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Billet de blog 10 juin 2011

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Petite histoire de racisme ordinaire #1

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Joseph à 52 ans.

Il est né à Orléans de parents antillais, venus s'installer en métropole dans les années 50.

Sa femme, ses deux enfants et lui vivent « correctement sans plus » dans un pavillon similaire à tout ceux de sa rue, à St Jean de la Ruelle, banlieue orléanaise.

Nous sommes le 2 juin 2011.
Joseph sort sa voiture du garage, Il est 7H49 au tableau de bord.

Pour se rendre à son bureu, au centre ville, il quitte le chemin vicinal qui l'emmène à un rond-point, pour rejoindre la Nationale.

Deux policiers contemplent la ronde des voitures qui s'entrecroisent pour pénètrer le rond-point.

Joseph s'engage à son tour, lorsqu'un des « képis » lui fait signe de s'arrêter. Joseph s'exécute, vérifie qu'il ne gêne personne garé ainsi sur un des bas-côtés, ouvre la vitre de sa portière et salue poliment l'agent.

- « Contrôle de la police Frannnnnçaise ! » clame le policier en accentuant longuement, à la De Gaule, le mot « française »

Du tac au tac, Joseph réponds sur un ton identique :

- « Joseph Magdebourg, citoyen frannnnçais ! »

Le policier se redresse d'un air furieux et demande d'un ton sec :

- « Carte d'Identité, papiers du véhicule et permis de conduire ! »

Tranquillement, Joseph extrait de son portefeuille, les 3 documents demandés. Le policier les lui arrache presque des mains et les tends à son jeune collègue toujours planté derrière lui.

- « Vérifie-moi tout ça ! »

Il fait le tour de la voiture sans quitter Joseph des yeux, lançant de temps à autres des regards méprisants sur la vieille Clio rouge.

- Où allez-vous, là ?

- Au bureau... répond Joseph

- Ah oui, si tôt ? Et où ça ?

Durant une fraction de seconde, Joseph est tenté de répondre que "où ça" c'est là, à Orléans ; mais il se "calme intérieurement" comme il le raconte, et avec un air serein, rétorque au policier :

- Je travaille à l'Insee

- Ah bon...., comme ça vous travaillez à l'Insee, répond le policier crispé.

Joseph ré-ouvre calmement son portefeuille et sort sa carte de fonctionnaire, parée du bandeau bleu blanc rouge, et tout en répondant « oui monsieur l'agent », la présente au représentant de l'ordre.

Le policier change de visage, se redresse, et sans un mot étudie longuement la carte tendue par joseph, puis va rejoindre son jeune collègue dans la fourgonnette.

Il est 8h11, désormais.

Joseph attend.

Il pense qu'il sera en retard, que Bernard, son nouveau patron ne manquera pas de le lui faire remarquer, que le programme informatique sur lequel il travaille depuis maintenant 4 mois, prendra encore « un certain retard » ; que la réunion syndicale sur le déménagement de l'Insee à Strasbourg va lui « bouffer » l'autre moitié de la journée...

Mais il attend, patiemment, et sans colère le retour des « policiers français »

Les deux flics reviennent, rendent à Joseph ses documents, et lui signale, d'un ton ironique, que les feux clignotants sont faits « pour être utilisés ». Joseph comprend à demi-mot qu'ils n'ont rien trouvé à lui reprocher et qu'il peut repartir.

Fier et souriant, il arrive à 8H30 dans sonbureau. Bernard est trés en retard. La réunion est reportée à vendredi.Confortablement installé dans son fauteuil de bureau. Joseph regarde le ciel. avec un sourrire en coin.

"Jusque là, tout va bien …." pense-t-il en souriant.

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