La ZAD est partout. Même au coeur des mégalopoles modernes, entre banques, boutiques de télécoms et bâtiments administratifs. C'est ce qu'ont découvert, en ce début d'hiver, habitants et officiels de Rouen.
Une ZAD a fait irruption, en plein coeur de ville, mardi 4 novembre 2014, à l'issue d'une marche organisée à la mémoire de Rémi Fraisse, assassiné par les forces de l'ordre sur le site du projet de barrage à Sivens. Alors que le cortège atteignait une aile du Palais de Justice, sur la très passante et très commerçante rue Jeanne d'Arc, des personnes agissant à visage découvert ont déchargé des palettes et immédiatement entrepris d'édifier une cabane, opération qui sera menée en moins de cinq minutes. Affirmant le caracère inoffensif de leur action, ils ont entamé une distribution de soupe chaude aux manifestants et aux curieux.
La ZAD de Rouen aura vécu trois jours. Trois jours à construire, cuisiner, débattre et veiller. Trois jours à débattre de la question, que d'aucuns cherchent à rendre clivante, de la violence dans les mouvements sociaux, de la violence d'Etat, de ce monde qui craque de tout côté. Trois jours accompagnés par les chansons de La Bringue, l'accordéon d'un passant. Trois jours, avant que la municipalité socialiste, sans aucune tentative de dialoguer avec les occupants, n'envoie ses huissiers et policiers faire place nette devant le palais de Justice. Les occupants n'ayant pas opposé de résistance, la préfecture dira de l'expulsion qu'elle s'est déroulée "dans le calme". Ce serait oublier la violence avec laquelle les forces d'intervention sont intervenues.
Les occupants de la ZAD de Rouen ne revendiquaient rien. Ils affirmaient leur attachement à Rémi et à toutes les ZAD, ces lieux où la jeunesse, où "ceux qui vivent ensemble se réapproprient leur existence".
Trois textes ont été écrits par le collectif informel à l'origine de cette action :
- "Ils tuent. Occupons" un appel rédigé lors de la première veillée place du Maréchal Foch ;
- "ZAD de Rouen, 48h d'existence", un texte, plus littéraire, et écrit après deux jours d'occupation, sur les motivations derrière cette action ;
- "Va mourir", un récit de l'évacuation de la ZAD, "sans violence" d'après la préfecture.