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« Annick Makala et Myriam Joly
Habitantes du Tarn sud
M. Clément BEAUNE
Ministre délégué auprès du ministre
de la Transition écologique et de la
Cohésion des territoires chargé des
Transports
Dans le Tarn sud, le 7 novembre 2023
Objet : lettre ouverte à M. Clément BEAUNE
J’AI FAIT UN RÊVE
Vous avez déclaré le 22 octobre dernier sur France Inter :
« Une minorité ne peut pas imposer une décision à une majorité, nous sommes dans une démocratie, un État de droit »
Je rêve que vous ayez rajouté :
« Place à la vérité, je vais vous expliquer pourquoi je soutiens la légitime mobilisation citoyenne de ce week-end contre l’A69 inutile, injuste, écocide, climaticide et qui ne va pas désenclaver le Tarn sud »
Je rêve de votre sourire bienveillant devant des journalistes ébahis par cette première révélation puis je suis bouche bée quand vous énumérez les préjudices graves aux règles démocratiques qui ont perlé le processus décisionnel de l’A69.
OUI, Mme DELGA a fauté.
Lors de l’enquête publique du 23 décembre 2021 au 7 février 2022 concernant le projet du Schéma Régional d’Aménagement,de Développement Durable et d’Égalité des Territoires, porté par la Région Occitanie à l’horizon 2040 (SRADDET 2040), Mme DELGA a privé les habitants d’Occitanie d’exposer leur avis sur un projet d’aménagement et de développement durable du Tarn sud justifiant l’utilité de l’A69.
* Aucun projet d’aménagement et de développement durable pour désenclaver le Tarn sud grâce à une autoroute Castres Toulouse n’est présenté voire évoqué dans le SRADDET 2040.
* Sur la cartographie imposée par le code de l’urbanisme qui projette à l’horizon 2040 les routes et autoroutes d’intérêt régional apparaît la RN126 actuelle mais pas l’A69.
Madame DELGA a bafoué la convention d’Aarhus qui l’obligeait à recueillir l’avis des habitants d’Occitanie sur un projet d’aménagement et de développement durable justifiant l’utilité d’une autoroute et la participation financière de la Région Occitanie.
C’est ILLÉGAL, Mme DELGA ne peut pas imposer SA décision aux habitants d’Occitanie maintenus dans l’ignorance, nous sommes en démocratie, un État de droit.
OUI, des élus du Tarn sud ont fauté.
Le préfet du Tarn a suspendu l’élaboration du Schéma de Cohérence Territoriale du pays d’Autan et de Cocagne (SCOT) le 13 avril 2022 en raison de sa caducité... une semaine avant la signature du contrat avec le concessionnaire ATOSCA.
Les habitants ont été et sont encore privés d’une enquête publique pour exposer leur avis sur un projet d’aménagement et de développement durable du Tarn sud justifiant l’utilité d’une autoroute concédée au privé.
La communauté d’agglomération Castres Mazamet en finançant l’A69 sur les fonds communautaires, a bafoué la convention d’Aarhus qui l’obligeait à recueillir l’avis des habitants du pays d’Autan et de Cocagne sur la pertinence économique et sociale d’une autoroute justifiant la contribution financière de la communauté d’agglomération.
C’est ILLÉGAL, des élus ne peuvent pas imposer l’A69 aux habitants du Tarn sud sans justifier son utilité dans un projet de développement durable, nous sommes en démocratie, un État de droit.
OUI, la garante du CNDP a exprimé des regrets
Nommée par la Commission Nationale du Débat Publique (CNDP) organisé en 2009 sur l’opportunité d’une autoroute, la garante du processus de concertation jusqu’à l’enquête publique de 2016 pour l’obtention de la Déclaration d’Utilité Publique (DUP) d’une autoroute concédée, a regretté dans son rapport que malgré ses recommandations, les habitants du Tarn et de Haute Garonne ont été privés d’exposer leur avis sur un projet d’aménagement et de développement durable justifiant l’utilité sociale et économique d’une autoroute concédée.
EN VÉRITÉ je vous le dis, aucun projet d’aménagement et de développement durable justifiant l’utilité sociale et économique de l’A69 pour désenclaver le Tarn sud n’a été soumis à l’avis des habitants du Tarn, de Haute Garonne et d’Occitanie comme l’impose la loi.
Il est inacceptable de constater qu’après 30 ans, des élus sont incapables de soumettre à leurs administrés un projet d’aménagement et de développement durable justifiant des sacrifices écologiques pour réaliser l’A69.
Répéter tel un mantra «l’A69 va désenclaver le Tarn sud» sans le démontrer c’est irresponsable, c’est maintenir dangereusement les habitants, les élus, les entreprises dans la volatilité de promesses éculées
Le seul projet d’aménagement et de développement durable pour le désenclavement du Tarn sud proposé aux habitants et aux générations futures est celui que je vous invite vivement à découvrir sur le site « une autre voie ». Un projet qui fait le pari audacieux d’une revitalisation écologique, économique et sociale du territoire.
Une poignée d’élus ne peut décider d’une autoroute sans PRÉALABLEMENT soumettre aux habitants un projet d’aménagement et de développement durable qui justifie le sacrifice de leur patrimoine naturel boisé, agricole et culturel, nous sommes en démocratie, un État de droit.
S’affranchir de la consultation des habitants est un DÉNI DE DÉMOCRATIE, j’ai donc décidé de demander la suspension des travaux sur l’A69 dans l’attente des résultats d’un référendum que je propose à Mme DELGA d’organiser avec le préfet de Région sur l’utilité sociale et économique de l’A69 afin de réactualiser ou pas le SRADETT Occitanie.
Avec audace, vous avez poursuivi votre discours en saluant le bien fondé des alertes émises par les commissaires enquêteurs des deux enquêtes publiques réalisées pour le tracé autoroutier : la DUP en 2017 et l’Autorisation environnementale en 2023.
« OUI les avis des commissaires enquêteurs sont devenus défavorables car les réserves émises en faveur des usagers modestes qui renonceront au péage exorbitant de l’A69 n’ont pas été levées.
* Pour la DUP : Offrir aux usagers modestes une alternative à l’A69 aussi confortable et sécurisée que la RN126 actuelle.
* Pour l’autorisation environnementale: Augmenter la contribution financière de la puissance publique pour préserver l’équilibre financier d’ATOSCA.
OUI la subvention de la puissance publique accordée à ATOSCA pour l’A69, annoncée dans l’enquête publique de 2016 pour la DUP s’élevait à 220 millions d’euros pour un budget total de 450 millions d’euros. OUI elle a chuté à 23 millions d’euros pour le même budget dans l’enquête publique de 2023 pour l’autorisation environnementale.
Cet effondrement de la contribution financière de la puissance publique fera reposer le manque à gagner des actionnaires privés sur un péage exorbitant de l’A69.
Les conséquences seront dramatiques pour la santé et la sécurité des usagers modestes dépossédés de l’utilisation sur la RN126 des déviations Soual et Puylaurens données à ATOSCA (10 km sur les 54 km d’autoroute).
Ils seront contraints d’utiliser des itinéraires de substitution plus longs, plus fatigants, plus dangereux avec des impacts irréversibles sur le cadre de vie et la qualité de vie des habitants des communes traversées.
Les enfants seront victimes du bruit et de la pollution de l’air induits par l’intensité du trafic dans 9 agglomérations de l’aire d’influence de l’A69 notamment par l’explosion des poids lourds.
OUI, ATOSCA a fauté en limitant son aire d’étude d’impact aux communes situées le long de la RN126 s’affranchissant de son obligation d’étudier les impacts sanitaires sur l’aire d’influence.
OUI, les préfets du Tarn et de Haute Garonne ont fauté en écartant des 2 enquêtes publiques, une dizaine de communes situées dans l’aire d’influence définie par la DREAL Occitanie dans son étude de 2014 sur l’estimation des reports de trafic (25 à 50%).
« Une minorité ne peut pas imposer une décision à une majorité, nous sommes dans une démocratie, un État de droit »
OUI l’article 1 de la Charte de l’Environnement sur le droit de chacun de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de sa santé a été bafoué avec le sacrifice de la santé et de la sécurité de nombreux Tarnais du sud au profit d’une poignée de privilégiés qui utiliseront une A69 rapide confortable et sécurisée.
OUI des ONG ont assuré avec compétence un contrôle de légalité de l’A69 et rédigé avec sincérité plusieurs recours sur le fond auprès du TA de Toulouse notamment pour demander l’annulation de la DUP pour une A69 qui n’est plus un projet d’intérêt général, et au pénal, pour mise en danger délibérée de la vie d’autrui ».
Vous avez ensuite remémoré avec tristesse :
Rémy FRAISSE est mort le 25 octobre 2014, à SIVENS, victime de la confrontation avec les forces de l’ordre. Le lendemain Mme ROYAL annonçait la suspension du projet hydraulique en s’appuyant sur un rapport de l’inspection générale de l’environnement confirmant que le projet n’était plus d’intérêt général. Je rend hommage à la légitime manifestation des habitants et des ONG contre ce projet vieux de 30 ans et je rappelle que le TA de Toulouse a condamné l’État en décembre 2020 pour la signature de 3 arrêtés illégaux de défrichement par la préfète du Tarn.
Soucieux que M. DARMANIN ne vive pas un drame identique à celui qu’a vécu M. CAZENEUVE et considérant qu’il n’est pas vertueux dans une démocratie, pays des droits de l’Homme, que des bulldozers aillent plus vite que la justice, j ai décidé de donner suite à la demande des ONG exprimée lors de la réunion en sous préfecture de Castres le 13 octobre dernier.
La chute de la subvention de la puissance publique de plus de 90 % et l’augmentation des reports de trafic qui en découlent posent question sur la rentabilité de l’A69 et sur son intérêt général. Je transmets au Commissariat Général à l’Investissement et à l’inspection générale de l’Environnement les recours sur le fond et je communiquerai à la presse d’ici 3 jours leur rapport d’expertise socio économique sur la pertinence de la DUP signée en 2018 par M. PHILIPPE, M. HULOT et Mme BORNE qui occupait mon poste.
Vous avez rajouté ensuite :
Je rends hommage aux organismes obligatoirement consultés par mon ministère pour un projet d’infrastructure. La respiration d’une démocratie repose sur leur impartialité guidée par l’intérêt général. Leur indépendance est précieuse, elle a permis de formuler des critiques sévères mais argumentées sur l’ A69 pour éclairer la décision».
« l’Autorité Environnementale, le Conseil National de la Protection de la Nature, l’Office Français de la Biodiversité, la Direction des monuments historiques, le Commissariat Général à l’Investissement ».
Je suis admiratif du combat héroïque de Thomas Brail et des grévistes de la faim qui ont porté au niveau national l’alerte sur le massacre d’arbres plus que centenaires, la disparition d’une biodiversité exceptionnelle et l’amputation du VIVANT transmis aux générations futures.
J’applaudis les 2000 scientifiques et les membres du GIEC qui m’ont alerté sur une A69 climaticide, symbole durable de l’inaction climatique d’un gouvernement irresponsable.
Vous avez conclu :
Ma décision reposera soit sur un rapport d’expertise socio économique soit sur un référendum, soit sur un moratoire sans écarter la possible saisine du Conseil d’État. « L’indemnisation du concessionnaire ne sera pas un obstacle pour stopper un projet inutile, injuste, écocide et climaticide. Poursuivre les travaux de l’A69 sera durablement plus coûteux pour la société, la santé et la sécurité des habitants du Tarn sud et des générations futures».
Le recours sur le fond qui a motivé mon intervention médiatique est dans le dossier de presse et les pièces justificatives confirmant l’illégalité des faits que je vous ai exposés seront transmises sur demande ».
Foudroyée par ce rebondissement, je me réveille : « ce rêve pouvait il devenir réalité ? ».
OUI « une minorité ne peut pas imposer une décision à une majorité, nous sommes dans une démocratie, un État de droit ».
Annick Makala et Myriam Joly
Habitantes du Tarn sud »