La République est morte. On la savait malade. Une espèce de gangrène la rongeait de l'intérieur. Maladie auto-immune? Des pans entiers se détachaient, industries, entreprises...le coeur bientôt fut atteint, éducation, santé, police..Des petits riens étaient rejetés qui s'en allaient pourrir ou mourir dans des sortes de sombres décharges. Il n'y eut pas de funérailles nationales. Quoique...
Une sorte de parvenu, réunit du beau monde à Versailles. Il jouait à Louis XIV. Ou peut-être se prenait-il pour un Louis? On voit plus étrange dans certains milieux. C'était du théatre, bien sûr, mais certains s'y trompèrent et crurent à un bel éloge de la république. Presque aussi émouvant que celui consacré à un chanteur. Des larmes coulèrent, certaines d'émotion, d'autres de tristesse. On dit même que certains pleuraient de rage. Mais que ne dit-on pas?
En même temps, il fallut bien s'en rendre compte: Villon est mort, Apollinaire est mort, Brassens et Barbara aussi. Il n'y a plus guère de poètes. On pouvait s'y attendre.Mais il y a de l'argent. De l'euro, du dollar, du yen...En papiers qui tombent comme neige ou comme des papillons morts. Et tombent, tombent en tas ondoyants, plus exactement "flottant" qui, s'accumulant en masses épaisses, vont bientôt ensevelir et étouffer le monde.
Dans ma cage, il y a un oiseau. Il est vieux et il est malade. Il bat des ailes inconsidérément, trop vite, trop fort. Il veut s'en aller, c'est sûr. Alors je lui dis: Tu as raison, envole-toi. La République est morte et les poètes ont disparu.