Ils en ont assez qu'on les prenne pour des pièces décoratives ou qu'on les tourne en dérision. Elle, c'est Ling Lenzi de LR, lui c'est Damien Bidal, du MODEM. Ils m'ont demandé si les "opposants" pouvaient figurer dans ces portraits. Mes portraits mettent de côté la haine et la méchanceté. Cela fait bien longtemps que je pense l'humain en dehors de ce type de classement gauche-droite. D'ailleurs qui a oublié que Laval fut maire d'Aubervilliers? Issu de la gauche Laval. La gauche se situerait du côté du coeur. Je pense, que certaines catégorisations sont utiles au pouvoir qui préfère enfermer que réfléchir.
Ils ont été élus, mais n'appartiennent pas à la majorité. Du coup, ils n'ont pas les mêmes avantages. Se garer par exemple, pour eux est payant - même si on leur fait une réduction. Ce qui peut relever d'un détail, ne n'est pas tant que cela. Ils ont été élus eux aussi et représentent dès lors une partie des citoyens. Visiblement certains citoyens sont des citoyens de seconde zone.
Vieux réflexe aussi qui consiste à réduire l'égalité à l'identité. Au Conseil Municipal ou on pense comme la majorité, ou on se tait. "On se rit de nous" rajoute Ling. D'elle en particulier. Le féminisme municipal ne s'applique pas aux femmes qui ont opté pour le libéralisme. " Travailler à mon compte, c'est prendre le risque de ne pas finir le mois. Je travaille le recyclage. On peut être libérale et écologiste. Je ne suis pas trop une femme du discours. J'agis sans attendre quelque chose de l'Etat"
Une remarque me vient à l'esprit. Le libéralisme est multiple. Le libéralisme politique ne se confond pas avec l'ultra-libéralisme économique débridé. Le libéralisme pose la liberté de circulation comme prémisse. Il peut être toutefois autoritaire, afin de garantir les profits économiques et contrôler l'égoïsme individuel. C'était la position du philosophe Hobbes au XVIe siècle. Ce qui garantit le lien social selon Montesquieu, c'est le commerce, voyant dans le souci de l'intérêt propre, le moteur social. Le politique doit veiller au bon déroulement de ce dernier en veillant sur les débordements possibles de l'intérêt particulier. C'est le but de l'Etat que de veiller à la sûreté des citoyens. Pendant longtemps la querelle gauche-droite portait sur les questions de sécurité. L'Etat d'urgence semble avoir balayé cette opposition.
Ling et Damien se sentent exclus des décisions. Ils continuent pourtant de s'accrocher. A propos du budget, on ne les écoute pas. "Il faut un oeil comptable face à tous ces tableaux" explique Damien, formé à la vie politique par le désormais célèbre Jacques Lassalle, et ancien directeur de l'Etap Hôtel, rue de La Commune de Paris. A l'époque il louait une partie de ses chambres au service social pour accueillir des sans abris. "Pourquoi la ville n'investit-elle pas, au lieu de payer des loyers ?" me dit-il.
L'Etat aide Aubervilliers. Bien sûr il y a des contreparties. Mais la Maire n'en a que faire et Damien Bidal me montre sa Tribune qu'il prépare :
"Nous avons droit à quelques lignes, alors je les prends. Pas pour donner des chiffres - ça on n'a pas le droit- mais pour expliquer par exemple que l'engagement pris envers l'Etat de recevoir une aide moyennant réduction des frais de fonctionnement de la Mairie, ne sera pas tenu par la Maire."
Et de rajouter :
"Les pratiques staliniennes ont trouvé ici leur plein épanouissement. La Maire contrôle tout, secondée par son cabinet et Antony Daguet, bien formé par le Parti, et son travail pendant un temps au journal l'Humanité. Responsable aussi de la Fête de l'Humanité, il a acquis moult réflexes stratégiques. "
Ling est perplexe face aux subventions des associations, et s'interroge sur les deux équipes de foot, les deux équipes d'escrime. Le communisme elle connaît bien aussi, elle qui vient de Chine.
Comment peut-on être persan écrivait Montesquieu...