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Billet de blog 16 mars 2013

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BRICS : les nouveaux créanciers de l’Europe

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Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud - forts d’une réserve de change combinée de 3.140 milliards d’euros en 2011 - pourraient contribuer à stabiliser une zone euro malmenée par la crise financière. En échange de cet investissement risqué, ils exigent une plus grande clarté sur la manière dont l’Europe compte résoudre cette terrible situation.

L’Europe se rapproche des grands pays émergents

La crise économico-financière frappant la zone euro est si profonde que certains des grands pays de l’Union se rapprochent des principaux pays émergents incapables de résoudre à eux seuls ses problèmes d’endettement. Néanmoins, en stabilisant cette région, l’une des plus riches de la planète, ils pourraient éviter un choc boursier et obtenir des avantages non financiers.

En 2011, quatre de ces cinq pays affichaient conjointement des réserves de change d’un montant de 4.300 milliards de dollars - 3.140 milliards d’euros - dont les trois quarts détenus par la Chine. Aussi les ministres des Finances du groupe des Brics [1] discutent régulièrement d’un éventuel investissement dans les obligations souveraines les plus malmenées de la zone euro comme l’a déjà fait l’Empire du Milieu.

Les Brics déplorent le manque d’initiative internationale dans le règlement de l’endettement européen et souhaitent limiter l’impact qu’auraient des effondrements en série sur les marchés émergents. Ils calment ainsi les responsables politiques et les investisseurs des grandes économies des deux côtés de l’Atlantique face à une crise qui menace la planète financière d’une deuxième récession en six ans.

Ces économies à forte croissance sont conscientes qu’elles ne peuvent demeurer une «oasis de prospérité» face à des turbulences financières grandissantes. On ne peut que constater dans ce contexte global, où tous sont interdépendants, qu’agir ne relève pas de la charité mais de l’intérêt national.

Une aide pas si désintéressée que ça

Cette synergie et l’intérêt national primant, nul n’est censé ignorer que suite à la récession de 2008-2009 - conséquence de la crise des subprimes et de la faillite de Lehman Brothers-, les pays émergents seraient entraînés dans le sillage des économies occidentales si celles-ci venaient à défaillir.

Néanmoins, des achats de dette grecque, italienne ou d’euro-obligations auprès du Mécanisme Européen de Stabilité (MES) – ou la proposition brésilienne d’apporter un soutien via le FMI – ne suffiront pas à résoudre la crise politique qui mine l’Europe mais ils l’aideront à trouver une solution adéquate.

De plus, acheter de la dette européenne serait un investissement risqué mais la Chine et d’autres pays « des Brics » s’assureraient une meilleure stabilité dans leurs marchés clients ainsi qu’une force de négociation significative lors de sommets relatifs à la gouvernance mondiale.

En contrepartie, il pourrait y avoir des récompenses comme un accès facilité aux marchés occidentaux – le statut d’économie de marché réclamé par la Chine (membre de l’OMC depuis 2001) -, de nouveaux sièges et droits de vote au FMI ou encore un soutien à une nouvelle répartition des réserves mondiales d’actifs et de changes.

Nécessité d’une plus grande clarté dans la résolution de la crise européenne

De nombreux investisseurs des marchés émergents rechignent à l’idée de voir les Brics gaspiller des réserves durement gagnées pour sauver des États occidentaux ruinés. Acheter des obligations souveraines dans l’Union européenne pourrait s’avérer un très mauvais investissement. Soit elles ne rapporteraient quasiment rien, - dans une devise pouvant perdre de sa valeur si l’Allemagne venait à quitter la zone euro -, soit elles pourraient faire défaut. Un risque de contrôle des capitaux serait même à craindre.

En échange de leur soutien, les Brics suggèrent une liste de vœux comprenant notamment des sièges permanents aux Nations unies pour le Brésil, la Russie et l’Inde et une plus grande libéralisation des échanges dans des secteurs comme l’agriculture, pierre d’achoppement ayant contribué à l’impasse du cycle de Doha à l’OMC.

En compensation, les pays émergents exigeront une plus grande clarté sur la façon dont l’Europe compte résoudre sa crise. La banque centrale chinoise pourrait s’abstenir d’acheter de la dette européenne ou poser ses conditions en cas d’achat. Elle pourrait également chercher à réduire ses réserves de change en dollars. Une plus grande unité fiscale et l’Eurobond – sous l’égide de l’Allemagne – rencontrerait naturellement une énorme demande de la part de ces investisseurs. Mais la meilleure solution viendrait de la révision par les pays de la zone euro de leurs systèmes de production et de consommation. Maxence DAGHER

[1] En économie, les « BRIC » est un acronyme - inventé par Jim O'Neill, dans un article de 2001 intitulé « Building Better Global Economic BRICs » - qui désigne le regroupement des pays du Brésil, de la Russie, l'Inde et la Chine, qui sont tous considérés comme étant à un stade de développement économique nouvellement avancé. On utilise généralement les termes «les BRIC» ou «les pays BRIC» ou «les économies BRIC» ou encore les «Big Four».Cet acronyme est devenu d'usage répandu comme un symbole de l'évolution de la puissance économique mondiale du monde en développement par rapport aux pays développés du G7. On estime que les économies BRIC dépasseront les économies du G7 d'ici 2027 (Source Wikipedia).

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