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Meryam ENNOUAMANE JOUALI

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Billet de blog 13 juin 2025

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Le consentement s’apprend : il y a urgence à éduquer

Un élève diffuse une vidéo sexuelle à des camarades et nie toute violence. Ce fait, loin d’être isolé, révèle une ignorance alarmante du consentement et des atteintes à l’intimité. L’éducation à la sexualité ne peut plus être optionnelle : elle est un impératif scolaire et sociétal.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Récemment, dans un lycée, un élève de seconde a filmé un acte de masturbation et a envoyé la vidéo à plusieurs filles de l’établissement. Il a été sanctionné, certes, et rappelé à l’ordre. Mais face aux remarques indignées, il s’est justifié : « J’ai violé personne, donc ce n’est pas une violence sexuelle. »

Cette phrase, brutale dans sa naïveté, en dit long sur l’ampleur du chantier éducatif qu’il reste à mener.

Comprendre ce que sont les violences sexistes et sexuelles

Non, il n’est pas nécessaire de lever la main sur quelqu’un ou de forcer un rapport sexuel pour commettre une violence sexuelle.

Envoyer une vidéo pornographique non sollicitée, se filmer dans un acte intime pour l’imposer au regard d’autrui, c’est déjà une forme de violence. C’est une atteinte à l’intégrité psychologique de la personne qui reçoit, c’est un acte d’intimidation sexuelle, c’est un abus de pouvoir et de corps.

Ce type d’agissement relève du harcèlement sexuel, et potentiellement de l’exhibition sexuelle ou de la diffusion d’images à caractère pornographique à des mineur·es, selon le contexte.

Un fait isolé ? Non. Un symptôme.

Ce n’est ni un dérapage isolé, ni une simple « erreur de jeunesse ». C’est le fruit d’un vide :

– un vide éducatif sur la sexualité et le consentement,

– un vide juridique dans la compréhension des lois chez les jeunes,

– un vide émotionnel dans la construction du respect de l’autre.

En collège, en lycée, mais parfois même à l’école primaire, nous voyons émerger des comportements préoccupants, banalisés, minimisés : propos sexistes, « nudes » échangés, menaces d’exposition, violences symboliques ou physiques dans le cadre du couple adolescent.

Le numérique a décuplé la portée de ces actes : un clic suffit pour blesser, humilier, traumatiser.

L’éducation à la sexualité ne peut plus attendre

Ce cas, parmi tant d’autres, souligne l’urgence de mettre en œuvre une éducation à la sexualité claire, régulière et adaptée à chaque âge, comme le prévoit pourtant la loi depuis 2001.

Cela ne signifie pas parler de sexualité en termes crus à des enfants : cela signifie, dès le plus jeune âge, éduquer au respect du corps, au consentement, à la responsabilité, au droit à l’intimité, à la lutte contre les stéréotypes de genre.

C’est aider les élèves à comprendre que la sexualité, ce n’est pas ce qu’on voit sur les sites pornographiques. C’est apprendre que le respect est une condition, et non une option.

Quelles solutions concrètes ?

Former les personnels éducatifs à repérer, nommer et traiter ces violences.

Intervenir systématiquement face à tout acte sexiste ou sexuel, sans minimiser, sans relativiser.

Associer les familles, les équipes médico-sociales, les associations spécialisées.

Créer un espace de parole sécurisé pour les victimes.

Faire vivre les heures d’éducation à la sexualité, prévues mais rarement appliquées.

Ce que l’école doit dire à ses élèves

Tu n’as pas besoin d’avoir « violé » pour avoir commis une violence sexuelle.

Le respect du consentement, ce n’est pas une affaire d’adultes. C’est un apprentissage qui commence ici, maintenant, à l’école.

Et face à ces violences, le silence n’est plus une option.

Meryam ENNOUAMANE JOUALI 

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.