.

Pour toutes ces raisons, Martine Aubry a eu raison de rappeler que le non-cumul c’est maintenant : elle a à ses côtés les militants et de nombreux parlementaires qui, comme Claude Dilain ( http://claudedilain.blogspot.fr/2012/07/appel-aux-parlementaires-pour-le.html), considèrent aussi que les promesses engagent aussi ceux qui les font et pas seulement ceux qui les croient.


[1] Laurent Bach, Faut-il abolir le cumul des mandats ? Editions Rue d’Ulm/Presses de l’Ecole  normale supérieure,2012

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