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Billet de blog 30 mai 2025

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Le statut de l’élu : un serpent de mer à la recherche d’une colonne vertébrale...

Alors qu’une nouvelle proposition de loi visant à créer un véritable statut de l’élu local vient d’être transmise à l’Assemblée nationale, Mehdi Allal, enseignant en droit public, alerte sur les conséquences d’une procrastination politique chronique. À l’heure où la démocratie locale vacille sous le poids des désengagements, il devient urgent de sécuriser juridiquement l’exercice d'un mandat.

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C’est une antienne bien connue des juristes comme des élus de terrain : la création d’un véritable statut de l’élu local figure parmi les promesses les plus anciennes – et les plus souvent trahies – de notre République décentralisée.

Dernier rebondissement en date : l’arrivée à l’Assemblée nationale d’une proposition de loi, adoptée en mars dernier au Sénat, et portée par la centriste Françoise Gatel avant son entrée au gouvernement.

Ce texte, salué par les associations d’élus, ambitionne d’améliorer les conditions d’exercice du mandat local, de sécuriser les parcours et de préparer la reconversion des élus.

Mais alors que la commission des lois vient seulement de désigner un rapporteur, les perspectives d’un examen rapide s’obscurcissent. L’agenda parlementaire est saturé, les arbitrages gouvernementaux restent flous, et la question du calendrier – notamment celle d’une session extraordinaire en juillet – demeure suspendue à la volonté politique de l’exécutif.

Or, il y a urgence. Derrière les appels récurrents des associations d’élus ne se cache pas un simple lobbying de circonstance, mais une alerte sur la crise d’engagement que traverse la démocratie locale. Déjà fragilisée par l’isolement de nombreux maires, par les violences subies, par l’accumulation de responsabilités sans moyens suffisants, la fonction élective locale ne suscite plus de vocations. Le nombre de démissions en cours de mandat est préoccupant. Et les difficultés de reconversion post-mandat dissuadent bien des talents de s’y engager.

Un statut clair, protecteur, complet, n’est pas un luxe : c’est une nécessité démocratique. En l’absence de garanties sérieuses – sur la rémunération, la formation, la protection sociale, la valorisation des compétences acquises... –, l’exercice du mandat local s’apparente trop souvent à un sacrifice personnel, plus qu’à un engagement politique reconnu. Et cette carence juridique se traduit par un éloignement durable entre les citoyens, les citoyennes et leurs représentants locaux, pourtant les plus proches de leurs préoccupations quotidiennes.

La loi doit désormais acter que le mandat local n’est ni une parenthèse, ni une anomalie professionnelle, mais une expérience fondatrice qu’il faut inscrire dans un cadre stable, prévisible et valorisant. À condition, bien sûr, que ce texte ne soit pas une fois encore relégué aux oubliettes des priorités nationales.

À l’approche des élections municipales de 2026, l’occasion est trop rare pour être manquée : si session parlementaire extraordinaire il y a en juillet, la proposition de loi sur le statut de l’élu local doit impérativement figurer en tête de l’ordre du jour. Faute de quoi, le vieux serpent de mer du statut de l’élu continuera de hanter les couloirs du Parlement – et la démocratie locale, elle, poursuivra son érosion silencieuse.

Alors que seule son éclosion pourrait permettre d'esquiver une exploitation de normes, surgies dans de nombreux textes, qu'il demeure probablement à codifier, sous peine d'une exposition trop violente des édiles au risque d'explosion sociale et de ployer sous le poids du nombre de reconversions à raffermir et refermer...

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