On se réveille ce lundi matin 7 mars avec un appel de l’organisation Aegean Boat Report, basée en Norvège, à empêcher un autre refoulement au large de Lesbos. Au moins 31 personnes, dont de nombreux enfants, sont arrivées sur les plages de Skala Sikamineas, au Nord de l’île. A peine arrivées en Europe pour y chercher refuge, elles se sont immédiatement dispersées en petits groupes, de peur d’être arrêtées et renvoyées immédiatement en Turquie.

Ces personnes fuyant la guerre craignent de subir le même sort qu'un groupe de douze Palestiniens originaires de Gaza, qui ont été refoulés la semaine dernière depuis Samos.
Au matin du samedi 26 février, trois femmes, six hommes et trois enfants, sont arrivés à Samos. Ils ont immédiatement contacté des organisations humanitaires, dont Aegean Boat Report, mais la police les a trouvés plus vite. Aegean Boat Report, ayant perdu le contact avec eux, a pu joindre la police portuaire de Samos, qui lui a affirmé qu’aucune arrivée n’était à signaler. Le groupe s’est pourtant pris en photo à plusieurs endroits de l’île, afin de prouver sa présence sur place, entre autres devant une église et devant des panneaux de signalisation.
Quelque temps après leur arrivée à Samos, le groupe a été arrêté par des hommes en noir, qu’ils décrivent comme des « soldats », et qui leur ont pris leur argent et leurs téléphones, avant de les faire monter dans un van.

Le groupe a disparu. Ce n’est qu’après avoir été refoulé en Turquie qu’il a pu reprendre contact avec Aegean Boat Report et raconter ce qui s’était passé. Les douze personnes ont été retrouvées à Kusadasi, en Turquie, le 27 février vers 2 heures du matin. Elles avaient été placées sur un canot de sauvetage à la tombée de la nuit et avaient ramé avec leurs mains pour retrouver la terre ferme.

Elles affirment avoir été fouillées en plein air par la police grecque, qui aurait forcé hommes, femmes et enfants à se déshabiller entièrement. Puis, on les aurait forcés à entrer dans un véhicule qui les aurait emmenés dans une base militaire, où ils auraient attendu des heures, enfermés dans le van, sans rien à manger, ni pouvoir utiliser des toilettes. Enfin, on les aurait reconduits vers la mer, où les attendait un bateau. Vers midi, on les aurait fait embarquer sur un bateau des garde-côtes grecs, où ils auraient été à nouveau fouillés brutalement, frappés et menacés avec des armes. Ils devaient garder la tête au sol et étaient frappés s’ils tentaient de relever la tête. Ayant été dépouillés de leurs téléphones, ils n'ont pu contacter aucune organisation humanitaire pour dénoncer ce qui était en train de se passer.
Finalement, ils ont été poussés sur un canot de sauvetages et abandonnés en pleine mer, forcés de ramer avec leurs mains pour rejoindre les côtes turques.
A 13 heures 30, ce lundi 7 mars, le groupe arrivé ce matin à Lesbos est encore là, caché quelque part. Personne ne sait s’il sera refoulé lui aussi vers la Turquie ou enregistré en Grèce, si on permettra ou non à ces vingt-cinq enfants et à leurs parents de trouver refuge dans cette Europe qui semble depuis quelque temps si encline à accorder l’asile à ceux qui fuient la guerre.
Mise à jour: La moitié du groupe a été refoulée vers la Turquie lundi soir. 17 personnes, dont 8 enfants et une femme enceinte, ont été retrouvées dérivant au large de Çeşme par les garde-côtes turcs lundi 7 mars autour de 23h30. L'autre partie du groupe a été emmenée vers un camp provisoire du Nord de Lesbos, pour y être placée en quarantaine.
Pour un récit détaillé des événements: https://aegeanboatreport.com/2022/03/10/the-refugee-lottery/?fbclid=IwAR37NrYroKacsGwkJYd41OgbwWNpzfIYECiH61cHaiyl8KrR68iMsBtftoM