Dix-huit ans de chiffres. Dix-huit ans de colloques. Dix-huit ans de graphiques. Toujours le même diagnostic : c’est préoccupant.
Les victimes osent témoigner. C’est encourageant. Les discriminations persistent. C’est réaliste.
Dans une salle trop claire du 7ᵉ arrondissement, on parlera d’“évolution des perceptions” et de “progrès symboliques”. Traduction : rien de fondamental, mais les mots sont plus beaux.
Le Défenseur des droits (DDD), comme un médecin scrutant un patient qu’il ne soignera pas, observe avec gravité et un soupçon d’ennui. Les injustices, elles, continuent leur ronde immuable.
On applaudira les “avancées dans l’accès au droit”. On saluera la “mobilisation des acteurs publics”. On notera que la situation reste préoccupante. Et on repartira convaincus que l’égalité, c’est dans le prochain baromètre que ça se passera.
Là réside la magie du système : plus les discriminations persistent, plus on mesure, plus on discute, plus le DDD existe. La bureaucratie contre l’injustice. La morale contre le réel. Un ballet de chiffres et de mots pour conjurer l’impuissance.
Le 10 décembre, on parlera. On s’écoutera parler. On promettra d’agir davantage. Et la rue de Fontenoy, elle, restera neutre, incolore et implacable. Jusqu’au prochain colloque.
Pour coller à la réalité ou décoller encore davantage, devant une devanture sombrant, croulant sous le poids d'accessoires toujours plus encombrants, mal outillés, moyennant tout ce qui prélève, tout ce qui précède, et dont il est difficile de décolérer...
— Signé : L'horloger...