
Il existe de graves risques en Europe, au vu de la spirale catastrophique actuelle, qui peuvent prendre des formes diverses de déstabilisation généralisée - famines, guerre, soulèvements incontrôlables, gouvernements fascistes - ouvrant la voie à de fortes répressions.
Les marchés et les banques font désormais la loi
Les marchés et les banques font la loi depuis 1980. Cette nouvelle phase de la mondialisation capitaliste dite «néolibéralisme» assoit la prédominance du capitalisme financier. Elle impose la rationalité des marchés mondiaux et des capitaux à l'économie mondiale et à chacune des sociétés.
Les marchés ont peur et sont inquiets parce qu'ils sont conscients que le système néolibéral s'est épuisé et que la crise du néolibéralisme est structurelle.
En raison du besoin de financement des États, la démocratie représentative s'est rendue dépendante des marchés donc des prêteurs et des créanciers ; d'autant que l'oligarchie financière contrôle une partie des classes politiques.
Nous vivons désormais sous une dictature des marchés comme le montre bien la crise des « subprimes » aux États-Unis.
On y voit d'anciens propriétaires camper devant leurs maisons reprises par les banques puis détruites afin qu'ils ne puissent plus y retourner.
Le marché versus les marchés
Les marchés sont à la fois les banques, les assurances, les fonds spéculatifs, les fortunes privées et les fonds souverains. Il faut aussi distinguer entre le marché et les marchés.
Le marché est une forme d'organisation sociale fondée sur l'échange et n'a pas toujours été capitaliste. Aujourd'hui quand on parle des marchés, on fait référence à la forme dominante que sont les marchés financiers qui est en réalité une forme de pouvoir, celle du capitalisme financier, sur tous les autres secteurs de l'économie et sur l'ensemble des sociétés.
L'idéologie du néolibéralisme s'est effondrée
L'idéologie du néolibéralisme s'est effondrée. Personne n'osera plus aujourd'hui dire qu'il suffit de laisser les marchés financiers libres pour que tout s'arrange. L'idée de la taxe Tobin, taxe sur les transactions financières reprise par les gouvernements européens à la recherche de solutions - tout comme les autres propositions que sont la suppression judiciaire des paradis fiscaux et la socialisation du secteur financier - ne sont pas applicables en l’état et illustre bien ce fait.
Satisfaction du financier au détriment du bien-être de la société civile
Que d’anciens collaborateurs de Goldman Sachs soient aujourd'hui à la tête de gouvernements est symptomatique d'une société dérivant vers la satisfaction du financier au détriment du bien-être de la société civile. Cela démontre les mécanismes de formation des élites et de la classe politique et est tout à fait significatif du passage des bourgeoisies à des oligarchies.
Le fait que les marchés financiers restent indépendants par rapport aux États qui les ont sauvés de la crise explique l’extrême réactivité du gouvernement français et de la Commission Européenne vis-à-vis des agences de notation toutes puissantes.
Leviers d'action contre la dictature des marchés
La corruption du système actuel vient de la fusion entre la classe politique et la finance. De ce fait, malheureusement, une élection démocratique dans un pays, ne change pas grand-chose dans la désignation des dirigeants et des politiques qui suivent.
Aussi la question de la domination des marchés est une question qui se pose à tout le monde, et d'abord à l'ensemble des citoyens. Quels sont réellement les leviers d'action dont nous disposons contre cette dictature ? Que peuvent faire les citoyens européens ? Ils peuvent résister dans un refus de la domination tout en définissant des alternatives.
La mise en place en Grèce et en Italie de gouvernements techniques soumis à la dictature des marchés - au détriment du bien-être de la société civile – démontre le fait que les marchés financiers restent indépendants par rapport aux États qui les ont sauvés de la crise mais font courir à l’Europe de graves risques de déstabilisation généralisée.
Actuellement, l’ensemble des mouvements sociaux et citoyens sont des mouvements de résistance contre la suprématie des marchés financiers. La question qui se pose aujourd'hui est celle de la convergence entre les mouvements sociaux et citoyens traditionnels et les nouvelles formes de mouvements sociaux, comme celles des «indignés» et des révolutions arabes.
Dans ces conditions, notre société dans vingt ans sera telle que nous la ferons. Elle n'est pas prédéterminée, elle dépend des luttes qui seront menées. Maxence DAGHER