
Arpenter la nuit, c'est l'histoire de Kiara, 17 ans, de son frère Marcus et des amis de ce dernier, persuadés qu'ils peuvent produire un succès de Rap et signer pour un label important. Du rêve en poudre, entre deal et réunion, dans les sous-sols miteux d'un immeuble d'Oakland. C'est surtout l'histoire de Kiara, Kia ou Ki, tout dépend de qui s'adresse à elle. La jeune femme essaie de s'en sortir et d'aider son frère, ils n'ont plus de parents, le père a disparu, la mère est en prison, l'oncle plus ou moins protecteur est parti à l'autre bout du pays. Kiara aide aussi Trévor, jeune voisin d'une dizaine d'années en grande partie abandonné par sa mère. La vie de Kiara, c'est la vie de millions d'Américains, plongés dans la pauvreté, obligés d'essayer de subvenir à leurs besoins chaque jour et de trouver le moyen de payer le loyer chaque mois, en pleine crise immobilière. Une vie qui, pour le lecteur, est un instantané poignant de ce qu'est une partie de l'Amérique d'aujourd'hui, loin des chiffres officiels de la "divine" croissance prétendument "retrouvée". Régulièrement, Vernon, le propriétaire des appartements de l'immeuble où vit Kiara vient réclamer le loyer, laissant des délais de plus en plus courts ; surtout, il affiche tout aussi régulièrement sur les portes des papiers oranges indiquant que les loyers vont augmenter, du fait de la crise immobilière, et que les mauvais payeurs vont devoir partir. Le loyer, cela devient une question de survie pour Kiara, une nécessité pour ne pas se retrouver parmi la myriade de sans-abri, en compagnie de Marcus et de Trevor. Alors... elle va se prostituer, tomber dans la dureté de la rue et surtout se retrouver sous l'emprise de l'envers du décor : ce qu'une certaine police fait aux jeunes prostituées telles que Kiara.
Leila Mottley, Arpenter la nuit (Albin Michel, 2022 ; format poche Lgf, janvier 2024).