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C'est vrai qu'il boit. Il est le roi de la débrouille, lui l'ancien SDF, qui un soir me dit "Je sens la mort"
Il parle avec les esprits. Un jour, en train de se vider la vessie, il trouva un billet de 5 euros. C'est ma grand-mère, c'est ma grand mère! Merci mémé
Il me raconte sa vie, ses rêves, ses tristesses. Un homme ne doit pas pleurer. Mais voilà. Quand j'ai envie de pleurer, je pleure.
Il adore les chats. Me raconte Capucin, cette femelle au masculin, parce que personne ne pouvait empêcher sa soeur de lui donner ce nom.
Sa mère allait le récupérer au commissariat avec un plat de couscous. Partage avec tes camarades! Lui, il aurait bien aimé se faire tout petit, avec ses 2 mètres de haut. Elle le ramenait à la maison et là c'était une autre histoire.
Bouchlagem, c'est le moustachu. Et moi qui suis imberbe !
On l'a placé à la DDASS, en Suisse. On me disputait puis on me donnait du chocolat... Alors j'aimais bien être puni!
Deux ans dans la rue à tenter de survivre, dormant "dans son escalier" comme il dit. La douche, c'est une fois par semaine et pas question d'arriver en retard. Les vêtements à un endroit, avec le RSA comme revenus, il mangeait comme il pouvait. Sa force, c'était ses mots qu'il lançait à la cantonade, du haut de ses deux mètres, marchant dans la rue, le casque sur les oreilles, amoureux des chansons que sa mère écoutait.
Quand il parle, c'est une joute verbale. Qui arriverait à supporter ce flux verbal?
La vitesse des mots, un sens de l'improvisation... qui cache une vie impossible.
Les yeux vifs et séducteurs, il affiche un sourire édenté.
Il est fauché, mais un coeur l'habite.
Ce soir il lit ce texte.
L'oeil humide, il va préparer des pâtes façon "lui", le maghrébin, au coeur si lourd.