Il avait 14 ans. Elle était surveillante dans un collège. Et ce jour-là, tout a basculé. Il l’a poignardée.
Encore un fait divers glaçant, encore un adolescent qui passe à l’acte. Faut-il y voir un simple dérapage ? Un monstre isolé ? Ou oserons-nous, enfin, regarder en face ce qui gangrène silencieusement nos établissements scolaires et nos familles : la crise profonde de la santé mentale des jeunes.
Aujourd’hui, les enseignants, les CPE, les chefs d’établissement, les infirmiers et les psychologues scolaires tirent la sonnette d’alarme. Mais le système est sourd. La souffrance psychique des adolescents s’aggrave. Anxiété, dépression, automutilation, troubles du comportement, déscolarisation, violence intériorisée ou retournée contre autrui… Ce n’est plus exceptionnel, c’est devenu fréquent.
Les chiffres le confirment : selon l’INSERM, près de 13 % des adolescents présentent des troubles psychiatriques nécessitant une prise en charge. Mais la majorité n’en bénéficie pas. Pourquoi ? Manque de moyens, délais d’attente faramineux en pédopsychiatrie, absence de suivi coordonné entre école, médecine et protection de l’enfance. Et surtout, un tabou persistant autour de la santé mentale, comme si admettre une détresse psychique équivalait à une défaillance morale ou parentale.
Loin d’excuser un acte de violence – que rien ne justifie – il faut néanmoins comprendre les racines du mal si l’on veut éviter qu’il se répète. Un adolescent qui poignarde n’est pas né criminel. Il est souvent le produit d’un parcours cabossé, d’un isolement, d’un silence qui dure depuis trop longtemps.
Alors, quelles solutions ?
Un plan national d’urgence pour la santé mentale des jeunes : cela implique des moyens humains, matériels, et des campagnes d’information.
Des cellules de soutien psychologique effectives dans chaque établissement. Pas une demi-journée de présence mensuelle d’un psy, mais une vraie permanence.
Un lien renforcé entre les services de pédopsychiatrie, l’Éducation nationale, les services sociaux et judiciaires, pour repérer en amont, accompagner, et prévenir.
Une formation des professionnels de l’éducation aux premiers signes de souffrance psychique, pour ne pas banaliser ce qui est alarmant.
On ne peut plus se contenter de condamner après coup. La société a le devoir d’agir avant. Sinon, à chaque nouvelle agression, nous verserons les mêmes larmes, publierons les mêmes tribunes, et laisserons les mêmes silences détruire peu à peu notre jeunesse.
Ce ne sont pas les ados qu’il faut craindre, mais notre incapacité à les écouter, à les entourer, à les comprendre.
Meryam ENNOUAMANE JOUALI