Tenez-vous ce dimanche, après le dessert et les larmes de Roger Federer en direct de Melbourne (suite à sa défaite face à Nadal en finale de l'Open d'Australie), la politique fait irruption à la table familiale. C'est presque un rituel. Chaque dimanche, une semaine avant la votation fatidique, ma grand-mère amène sa feuille de vote pour la soumettre à l'approbation de mon paternel, à vrai dire le seul mâle adulte encore en vie dans la famille.
Aucune grande recommandation de vote, ma grand-mère est depuis longtemps convertie à la cause de mon père qui n'a plus besoin de la convaincre des bienfaits de la gauche. Ainsi, après une assistance à la procréation politique pour placer un OUI dans la bonne case, l'intermède "démocratique" fut bouclé en deux minutes. Pas de débats, de confrontation de points de vue. Pourquoi s'embêter avec ça? Déjà que Roger a perdu... on va pas commencer à verser des larmes pour la politique.
Faut dire que l'enjeu est de taille à en croire les déclarations de nos politiciens pour qui un "non" à la libre-circulation des personnes le 8 février prochain engendrerait la mort économique de la Suisse. J'exagère à peine et quant à savoir si nos élites disent vrai, c'est le même cocktail politique à chaque fois : un peu beaucoup de vraissemblable, d'exagération et d'approximation. Enfin bon, toujours est-il que ma grand-mère a "voté" comme a dit mon père, un peu pour lui faire plaisir et un peu parce qu'elle pense comme lui. Après tout son fils chéri l'aide bien à remplir sa déclaration d'impôts, alors pourquoi pas sa feuille de vote...
Une fois extirpée du cocon familial, je me rends, dans la soirée, vers un autre haut lieu de la politique: le bistrot. Au détour d'une conversation sur la neige qui n'en finit pas de tomber et de je-ne-sais-trop-quoi-sans-importance, une amie me confie qu'elle a rempli sa feuille de vote aujourd'hui... en famille! A en croire que tout le monde s'est passé le mot. " Et comment que t'as voté?" "Et ben comme mon père... enfin y a quand même eu un p'tit débat et comme d'hab ma mère a polémiqué".
Un peu plus de trente ans après l'octroi du droit de vote aux femmes (en 1971 en Suisse), y a comme quelque chose qui cloche. La faute à qui? A personne. Mon père lit le Temps et ma mère le Fémina alors forcèment... Mais la procréation politique assistée n'est pas toujours chose systématique. Pour preuve, ma mère est passée maître dans le hochement de tête dans le "bon" sens paternel tout en ne pensant pas moins le contraire. Alors peut-être qu'un NON se glissera dans l'urne, dimanche prochain, à l'insu du "père". C'est bien connu, les femmes peuvent faire deux choses à la fois et pour voter, la règle s'applique aussi...