Le rapport de cette commission d'enquête est téléchargeable gratuitement à partir de la page :
https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/dossiers/manquements_ase_protection2
Vers le bas de la page, cliquer sur "Voir les documents liés (2)".
Je publie ici quelques citations de ce rapport, avec le numéro de la page. Les personnes intéressées par un point en particulier pourront ainsi facilement retrouver le paragraphe en question. Ceci est le troisième post à ce sujet. Les informations à propos de l'affaire de Chateauroux proviennent de France 3.
Début page 242
Les AEMO renforcées et intensives ont été consacrées en droit par la loi Taquet. Elles constituent un progrès notable. Elles consistent à attribuer à l’éducateur référent un nombre de situations beaucoup plus restreint que dans le cadre d’une AEMO classique, afin de permettre plusieurs visites par semaine. Mais elles sont peu développées. Si cette mesure est déjà déployée dans certains ressorts (Nantes, Saint-Étienne), elle n’est qu’en cours de mise en œuvre dans d’autres (Thionville, Troyes) voire inexistante (Nice).
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Clarifier et renforcer les modalités d’intervention de la protection de l’enfance en dehors du placement : un changement culturel nécessaire
Il n’existe aucune norme d’intervention ni de cadre de référence établi sur le contenu et la fréquence des interventions à domicile.
Dans la lignée des recommandations formulées par la Défenseure des droits dans sa décision-cadre, la rapporteure appelle de ses vœux l’élaboration d’un référentiel national portant sur le contenu des mesures d’intervention à domicile.
Il serait opportun d’instaurer un nombre maximal de mesures suivies par chaque professionnel en milieu ouvert. Ce référentiel doit globalement permettre de favoriser des mesures d’intervention à domicile plus intenses et donc plus efficaces :
- Les AEMO renforcées doivent être encouragées, ce qui exige d’y consacrer les moyens financiers appropriés ;
- Les AEMO simples doivent être reconsidérées : en l’état actuel, elles sont dans la grande majorité des cas inutiles et relèvent donc un mauvais usage de l’argent public ;
- L’ensemble de la palette des actions possibles doit être mobilisé, en fonction des besoins identifiés. Il convient d’encourager davantage le recours aux aides à la gestion du budget et de développer l’intervention des TISF, qui peuvent permettre un accompagnement à la fois précoce et soutenu.
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- instaurer un nombre maximal de mesures suivies par chaque professionnel en milieu ouvert ;
- développer les AEMO renforcées et supprimer les AEMO simples dans leur forme actuelle ;
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Mettre en place des mesures à domicile plus efficaces exige également une révision des pratiques professionnelles, en favorisant le dialogue avec les familles et en valorisant les compétences parentales.
Il est possible d’avoir des parents tout à fait conciliants dont les enfants se trouvent néanmoins dans des situations de danger en raison de négligences graves. […] La nécessité de se centrer sur l’enfant ne doit pas nous faire oublier ce que vivent les parents. Si nous négligeons cet aspect, nous risquons de passer à côté des besoins impératifs des enfants.
En 2021, les établissements de l’Aide sociale à l’enfance (ASE) comptaient 63 100 emplois en équivalent temps pleins (ETP), soit 79 ETP pour 100 places d’accueil, contre 89 % en 2012 et 85 % en 2017. Cette perte de 10 points de pourcentage en moins de dix ans est un indicateur de l’aggravation de la situation, mettant en péril la qualité de l’accompagnement des enfants protégés.
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L’aide sociale à l’enfance se caractérise par une absence de normes d’encadrement qu’il est aujourd’hui urgent de pallier.
Il n’existe aucune règle minimale d’encadrement des enfants de la protection de l’enfance, qu’il s’agisse du nombre de personnes par enfant ou de leur niveau minimal de qualification. Cette situation juridique contraste avec les règles applicables pour l’accueil périscolaire, l’accueil de jeunes enfants ou l’accueil collectif de mineurs, laissant de nouveau entendre que les enfants de la protection de l’enfance font l’objet d’un traitement différencié et moins-disant.
Le droit français paraît en ce sens en contradiction avec l’article 3 de la Convention internationale des droits de l’enfant, selon lequel « les États parties veillent à ce que le fonctionnement des institutions, services et établissements qui ont la charge des enfants et assurent leur protection soit conforme aux normes fixées par les autorités compétentes, particulièrement dans le domaine de la sécurité et de la santé et en ce qui concerne le nombre et la compétence de leur personnel ainsi que l’existence d’un contrôle approprié ».
Cette absence de règle rend aujourd’hui légale des situations pourtant très préjudiciables pour les enfants et pour les professionnels et renforce les inégalités de traitement entre les territoires.
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Les éducateurs de nuit ont été progressivement remplacés par des veilleurs de nuit, moins qualifiés.
En matière de protection de l’enfance, rien ne pourra s’améliorer tant que les enfants ne dormiront pas bien la nuit. Tant que les enfants ne se sentiront pas en sécurité, ils ne pourront pas suffisamment dormir pour bien grandir et aller à l’école. Or le moment de la nuit, où il se passe des choses parfois terribles, a, pour des motifs peut-être économiques, été désinvesti du champ éducatif.
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Il n’est pas admissible que les enfants de l’aide sociale à l’enfance soient les seuls pour l’accueil desquels aucune norme d’encadrement n’est prévue.
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La rapporteure tient (...) )à insister sur l’importance de prévoir la présence de personnels compétents la nuit.
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un décret transitoire devait être pris afin de préciser les conditions dans lesquelles une personne mineure ou âgée de moins de vingt et un ans pouvait être accueillie, pour une durée ne pouvant excéder deux mois, dans des structures hôtelières, des structures d’hébergement jeunesse et sport ou des structures relevant du régime de la déclaration.
Le décret transitoire n’est jamais paru. Dans le même temps, des drames sont survenus, comme l’illustre le tragique suicide de la jeune Lily dans une chambre d’hôtel le 25 janvier 2024.
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(Suite de la page 252) L’accueil à l’hôtel était restreint aux enfants de plus de seize ans. En revanche, l’accueil dans les structures dites jeunesse et sport et structures relevant du régime de déclaration restait autorisé sans condition d’âge ;
Une surveillance de nuit comme de jour était prévue, avec la présence d’au moins un adulte formé à cet effet.
L’absence de parution de ce décret est extrêmement regrettable.
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Il semble que, si le droit interdit aujourd’hui le placement à l’hôtel, certains acteurs détournent les procédures en jouant notamment sur le flou existant autour de la notion de structures relevant du régime de déclaration. En outre, de nombreux départements « assument » de continuer de placer des jeunes à l’hôtel illégalement, comme certains présidents de département l’ont indiqué devant la commission d’enquête.
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La Défenseure des droits a dressé un constat sévère du manque de contrôles effectués dans les lieux d’accueil en protection de l’enfance : « Le contrôle des établissements et des services sociaux, des assistants familiaux, des lieux de vie et d’accueil autorisés est encore beaucoup trop lacunaire. Les procédures obligatoires de remontée des événements indésirables et des événements indésirables graves n’existent pas toujours ou sont mal connues, peu maîtrisées et n’associent pas forcément les préfets.
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Il existe des obligations de signalement des événements et incidents graves au préfet, tant pour les établissements d’accueil que pour le département.
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Un paradoxe ressort de cet état du droit : c’est avant tout le département qui est chargé de contrôler son propre service public de l’ASE, se retrouvant à la fois en position de contrôleur et de payeur, ce qui n’offre pas les meilleures garanties d’indépendance. Mme Nathalie Lequeux, juriste au pôle « Droits de l’enfant » du Défenseur des droits, a rappelé que le préfet permet un regard plus neutre. Le problème, à son sens, est surtout que « le rapport de force entre contrôleur et contrôlé puisse être inversé ; en d’autres termes, que le contrôleur ait tellement besoin de la structure contrôlée qu’il ne peut pas la fermer ».
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Le nombre de contrôles menés par les autorités n’a, aujourd’hui, pas de quoi inquiéter les établissements défaillants.
Un premier contrôle est réalisé au moment de l’agrément, qui est ensuite délivré pour cinq ans. Un nouveau contrôle intervient à l’issue de cette période mais, ensuite, l’agrément est acquis à vie.
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À l’insuffisance du nombre de contrôles s’ajoute l’enjeu de leur qualité. Les contrôles sont organisés à la suite d’alertes émises sur une structure d’accueil plutôt que de manière inopinée. Or les contrôles inopinés empêchent de dissimuler certains dysfonctionnements et permettent de mieux voir la structure d’accueil telle qu’elle fonctionne au quotidien.
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Dans le cas de l’affaire dite « de Châteauroux », le rapport de l’inspection générale des services du département du Nord, que la rapporteure a obtenu grâce à son contrôle sur pièces, relève l’absence de centralisation des remontées d’incidents intervenant au sein des accueils en protection de l’enfance. Cela a conduit le département à ne pas intervenir suffisamment rapidement, alors que certains faits graves avaient pourtant fait l’objet de plusieurs déclarations d’incidents auprès de ses services.
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Au titre des sanctions administratives, le département dispose d’un pouvoir d’injonction sous astreinte, du pouvoir de prononcer des sanctions financières, de nommer un administrateur provisoire ou, si les mesures précédentes n’ont pas permis de remédier à la situation, de suspendre ou interdire les activités de l’établissement. Cette suspension ou interdiction d’activité peut être prononcée par le préfet en cas de carence du département. Le département peut également suspendre en urgence l’activité d’un établissement, service ou lieu de vie durant six mois maximum ;
Au titre des sanctions pénales, l’accueil d’enfants ou de jeunes de l’ASE sans disposer de l’autorisation nécessaire est passible de trois mois d’emprisonnement et de 3 750 euros d’amende (5).
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(A propos de l'affaire de Chateauroux)
Le département du Nord a placé des enfants dans des structures non autorisées par le CASF. Deux associations se sont ainsi succédé, gérées par les mêmes personnes, organisant des séjours « de rupture » à la ferme, sur de longues durées. Le rapport souligne qu’un certain nombre d’éléments les concernant « peuvent faire penser au fonctionnement d’un lieu de vie non autorisé ».
Le rapport de l’IGS relève des « manœuvres destinées à capter la clientèle » de la part des gérants de ces deux associations. Leur forte disponibilité explique leur « notoriété » au sein des services de l’ASE du Nord, confrontés à une saturation de leurs dispositifs d’accueil.
Des contrôles très basiques auraient pourtant permis d’alerter les services : ainsi, en recherchant certains de ces lieux d’accueil sur Google Maps, il était possible de se rendre compte qu’ils ne correspondaient pas à ce que l’on est en droit d’attendre d’un séjour « à la ferme ». L’IGS cite le cas d’un lieu composé d’un pavillon individuel avec piscine et terrain de tennis ou d’un autre correspondant à un champ, remplacé ensuite par une zone d’activité commerciale.
Hors rapport : Ce qu'est l'affaire de Chateauroux d'après France 3 (affaire).
https://france3-regions.franceinfo.fr/centre-val-de-loire/indre/chateauroux/enfants-places-illegalement-victimes-de-violences-l-article-a-lire-pour-comprendre-le-proces-qui-s-ouvre-ce-14-octobre-3044874.html
Enfants placés illégalement, victimes de violences
Le procès de 19 personnes ayant accueilli sans agrément une soixantaine d'enfants placés débute le 14 octobre 2024 au tribunal correctionnel de Châteauroux. Le procès de 19 personnes ayant accueilli sans agrément une soixantaine d'enfants placés débute ce 14 octobre au tribunal correctionnel de Châteauroux.
Brutalisations, humiliations, travail forcé : 19 personnes sont jugées pour avoir accueilli illégalement des enfants placés par l'Aide sociale à l'enfance du Nord. Sur le banc des prévenus, 19 personnes. De 2010 à 2017, elles auraient accueilli, sans agrément, une soixantaine de mineurs, placés par l'Aide sociale à l'enfance (ASE) du Nord chez deux habitants de l'Indre.
Qu'est-ce qui est reproché aux accusés ?
Une récente enquête de la cellule investigation de Radio France révèle, témoignage à l'appui, ce qui est reproché à ces 19 prévenus. Pendant sept ans, de 210 à 2017, une soixantaine d'enfants a été placée par l'ASE du Nord auprès de deux habitants de l'Indre, jouant le rôle de tête de réseau. Ces derniers s'occupaient d'accueillir les mineurs, et d'en répartir certains chez des proches, des membres de leur famille et des amis.
Ces "familles d'accueil", sans aucun agrément, se trouvaient dans l'Indre, la Creuse et la Haute-Vienne. Pour certaines d'entre elles, un agrément antérieur avait été révoqué après des faits d'agressions sexuelles sur mineur. De son côté, l'ASE versait des indemnités au duo berrichon pour chaque enfant accueilli, jusqu'à 630 000 euros dont pas un centime n'aurait été déclaré au fisc.
Dans quelles conditions les mineurs ont-ils été accueillis ?
Sur les soixante jeunes, la plupart sont devenus adultes, et il a été difficile pour les enquêteurs de tous les retrouver. Alors que vingt victimes ont été identifiées, moins d'une dizaine sera représentée pour l'instant. "On a mis énormément de temps à retrouver cinq victimes", témoigne Me Myriam Guedj Benayoun, avocate de 7 parties civiles. Beaucoup sont SDF, ou en prison, ou complétement traumatisées. L'une d'entre elles n'est pas sortie de chez elle depuis trois ans et refuse de se faire représenter.
C'est pourtant leur témoignage qui a permis de mettre en lumière les conditions intolérables dans lesquelles elles auraient été accueillies.
Cette vingtaine de personnes témoigne en effet avoir subi diverses violences, principalement de la part des deux têtes de réseau. "Il y a eu des violences morales et physiques", affirme Romane Brisard, journaliste de la cellule investigation de Radio France.
Des témoignages de coups de poing, de coups de pied. Des traces de strangulation. Des humiliations. On urinait sur certains de ces enfants, on leur mettait la tête dans les WC.
Certains enfants auraient également été victimes de surdosages volontaires de médicaments, notamment des anxiolytiques, neuroleptiques et autres antidépresseurs, pour les calmer chimiquement. Selon l'enquête, ces produits ont été acquis avec la complicité de médecins ne les ayant jamais examinés.
Enfin, certains mineurs ont aussi été amenés à réaliser des travaux "qu'on peut qualifier de forcés", explique Romane Brisard. Plusieurs ont ainsi été "utilisés pour rénover la maison d'une des personnes de ce groupe de familles d'accueil illégal", maison située dans l'Indre.
Quelle responsabilité de l'ASE ?
Grande absente du procès, l'ASE du Nord ne sera pas sur le banc des accusés. Tout en étant, pour beaucoup, responsable. "Qu'est-ce qu'ils ont fait ? Rien, s'exclame Me Jean Sannier, avocat d'une partie civile, auprès de France 3 Hauts-de-France. "Ils n'ont vérifié ni l'agrément, ni même le casier judiciaire. Ils ne se sont pas inquiétés non plus des conditions dans lesquelles les enfants étaient accueillis, et ils ne les ont pas crus quand ils rapportaient les violences".
Les référents de l'ASE "étaient parfaitement au courant" de ce que vivaient les jeunes, affirme pour sa part Me Alban Briziou, avocat de Bruno C., l'un des prévenus.
Il y a eu des signalements : les enfants se sont plaints auprès des référents, mais les référents ont fait des mots à leur hiérarchie en disant que les méthodes pédagogiques portaient leur fruits, qu'il n'y avait pas de raison d'aller plus loin ni de faire un signalement au procureur.
L'affaire a révélé une vérité cruelle : celle d'enfances brisées, aux mains d'adultes cupides, maltraitants, ou tout simplement impuissants à les protéger.
Hors rapport : Ce qu'est l'affaire de Chateauroux d'après France 3 (verdict).
https://france3-regions.franceinfo.fr/centre-val-de-loire/indre/chateauroux/proces-de-chateauroux-jusqu-a-6-ans-de-prison-pour-les-chefs-du-reseau-de-familles-d-accueil-sans-agrement-3078763.html
Procès de Châteauroux : jusqu'à 6 ans de prison pour les chefs du réseau de familles d'accueil sans agrément
Entre 2010 et 2017, une soixantaine d'enfants placés par l'ASE du Nord dans un réseau de familles d'accueil sans agrément rapporte des faits de violences multiples et de travaux dissimulés. Les deux hommes à la tête du réseau ont été reconnus coupables et condamnés à 6 ans de prison pour l'un et 4 ans pour l'autre.
Le tribunal correctionnel de Châteauroux vient de livrer son jugement dans l'affaire des enfants placés dans des familles d'accueil sans agrément par l'Aide Sociale à l'Enfance (ASE) du Nord. Les enfants avaient été confiés à des familles de l'Indre, de la Creuse et de la Haute-Vienne.
Deux mois après une semaine de procès éprouvante pour revenir sur du travail dissimulé ainsi que de nombreuses violences infligées aux enfants, le verdict est tombé. Des peines diverses ont été prononcées, visant particulièrement Julien M. et Bruno C., considérés comme les cerveaux de l'opération.
Les prévenus reconnus coupables
Les réquisitions de la procureure de la République de Châteauroux, Amélie Trochet, étaient lourdes, tout comme les faits reprochés. Si les avocats des prévenus remettaient en cause la parole des enfants et dénonçaient des "réquisitions disproportionnées", la magistrate a été entendue. Julien M., considéré comme à la tête d'un réseau plaçant des enfants dans des familles d'accueil et auteur de multiples faits de violence, se voit condamné à la plus lourde peine : 6 ans de prison avec mandat de dépôt différé et 20 000 euros d'amende. Son ex-compagne écope de 12 mois de prison avec sursis.
Sans aucune formation, Julien M. avait réussi à récupérer l'agrément de ses parents, Antoine et Colette, qui "savaient", selon Amélie Trochet. La mère a "délibérément violé la réglementation", et "a mis des enfants en danger en parfaite connaissance". Antoine, le père, est lui reconnu coupable de nombreuses violences envers les enfants. Le couple est condamné à 10 mois de prison et 20 000 euros d'amende pour la mère et 12 mois de prison et 10 000 euros pour le père.
À l'encontre du bras droit de Julien M., Bruno C., déjà condamné pour des faits viols répétés sur sa fille, sept ans de prison étaient également requis. Il est aussi reconnu coupable et doit purger une peine de 4 ans de prison et 5000 euros d'amende. De leurs côtés, les familles qui accueillaient les enfants dans l'Indre, la Creuse et la Haute-Vienne sans agrément sont sanctionnés à des amendes de 3000 euros, et relaxées du chef d'exécution en bande organisée de travail dissimulé.
Violences et travaux forcés
De 2010 à 2017, une soixantaine d'enfants ont été confiés illégalement par l'ASE du Nord à une structure d'accueil située dans l'Indre, qui ne disposait pas de l'agrément nécessaire. À la tête de celle-ci, Julien M., qui assure avoir récupéré l'agrément de sa mère, Colette.
Selon la procureure, Amélie Trochet, "la dignité humaine, [Julien M.], il s'en fichait pas mal", dénonçant des motivations uniquement "financières": "accueillir toujours plus de mineurs, dans les moindres recoins". S'il dénonce un complot, il reconnaît un "appât du gain". La structure faisant office de lien entre l'ASE du Nord et les familles d'accueil a reçu 640 000 euros d'argent public, non déclarés.
Les enfants étaient accueillis dans des conditions parfois déplorables, certains logeaient dans une caravane sans eau, ni électricité. À cela s'ajoute les faits de violence. L'affaire est révélée quand, en 2017, Matthias, un enfant dont s'occupe Julien M., refuse de retourner dans sa famille d'accueil après avoir été hospitalisé. Un signalement au parquet est alors fait et l'enquête démarre.
À la barre, Mathias raconte une soirée particulièrement traumatisante. Confronté à ce récit, Julien M. nie d'abord avant de déclarer : "Si je lui ai uriné dessus, je ne m’en souviens pas. Je m’excuse. C’est inhumain."
De nombreux autres enfants évoquent des coups, des strangulations, des gifles, des menaces à l'arme blanche. Julien M., de son côté, parle de "recadrages". Nombreuses victimes, âgées à l'époque de 12, 14 ou 16 ans, ont également rapporté des "travaux forcés", "déscolarisées" pour s'atteler à des travaux de rénovation.
Dans ce procès horrifique, l'ASE du Nord, pourtant au cœur des débats, a brillé par son absence. Ni la structure, ni ses responsables n'ont été poursuivis. "Nous pouvons placer le projecteur sur l'aide sociale et ses dysfonctionnements", avait concédé la substitut du procureur. Mais "ce n'est pas l'ASE qui a, je reprends les mots de la procédure, 'pissé sur Matthias'".
Note perso, parce que cette affaire me met vraiment en rage:
C'est non seulement la faute de l'ASE, mais également la faute des juges pour enfants qui ont prononcé ou renouvelé ces placements. Les parents de ces pauvres enfants étaient-ils réellement pires que ces deux ordures esclavagistes? Comment ces juges peuvent-ils encore parler d' "intérêt supérieur de l'enfant" et prétendre les "mettre en sécurité" en les plaçant?