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Billet de blog 7 août 2024

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Handicap lourd et sous citoyenneté institutionnalisée

Il y a un peu plus d'un an j'envoyais une lettre à M. le Président de la république française dans laquelle je dressais l'état des lieux suivant. Témoignage sur les galères du handicap même en étant « du bon coté de la barrière » (pauvre vs riche).

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Il y a un peu plus d'un an j'envoyais une lettre à M. le Président de la république française dans laquelle je dressais l'état des lieux suivant.

Éducation handicapée

L'éducation pour commencer, étant né en 1986 j'ai observé quelques changements dans les discours politiques mais plus idéologiques que concrets. Début 90 le dogme est principalement de mettre les gens en situation de handicap lourd en écoles ou structure éducative spécialisées voire sans écoles dans la logique suivante "Ils sont voués à mourir jeunes, pourquoi payer des soins coûteux et une éducation non rentable?".

Fin de cette décennie on passe à  "Ils vivent (plus longtemps que prévu) , soyons charitable laissons les vivres même sans éducation mais avec les aides aux pauvres gens.". Idées politiquement jugées adéquates pour les jeunes adultes et les plus âgées mais il reste encore les enfants et adolescents. Ils n'auront qu'à faire avec les moyens de leurs familles d'où la notion de "bon coté d'une barrière".

Jusqu'à aujourd'hui l'affirmation "Mieux vaut riche et bien portant que pauvre et malade." reste d'actualité. On ne traite que peu des deux autres cas et leurs nuances (riche mais malade ou pauvre en bonne santé). Je ne peux que témoigner de mon cas (moyennement riche mais avec une maladie grave).

Avant la loi de 2005 et mes 20 ans mes parents et moi n'avons aucune aide de nulle part. Pendant ma vie parisienne je fais mon primaire à l'EREA J. Brel dans l'hôpital R. Poincaré puis commence mon collège dans la seule structure mélangeant à part égale personnes handicapées et valides T. Lautrec. L'initiative d'une telle structure ne s'est toujours pas répandue à ce jour alors que certaines grandes villes françaises pourraient la mettre en place et ainsi avoir une vrai inclusion de personnes à handicapés lourds. Tout en offrant également des établissements spécialisés pour les situations très complexe de handicaps psychiques notamment mais aussi cognitifs.

Maintenant à Lyon pour le lycée, je me retrouve dans une structure éducative spécialisée où la parité valides handicapés n'existe pas. L'enseignement y est celui de l'enseignement public mais le cadre est beaucoup plus protecteur ne préparant que peu à la vie "normale" post-baccalauréat. Ne touchant une prestation de compensation du handicap (PCH) qu'à mes 20 ans, j'intègre l'université pour devenir 11 ans plus tard et bien des histoires, titulaire d'un bac+5 (Master 2) développeur informatique spécialisé en jeux vidéo. Depuis 2018 je cherche un emploi en développement informatique pas uniquement en jeux vidéo.

Emploi discriminatoire

Cela nous mène à enchaîner avec l'emploi. D'après les lois en vigueur un stage en formation continue est obligatoire pour valider un diplôme d'étude supérieur. Une licence impose un minimum de 10 semaines de stages et un master 5 mois. Je ne traite pas de l'alternance car je ne connaît pas assez le sujet mais il semble tout aussi épineux. Les stages sont censés faire entrer dans le monde de l'emploi mais sont soumis à la concurrence et sans obligation de la part des entreprises. Obtenir ceux ci n'est pas aisé mais en plus les établissements publics n'ont aucune obligation vis à vis de leurs étudiants.

Pour plus de précisions ces établissements fournissent à un responsable de mission stage ou à un service d'orientation une liste d'où ont été pris les anciens étudiants et quelques recommandations pour les CV et lettres de motivation. Ces recommandations sont souvent les mêmes que celle de France Travail et on ne peut pas dire que l'uniformité fasse engager. En effet stage ou emploi les situations particulières sont malvenues mais bien entendu on évite les plantes pour discrimination, ça ferait tache.

L'astuce est simple en RH, refuser pour manque d'expérience comme tout le monde sauf un éventuellement retenu. Comment est choisie cette personne ? L'opacité des entreprises privées ne donne que des réponses de façade. L'énigmatique savoir être est un des principaux arguments. On imagine très bien qu'il faille certaines qualités humaines pour un poste donné mais on a tous les capacités de les acquérir plus ou moins bien. Cela mène à la conclusion qu'à l'instant T une personne les a mieux fait ressortir pas forcément que c'est la meilleure dans le temps. Il s'agit donc d'un pari qualifié d'investissement avec un risque minimum pour l'entreprise. Elles faussent l'équité en faisant un pari qu'elles seules peuvent gagner. On veut le gain maximal monétaire mais minimal humain pour cela on évite de prendre les meilleurs potentiels mais plutôt ce qui colle au reste de l'entreprise.

Pour faire une analogie sportive K. Mbappé ne jouera plus dans un club de popularité inférieur à celle du PSG avant la fin de sa carrière footballistique, même si un club tel que l'OM ou l'OL pourraient être intéressés (fictif). Mais de même PSG sera peu enclin à faire une offre pour M. Dupont (fictif) de troisième division française mais dont le potentiel n'est pas encore apparu et qui pourtant pourrait être encore meilleur que K. Mbappé. Au mieux un club prendra le risque mais les chances sont faibles. Il est bien plus probable qu'il soit condamné à la D3 jusqu'à la fin.

Le mot clé est risque. Les entreprises le veulent le plus proche de 0 possible donc des personnes sans grands espoirs ni grandes ambitions hors entreprise ni prétentions financières excessives. On en arrive au discours suivant déguisé "soyez dans le bon moule, de qualité supérieure mais pas trop à vos semblables alors peut-être vous évoluerez de poste. Quant à l'augmentation salariale éventuelle on verra en fonction de nos obligations mais peu de vos performance". Cela correspond à rechercher un comportement robotique sans réelle aspiration. Ainsi on assoit l'autorité des propriétaires des entreprises au détriment des compétences réelles. La France promeut une logique à l'américaine et ainsi les riches tels E. Musk, M. Zuckerberg etc. deviennent des génies en oubliant les employés qui ont fait leurs succès et échecs.

Dans cette logique pour me faire embaucher je devrais me tourner vers les grands groupes, les supposés génies industriels. Mais ils refusent évidemment. Il existe pourtant une loi de quotas de personnes handicapées en entreprises la loi des 6%. En s'y intéressant de plus près on trouve vite un problème : il n'y a aucune différence de gravité entre les handicaps. Pourtant toutes les administrations dispensent à qui de droit une carte d'invalidité avec un pourcentage estimé de gravité de 3 tranches possibles, de 0% à 20%, de 20% à 80% puis plus de 80% (mon cas). Pourquoi ne pas faire une équité avec ça ? Avec l'égalité, il est évident que les moins handicapés sont favorisés malgré eux et inversement.

Pourtant cette loi provient de la loi des 4% qui faisait cette différence entre handicaps par un système à ponts qui était probablement mal équilibré puisque l'on avait l'effet inverse ( à enquêter). Cette loi devenue des 6% contient un deuxième problème l'amende de non respect est fixe donc pas un problème pour les grands groupes et contournable facilement pour les plus petits en engageant directement une personne handicapée légère ou indirectement en se rattachant à une structure spécifique (ESAT, "entreprises adaptées" de la filière en général, etc.).

Ce qui semble raisonnable en revanche c'est que cette loi ne concerne que les entreprises d'au moins 20 employés. On peut saisir le défenseur des droits pour discrimination à l'embauche mais cela revient à un suicide de carrière. Les saisies n'étant pas anonymes votre nom aura tôt fait de circuler entre entreprises sur une blackliste qui évidemment n'existe pas officiellement. Tout ceci mène donc à dire deux choses "si je gagne, je ne peux que travailler pour mon oppresseur ou personne qui le connaisse." "sinon je ne pourrais travailler pour personne qui connaît cet oppresseur". Donc autant ne pas le faire.

Alors comment se vendre à une entreprise ? Dans le cadre du handicap les instances telles que France Travail diffusent l'information suivantes "Vous n'avez aucune obligation de mentionner vos handicaps pendant un processus de recrutement". Facile quand le handicap ne se voit pas ou n'a pas l'air impactant pour un poste. En l'occurrence "Cachez le" sans le dire, mais quand c'est impossible à cacher ? Obligé de le dire sinon on risque la situation "Ah! On vous a fait venir mais il y a des marches, désolé.". En plus certains d'entre nous demande à travailler à temps partiel, comme une maman par exemple à 80%.

Passons aux spécificités du secteur informatique section développement. Les chiffres généraux indiquent un secteur en plein boum et à la louche c'est vrai. Les offres dans le développement web ou en développement logiciel connecté aux web pullulent mais pas celles qui me concernent vraiment. Les logiciels non connectés ne sont plus produits et le secteur du jeux vidéo licencie beaucoup en ce moment. La solution pour moi serait de me former au web en plus, orientation que j'ai refusé pendant mes études. Je veux bien faire comme mes pairs une formation en interne mais il faut entrer pour ça. Bref peu de solutions restent possibles. Il reste vivre des allocations mais contrairement à certaines croyances, c'est vivre en dessous du seuil de pauvreté ou dilapider quand il y en a un tout ou partie de son héritage.

Une autre solution l'auto entreprise et les problèmes que cela comporte. Commençons par la question de trouver des clients. En développement informatique devenir éditeur de logiciel est coûteux et très risqué pour un seul individu, c'est littéralement réussir ou périr. La solution plus sure est de devenir prestataire de services mais les entreprises de services numérique (ESN) gardent pratiquement tout le vivier de clients jalousement. En jeux vidéo il n'y a pas de positionnement des ESN estimant ce domaine trop spécifique, non lucratif et probablement instable. Ce n'est pas pour autant une porte ouverte, loin de là.

Pour les petits studios il est souvent difficile de recruter un ou plusieurs salariés, donc un prestataire devra soit avoir beaucoup de clients mais plus de vie personnelle parce que un jeu peut se faire sur un rythme de 35h/semaine pendant 6 mois à plusieurs années mais pas 2 jeux ou plus sur la même période. 2 jeux vidéo développé pour 2 clients différents impliqueraient que chaque clients offre une moitié de salaire chacun et les charges pour que la prestation soit équilibrée financièrement. Il en faut un peu plus pour rendre la prestation viable. Qui plus est si un client paye mieux que l'autre le prestataire va logiquement privilégier celui-ci. Malheureusement vue les possibilités financières des petits studios pour une prestation viable il faudrait au moins 3 à 5 clients et même en recyclant des extraits de codes on serait entre 3 et 5 fois 25h/semaine (75 à 125 h/semaine).

Face à un tel constat on peut se demander comment une personne qui ne peut que faire 28h/semaine en ferait 75 ou plus par semaine ? Puis il est évident que le handicap entraîne un coût de vie plus élevé que la "normale " mais en travaillant moins impossible de gagner plus. On pourrait penser que les différentes solidarités d'un état dit développé puissent compenser l'intégralité de ce surcoût. Beaucoup de pistes sur le travail restent sans issues car même la fonction publique agit comme une entreprise privée malgré des obligations de résultats très différentes.

Santé agonisante

Si les demandes de temps partiel existent ce n'est pas par caprices des employés (fainéantise, amateurisme etc.), c'est pour raisons justifiées  (obligations familiales, santé etc.). Parlons donc de santé justement. Il y a 37ans un professeur en médecine exposait à mes parents un tableau très sombre : je ne devais pas dépasser l'âge des deux ans (raté). Comme toutes les personnes amyotrophie spinale infantile de type 1 de l'époque nous sommes censés être mort depuis longtemps. Comme disait Goscinny "Tous ? Non!", 5% de la population a survécu. Comment ? Un CHU R. Poincaré abrite un service de réanimation pédiatrique novateur. Mené par la regrettée professeure en médecine réanimatrice pédiatrique A. Barois ce service réussi à sauver et faire vivre au delà des deux ans des personnes handicapées tels que nous. Évidemment à grand prix, cet hôpital public nous permet d'avoir des respirateur artificiels et des fauteuils électriques et manuels.

Grâce à des associations spécialisées, on peut même installer tout à la maison mais on est encore loin d'avoir des auxiliaires de vie et autres personnels soignants 24h/24 7j/7. En effet tout ce matériel ne sert à rien sans humain pour gérer les soins associés qui ont un caractère de fréquence aléatoire. L'un des soins les plus épineux était l'aspiration endotrachéale et le reste en partie. En ce temps et jusqu'en 1995 ce soin est réservé aux infirmières pour le secteur professionnel pour la sphère privée n'importe qui peut le faire tant que la personne n'est pas payée pour.

Passé 1995 on commence à déléguer ce soin sous réserve de formation. Oui mais on a pas les mêmes bases pour ce soin que l'on soit aide soignant, auxiliaire de vie ou assistante maternelle ? Non mais on fait quand même la même formation et pour éviter les problèmes juridiques selon un protocole unique. Jusqu'à présent l'ensemble reste vrai mais avec une légère souplesse pour s'adapter aux patients. Le protocole que j'utilise vient de ce fameux CHU qui l'a appris des hôpitaux nord américain et à ce jour ce protocole n'est toujours pas reconnu par l'académie de médecine française. Il est toléré et heureusement sinon je mourrais d'hémorragie, aucun autre protocole n'ayant marché.

Comment je le sais ? simplement parce qu'on m'a imposé le protocole français en arrivant à Lyon en 2000. 3 jours après l'essai répété, consultation en urgence au centre des insuffisants respiratoire (CIR) et médecins catastrophés pour cette première urgence. Dès lors ce CIR devient mon centre de référence pour ma maladie neuro-musculaire pour la partie respiratoire puis à mes 15 ans pour tout. Bien que le service soit toujours opérationnel à ce jour, on s'étonnera de savoir d'où proviennent les fonds pour sa survie. Bien sur une grande partie vient des fonds hospitaliers publiques, puisqu'il est dans le CHU Croix Rousse. Mais une autre grande partie vitale vient de l'association française  contre les myopathies (AFM). Donc merci une partie du téléthon et autres dons. Mais même ainsi tout n'est pas rose, le service a aussi des contraintes de rentabilités, et pour reprendre M. Macron, on coûte un pognon de dingue.

Détaillons la facture un peu : Fauteuil roulant (6000 à 50 000 euros + entretien, 800/an forfait sécu) selon spécificités (objet de nécessité pas de luxe), respirateur artificiel (location et entretien assurer par associations, estimations avant COVID 15000 euros de départ + 2000/mois sécu forfaitaire aux associations + coûts interventions assurer par associations), lit médicalisé 1 place ( Leasing sécu pour les chanceux et location sécu pour les autres + 50/mois max pour le 2 place selon le prestataire de location (Pourquoi auraient ils une vie amoureuse ? Et des enfants tant qu'à y être ? )). Faisons déjà avec ces 3 objets on pourrait en citer beaucoup d'autres mais on a 3 beaux modèles problématiques déjà.

Le fauteuil roulant n'est souvent financé que pour maximum 5000 euro max et évidemment pas pour les modèles coûtant moins de 20 000 euros autrement plus c'est basique moins elle rembourse. La mutuelle prend de 100% à 500%(jamais vu, rumeur) de la base sécu, il reste souvent un reste conséquent à charge (de 1/2 à 1/4 du prix). On peut compter sur nos département pour compléter le financement en partie sur une base opaque de calcul. La dernière fois il m'est resté environ 10 000 à charge après toutes les demandes soit environ 1/3 du prix initial. Qui peut sans travail et avec max 973,41 d'AAH s'offrir ce luxe sans famille ou amis pour aider ? Heureusement j'ai l'un et l'autre sinon bloqué au lit jusqu'à ma mort sauf si une association vient finir le financement (possible mais rare et difficile).

Pour le respirateur artificiel concrètement on ne fait que creuser un peu plus le trou de la sécu. La solution de ne plus rembourser ceci comme beaucoup de médicaments nécessaires est tentante mais ne nous laissons pas abuser. Vous pouvez jeter autant de sable dans la mer que vous voulez, vous ne ferez jamais avancer la plage. Une solution serait de faire de vraies mesures pour boucher ce trou et l'empêcher de grandir. Fermeture des mutuelles avec versement de toutes les cotisations inutilisées pour soins à la sécu et pour éviter les pertes d'emplois reclassements de leurs agents à la sécu pas pour vendre mais pour aider les gens dans les démarches de santé, par exemple. Mais pour le lit médicalisé, alors ? Il apparaît une forme étrange de double logique. Le système de leasing a duré assez peu de temps somme toute (3 à 5 ans). Les chanceux dedans se sont donc retrouvés propriétaires de leurs lits mais sans contrat d’entretien des prestataires. Beaucoup ont donc signés un contrat indépendant d’entretien, souvent avec le prestataire fournisseur et aux frais de l’individu contractant, Pour les autres c’est comme pour un respirateur artificiel (financement à vie avec entretien, jusqu’à nouvel ordre).

En dehors du matériel nécessaire, Il y a aussi les gens qui nous soignent et si un parent ou un ami ou un conjoint ne sont guère coûteux financièrement, ils ne peuvent pas tout faire seuls. Même si avec l’expérience ils deviennent parfois aussi compétents sinon plus que des médecins ou autres soignants. Il faut des spécialistes capables de travailler avec eux mais aussi de s’y substituer si besoin. Des auxiliaires de vie qui prendront tout ou partie des heures de l’aidant, au pneumologue qui gérera avec le ou les prestataires de matériels médicaux les questions autour de la respiration, pendant qu’un orthopédiste s’occupera des positionnements avec un ergothérapeute et du matériel associé (parfois avec le pneumologue). Puis au besoin on ajoute pêle-mêle infirmiers, orthophoniste, ORL etc. Beaucoup sont des spécialistes donc pas intégralement remboursé par la sécu mais parfois compléter par les mutuelles et autres dispositions spéciales (trop spécifiques pour moi).

Revenons sur les auxiliaires de vie ce sont les seuls soignants non financés par la sécu (sauf pension d’invalidité de type 2 ou 3 de l’employeur) mais par les départements. En gros à moins de travailler en structure tels les hôpitaux, les EPHAD ou certains services d’aide à domicile (SAAD), ils ne sont pas considérés soignants. Si l’on comprend aisément la distinction entre personnes âgées pas reconnues comme handicapées et personnes de tous ages reconnues comme tels, le métier ne fait pas vraiment cette distinction. Ainsi Mme Y ayant reçu la formation auxiliaire de vie peut être affectée à porter le repas et faire un peu le ménage de Mme X, non handicapée, pour 1h/j aussi bien que s’occuper de M. M, handicapées, pendant 12h/j durant 3j/semaine. Certains SAAD ont des pôles spécifiques pour éviter ça et n’affecter l’auxiliaire que là où il veut et où ça semble pertinent. Ces SAAD demeurent rares cependant.

Mais comment sont-ils payés ? Pour la PCH des maisons départementales pour les personnes handicapées (MDPH) il existe 3 modes différents pour les payer, c’est selon qui est l’employeur. Accrochez vous c’est complexe d’autant que l’on peut mixer les 3 en même temps. Commençons avec l’emploi direct avant le prélèvement à la source, l’usager employeur fixait son tarif librement mais assumait dépassement de PCH éventuels et rédaction de fiches de paie. On apprend tous à faire des fiches de paie dès le CP, c’est évident. Finalement après un passage forcé au chèque emploi service universel (CESU), on voit poindre un nouveau problème : les congés payés.

Pour une personne qui fait des heures chez de multiples personnes (3h chez un 2h un autre etc. jusqu’à 42h/semaine), avoir 10 % de majoration de salaire /mois et /personne sans être payer pour les congés peut être rentable avec une bonne gestion des réserves financières. Pour une personne qui n’a que peu de bénéficiaires c’est moins le cas notamment parce que 5 semaines sans paie sur un à 2 SMIC horaire c’est difficile. En l’occurrence les PCH donnent plus environ 17,70/h à 18,40/h brut soit 13,63/h à 14,17/h euros nets avec les 10 % de congés payés inclus dedans. Le CESU prévoit un minimum de 13,20/h brut pour 10,32/h net. On est peu au dessus surtout considérant la perte de plus d’un mois de salaire obligatoire entre le 1 juin de l’année N et le 31 mai de l’année N+1.

Obligatoire ? Pas exactement, si les congés ne sont pas pris ils sont normalement perdus mais 2 semaines consécutives doivent être prise entre le 1 juin et le 30 octobre dans le cadre d’un temps plein. Donc au moins 2 semaines sans salaire, vous imaginez facilement que l’employé refuse de prendre les 3 autres. S’il le fait malgré tout la responsabilité vous reviendra de les lui faire prendre, sinon vous devrez les lui payer mais en plus payer une amende en cas de contrôle et rembourser ou perdre une partie de l’aide correspondante soit une pénalité à 5 chiffres hors amende.

Soyons honnête, quel particulier , hors grandes fortunes , peut-il prendre un tel risque ? Donc pour éviter cela l’employeur doit diminuer encore de 10 % le brut pour le payer au moment des congés payés et assurer un remplacement pour 5 semaines par employés et par an. En effet l’employeur ne va pas arrêter sa vie 5 semaines même pas un jour sinon il est mort. Dans le cadre d’un 24/24 comme moi il a été établi qu’il faut 5 à 7 employés en tout soit 35 semaines de congés payés cumulés en un an, au pire des cas. Ce sera tout pour l’emploi direct.

Passons au mode mandataire, ce sera beaucoup plus court. Reprenez le modèle précédent, changez les montants horaires par 19,47 à 20,24 brut et ne donnez que la possibilité des 10 % de congés payés déjà inclus sans oublier de déduire les frais de fonctionnement du mandataire ( qui n’iront pas à l’employé en poste mais à l’intermédiaire qui vous a présenté). Vous voyez c’est plus court. Finissons par le mode prestataire. C’est assez simple puisque le patient n’est plus employeur donc rien à gérer directement en théorie. Seulement en théorie car en pratique c’est un peu différent. Pour le coup l’aspiration endotrachéale me permet d’éviter un gros turnover car il faut le diplôme obligatoire pour intervenir, ce qui heureusement n’est pas obligatoire dans les autres modes d’emploi. Heureusement car les délais d’inscription à la formation sont longs et les résultats incertains (possibilités d’écarts par rapport au protocole opaques).

Revenons en au prestataire. Les auxiliaires doivent aussi avoir un certain nombre de qualification sinon certains actes sont théoriquement interdits et je n’en citerais que quelques uns. La prise de médicaments sauf préparés dans un pilulier fait par une infirmière (elle a que ça a faire, puis compliqué avec des médicaments liquides buvables). Les transferts portés sont interdits pour les femmes avec les patients de plus de 25kg et 30kg pour les hommes. Je fais environ 35kg, suis en sous poids médicalement parlant et médicalement interdit de lève personne, comment on fait ? La loi n’a jamais prévu ce cas donc on me porte quand même. « Qui aurait pu prévoir ? »

Tout législateur un peu informé et précautionneux devrait prévoir des grandes lignes pour les exceptions qui individuellement ne sont pas prévisibles mais on peut toujours dire « en cas exceptionnel attesté par qui de droit , adapter. ». C’est le mode le plus contraignant mais normalement le plus sécurisé car les remplacements d’auxiliaires sont gérés par le prestataire sauf plantage, auquel cas solution personnelle à trouver ou hospitalisation.

Bref il n’y a pas de solutions simples actuellement et certaines simplifications seraient judicieuses ainsi que de vraies mesures pour avoir de vrais moyens. Je n’ai pas mentionné les problèmes moins prioritaires mais tous très important que sont la santé psychologique et l’accès à la sexualité pour tous, le pavé actuel est déjà bien assez lourd.

Conclusion

Après un tel pavé pamphlétaire, je ne vous en voudrais pas d’être un peu perdu. Pour résumer l’éducation, le travail et la santé sont trois composantes très liées les unes aux autres dans la vie de tout le monde et encore plus pour les personnes handicapées. Là les trois sont très insuffisantes voire défectueuses avec des discriminations liées aux niveaux de vie de ces personnes exacerbées violemment mais sournoisement. On n’a pas tous les capacités de comprendre le système, comment se défendre alors ?

Devenir de cette lettre

N’ayant reçu que quelques réponses administratives sans réelle solution, je choisi de médiatiser avec vos avis et retours les grandes lignes de cette lettre en espérant qu’un journaliste professionnel me contact et se saisisse de ceci pour une à plusieurs interviews.

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