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Billet de blog 16 février 2012

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Cause toujours, tu m'intéresses

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Au temps de la défunte URSS, au delà du rideau de fer, on avait coutume d’empêcher le citoyen mécontent de la politique du pouvoir d’ouvrir la bouche, et quand il parvenait à émettre un grognement de protestation, on l’intimidait d’un « Tais-toi !» sans appel.

En occident, en revanche, où l’on est libre de dire ce que l’on pense, le citoyen qui veut donner son opinion se heurte à un jovial : « Cause toujours, tu m’intéresses. »

En effet, pour être entendu, il faut avoir la possibilité de s’adresser à ses concitoyens, aux hommes et femmes politiques en charge de notre bonheur, et c’est là que l’on découvre que l’on prêche dans le désert, un désert entretenu, qui défend l’accès à la tribune qui permettrait de faire connaître ses idées.

Même au siècle d’Internet, il faut que l’on sache que M. X a créé son site, et qu’il y exprime son opinion, pour que celui-ci soit visité  et que les idées puissent s’échanger. Mais comment faire savoir au vaste monde que votre site existe ?

Certains ont un accès sans problème aux moyens d’information : les politiques, les « people », les journalistes. Les organes d’information ne donnent pas volontiers la parole aux citoyens, qui ne sont pas, comme on dit pour le cinéma, « bankable ». Dans la mesure où ce qui intéresse le journaliste qui détient le micro ou le stylo, c’est ce qui va déclencher à coup sûr une réaction dans le public des auditeurs ou des lecteurs, qui va faire vendre du papier  votre opinion de citoyen de base ne l’intéresse pas.

N’étant pas connu, vous n’avez aucune chance de l’intéresser. Mais comment se faire connaître ? Ah, si vous étiez le frère d’une chanteuse, le père d’un président, ou la fille d’un assassin connu, les médias vous inviteraient. Vous pourriez aussi vous présenter aux élections présidentielles, tirer sur un homme connu, harceler une femme célèbre, vous promener nu dans la rue, ou faire une tentative de suicide, ratée de préférence, en public. On parlerait alors peut-être de vous, et vous pourriez, si vous avez provoqué assez de scandale, être interviewé. 

Vous pouvez aussi, si vous êtes abonné à Mediapart ou au Monde, tenir un blog, dont personne ne connaîtra l’existence. Le seul moment où vous aurez une petite chance d’attirer l’attention du citoyen-lecteur, c’est celui où le titre de votre billet apparaîtra dans la liste des nouvelles. Mais ce titre aura tôt fait, poussé par les nouveaux billets de vos concurrents, de disparaître dans les profondeurs du site et de retourner au trop plein de titres qui équivaut, de fait, à un néant.

Les élections présidentielles et législatives approchant, et trouvant l’état de la société française inquiétant, j’ai tenté d’identifier les causes du mal, de les analyser et d’en avertir mes concitoyens, les Français de base comme moi.

Cela a donné un livre de 331 pages, auquel j’ai donné le titre explicite : Français, bougez-vous le Q, avec une pointe de pudeur dans la majuscule finale.

Le sommaire propose les titres suivants :

  • 1.    Avant-propos : triste France (p.17 à p.22)
  • 2.    Qu’est-ce que le civisme (p.23 à p.34)
  • 3.    Comportements civiques et inciviques : les problèmes de la société française (p 35 à p 54)
  • 4.    Le comportement de chacun par rapport au civisme (p.55 à p.88)
  • 5.    Les relations inter-générations (p.89 à p.92)
  • 6.    L’éducation dans la famille (p.93 à p.112)
  • 7.    Laïcité et religions (p.113 à p.124)
  • 8.    Les inégalités (p.125 à p.134)
  • 9.    La santé (p.135 à p.160)
  • 10. L’enseignement (p.161 à p.210)
  • 11. Les fonctionnaires (p.211 à 218)
  • 12. Le travail (p.219 à 226)
  • 13. Les médias (p.227 à 234)
  • 14. La justice et la police (p.235 à 258)
  • 15. Les handicapés (p.259 à p.264)
  • 16. La politique (p.265 à p.288)
  • 17. Les Français et les étrangers (p.289 à p.302)
  • 18. Les Français, leurs banques et le capitalisme (p.303 à p.312)
  • 19. L’écologie (313 à 324)
  • 20. Conclusion (327 à 328)
  • 21. Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen du 26 août 1789 

Chaque point comprend l’analyse du problème, ainsi que des propositions pour améliorer la situation.

J’ai doublé cet essai d’un site fait de A à Z par moi-même, que l’on peut trouver à l’adresse ici :  mon site  

J’ai proposé le manuscrit à une quinzaine de maisons d’édition, qui l’ont toutes refusé, « ce texte ne correspondant pas à leur ligne éditoriale ». L’une d’elle a trouvé le projet ambitieux, les autres n’ont rien dit sur le contenu. Ces maisons proposent toutes sortes d’essais de gens plus ou moins connus, dont elles espèrent plus de succès que de celui d’un anonyme comme moi.

On peut bien sûr argumenter : « mon vieux, si personne n’en veut, c’est peut-être parce que ton manuscrit ne vaut pas un clou. »

Pourtant, j’ai eu l’occasion de faire paraître plusieurs bulletins sur mon Blog chez Mediapart,   qui reprenaient en résumé certaines idées traitées dans mon essai. La plupart ont reçu un modeste mais positif écho. Mon dernier bulletin sur les problèmes de l’enseignement et les solutions à apporter m’a valu une quarantaine de réactions, positives pour la plupart. J’ai donc de solides raisons de penser que le problème n’est ni le sujet, ni la qualité, et qu’il est lié au système de la diffusion de l’information.

Mon livre a fini par paraître chez Edilivre .

J’en ai fait tirer une vingtaine d’exemplaires à mes frais, que j’ai envoyés aux médias suivants :

  • Rédaction de France Inter
  • Rédaction de France Info
  • Rédaction de RTL
  • Rédaction d’Europe 1
  • Rédaction de RMC / M. J.J. Bourdin
  • Rédaction de France 2
  • Rédaction de France 3
  • Rédaction d’ Arte
  • Rédaction du Nouvel Obs
  • Rédaction du Point
  • Rédaction de L’Express
  • Rédaction de Libération
  • Rédaction de Le Monde
  • Rédaction de 20 minutes
  • Rédaction de la Provence
  • Rédaction de Mediapart

 Aucune de ces rédactions n’a réagi. Pas d’accusé de réception, absolument aucun écho, pas même négatif. Les 16 exemplaires ont disparu, sans bruit, sans trace, dans une quelconque poubelle. Peut-être l’un d’eux sert-il à caler une table de rédaction dont un pied est trop court, ou se trouve sous les fesses d’un journaliste de petite taille pour le rendre optiquement plus imposant ?  C’est à se demander si je les ai vraiment envoyés.

Un 17e avait été envoyé à M6. Il m’est revenu pour cause d’adresse incomplète…

Le citoyen de base, même s’il se sent concerné, même s’il dépense plusieurs mois son énergie, et une partie de ses économies, pour s’adresser aux citoyens responsables qui l’entourent, a donc le plus grand mal à se faire entendre.

 Cela fait d’autant plus mal lorsque l’on voit que les problèmes analysés dans l’essai sont toujours présents. L’incivisme ambiant est toujours là, les inégalités perdurent. Les affaires touchant des hommes politiques s’accumulent. Les politiciens continuent leurs coups bas, se glorifient toujours de résultats qu’ils n’ont pas atteints. Des journalistes traquent la petite phrase, les vacheries, les petites mesquineries. Ils montent en épingle des événements anodins, passant sous silence les  problèmes qui intéressent vraiment les Français. Le président veut « une France forte », alors qu’il l’a affaiblie pendant des années. Il croit fermement qu’il a sauvé la France, l’Europe, le monde même alors qu’il s’est beaucoup agité sans beaucoup de succès. L’insécurité grandit : on essaie de nous dissuader de porter plainte, pour ne pas aggraver les statistiques déjà mauvaises. On essaie de monter les Français contre les étrangers, puis contre les Français « d’origine étrangère », voire ceux qui travaillent contre ceux qui sont au chômage. Le nombre de chômeurs est en constante progression, le niveau de vie baisse, la balance des paiements n’a jamais été aussi déficitaire, les dettes menacent de nous précipiter dans un état proche de celui de la Grèce, mais on nous explique que tout va bien, ou du moins, que tout irait plus mal si d’autres étaient à la barre. Que l’on aurait tenu ses promesses sans la crise. C’est la faute de l’euro, de la mondialisation, de la crise, pas des politiques, même si, malgré ces trois fautifs, d’autres pays s’en sortent mieux.

On voit bien que, l’important, c’est d’être élu. L’homme politique considère qu’une fois élu, il a atteint son but alors que si les Français l’ont choisi, c’est pour qu’il agisse. C’est donc un début, et non pas la fin d’un processus. Une fois élu, il faut qu’il se mette sérieusement au travail.

 Il est grand temps que tout le monde prenne conscience de la gravité de la situation. Il faut que chacun y mette du sien. Et au moment du choix, il ne faut pas se laisser abuser par les discours, même s’ils sont beaux et poétiques. Ce qu’il faut, c’est quelqu’un qui agisse dans l’intérêt de tous, et surtout pas un agité, un gesticulateur, quelqu’un qui confond politique et marketing, qui, au lieu de mener une politique réfléchie, fondée, cohérente, et juste, veut nous vendre ses boniments en appliquant des méthodes de publicitaires, pour qui la forme prime sur le fond.

 Il est temps, chers concitoyens, que nous fassions entendre la voix de la raison, que nous rappelions aux politiques notre devise : Liberté, Egalité, Fraternité, à laquelle nous rajouterons Laïcité. Il est temps que nous rappelions aux journalistes que ce qui nous intéresse, ce sont les idées, les projets et non pas les procédés de vendeurs de vent. Et il est temps que nous secouions  un peu les autres citoyennes et citoyens, pour qu’ils arrêtent de prendre des vessies pour des lanternes, et considèrent des prestidigitateurs et montreurs de marionnettes comme des politiciens.

Les politiques ne s’intéressent qu’à une seule voix du citoyen: celle qui s’exprime dans les urnes et qui, une fois le vote terminé, doit se taire pendant toute la durée de la législature. Mais nous en avons une autre, qui demande des explications, qui exige des résultats. Faisons en sorte qu’elle ait enfin voix au chapitre.

 Lisez, la semaine prochaine : Vous êtes bon à rien ? Lancez-vous dans la politique !

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