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Billet de blog 30 mai 2023

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Le principe de la responsabilité commune, mais différenciée

Le principe de la responsabilité commune, mais différenciée est un principe qui est revendiqué par les pays du Sud pour que dans la lutte contre le changement climatique, chaque pays prend sa part de responsabilité à la hauteur de l’intensité et de la durée de son empreinte carbone.

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Bien avant mais surtout depuis la publication du rapport de Jean Pisani-Ferry sur la transition climatique, la question qui est à la bouche de tout le monde est : qui va payer pour la transition et l’adaptation à la crise climatique ?

Comme pour les discussions entre les pays les plus pauvres et les pays les plus riches depuis plus de 30 ans, en France, les discussions vont aussi s’orienter vers le principe de la responsabilité commune, mais différenciée.

Bien que le rapport de Pisani-Ferry sur la transition climatique est riche d’informations, ce qui a concentrer les regards et les discussions c’est la recommandation de taxer les plus riches pour pouvoir avoir la flexibilité budgétaire publique pour financer la transition et l’adaptation. Solliciter le plus riches pour affronter la crise écologique n’est pas nouveau.

La conférence des Nations Unis sur l’Environnement et le Développement à Rio de Janeiro a formalisée en 1992 le principe de responsabilité commune mais différenciée. Ce principe revendiqué par les pays les plus pauvres exprime la responsabilité partagée de l’ensemble des pays du monde dans le combat pour affronter la crise climatique, mais cette responsabilité est différentiée du fait de responsabilités différentes dans la contribution à la crise climatique.

Le principe de responsabilité commune, mais différenciée a été soutenu par les pays les plus pauvre et particulièrement les iles qui sont menacées de disparaitre due à la montée des eaux du au conséquences de la crise climatique. Ce principe est supporté au nom de l’équité et justice et s’inscrit dans l’adage, pollueur payeur.

L’argument des pays les plus pauvres est imparable. Les pays les plus riches ont contribué de façon beaucoup plus large (en matière d’intensité d’émission de carbone) et depuis plus longtemps à la crise climatique. L’analyse de l’empreinte carbone par habitant dans différents pays nous donne une indication : Les États Unis d’Amérique ont une empreinte carbone de 15.52 tonnes de carbone en moyenne en 2016 et par tête alors que les habitant de la République Démocratique du Congo n’émettent que 0.08 tonnes en moyenne.

On peut voir que sur une année, la différence est majeure. Mais la différence est aussi sur l’intensité et le long terme. Dès la fin du 18eme siècle, la Grande Bretagne a accru ces émissions de carbone de façon dramatique avec la révolution industrielle et le développement des machines à vapeur qui fonctionnaient en brulant du charbon. La même chose ne peut pas être dîtes du Mali. Le cas de la Chine est intéressant. Alors que  en 2019, la Chine a émis le plus de carbone, comparée à tous les autres pays, atteignant plus de 10 milliards de tonnes pour toute la population, son empreinte carbone par habitant – 7.18 tonnes - est loin derrière celle des USA par exemple.

De surcroit, comparé aux USA, la Chine n’a pas toujours été à un niveau. Les émissions record de la Chine sont récentes car en 1990, la Chine émettait totalement deux fois moins que les USA. Autre point, alors que de nos jours, la Chine affiche les émissions les plus importantes, la plus grande partie de ces productions est consommée dans les pays qui ont historiquement une plus grande responsabilité des émissions de carbone.

Ces différentiels d’intensité et temporel expliquent le principe de responsabilité commune mais différenciée. En pratique, ces différentiels devraient se traduire par des efforts différents dépendants des pays, de leur émissions de carbone actuelle et de leur responsabilité historique. Deux piliers des accords de la Conférence des Partis à Paris - le transfert de technologie et l’aide financière vers les pays les plus pauvres – sont le reflets en pratique de ses efforts différents.

Cependant, et comme il a été montré à la Conférence des Parties à Glasgow en 2022, les pays riches ne remplissent pas leur promesse. L’aide financière et le transfert de technologie se sont à peine concrétiser. Les pays les plus riches ont à peine diminué leurs émissions de carbone. L’Europe est le groupe de pays qui a fait le plus d’effort, mais on est loin du compte.

À l’heure ou la crise écologique est de plus en plus visible – avec les feux et les sècheresses historiques, le débat sur le principe commun mais différentié s’invite tout naturellement dans les pays. Le rapport Pisani-Ferry qui suggère que les plus riches soient taxés pour financer la transition n’est simplement que le reflet de ce principe. La contribution quotidienne et historique des plus riches au changement climatique est bien plus grande que celle des plus pauvres dans nos sociétés.

Il est définitivement inadmissible que certain puissent voyager en jet privé alors que d’autres sont contraints du fait du cout des transport. 1% de la population qui voyage en avion émet 50% de l’ensemble des émissions globales de l’aviation. En 2019, 1 avion sur 10 décollant de France était un jet privé. La moitié de ses avions privés ont volé moins de 500 km. Les avions privés sont de 5 à 14 fois plus polluants que les avions commerciaux.

Mais la liste est beaucoup plus longue puisque le mode de vie des plus riches utilise plus de ressources naturelles car leurs maisons sont plus grandes, leurs piscines ont plus d’eau et leur sport utilisent plus d’espace. Ainsi, le golf, sport qui exige plus d’espace que le football, est un aussi un gros utilisateur d’eau, alors que son taux d’utilisation est moindre. En Juillet 2022, alors qu’il était interdit de remplir les piscines, les golfs ne devaient que réduire leur consommation.

Comme au niveau global, les enjeux de la crise climatique vont mener nos sociétés à repenser les moyens pour s’adapter à la crise, mais aussi à un système qui va de façon profonde repenser nos relations avec la nature, et avec les autres. Ces relations devront être plus justes et équitables. 

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