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Billet de blog 29 décembre 2012

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Paris : de l'accessibilité partagée au monopole d'accession

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Sauf pour Quimper (supériorité) et Rennes (égalité sur la direction de Paris) , les capacités d'accession de Brest aux autres villes-TGV sont très inférieures à celles de Paris, qui profite à fond de son monopole d'accession rapide.

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Le train a divisé par douze, puis quarante, le temps d'accès à Paris, par rapport au temps mis jadis par les voitures attelées. En 1865, Brest, qui était à huit jours de la capitale, s'est rapproché à 16 h et, cent quarante ans après, à 4 h 30. Le train a rendu ainsi Paris accessible à l'ensemble des villes de France, pour peu qu'elles se situent sur une ligne directe.

C'est ce qu'on peut appeler l'accessibilité de Paris, sa capacité d'être jointe, plus ou moins bien partagée, mais réelle.

On regarde moins souvent les choses dans l'autre sens, celui qui correspond aux capacités pour une ville de joindre elle-même les autres, qu'on pourrait appeler sa capacité d'accession. Dans cet article, l'accessibilité d'une ville qualifie ce qui en permet l'accès aux autres, tandis que sa capacité d'accession est ce qui lui permet d'accéder aux autres.

L'accessibilité et l'accession peuvent en pratique se recouper : la facilité d'accès en train de Saint-Nazaire à Paris est - aux horaires près - la même que la facilité d'accès de Paris à Saint-Nazaire. Les vitesses sont comparables dans un sens et dans l'autre. Mais cette égalité dans le duo est la source de grossières erreurs d'appéciation.
Les choses changent en effet du tout au tout si on considère non plus deux villes l'une par rapport à l'autre, mais trois ou plus entre elles toutes.

Les accessibilités réciproques sont généralement assurées :

     . en 2 h entre Paris et Nantes (382 km1),

     . en 2 h entre Paris et Lyon (464 km),

     . en 3 h 15 entre Paris et Bordeaux (583 km),

     . en plus de 5 h entre Nantes et Bordeaux (327 km),

     . entre 4 h 30 à 6 h (5 h retenus) entre Nantes et Lyon (666 km),

     . en 6 h 30 entre Bordeaux et Lyon (554 km),

Mais en comparant les vitesses - plutôt que les temps influencés par la distance - on peut constater que :

     . Paris accède à 197 km/h en moyenne simple à ses trois consoeurs,

     . Lyon accède à 125 km/h en moyenne aux trois siennes (106 km/h hors Paris)

     . Nantes accède à 115 km/h en moyenne aux trois siennes (99 km/h hors Paris) ,

     . Bordeaux accède à 99 km/h aux trois siennes (77 km/h hors Paris)

Les capacités moyennes d'accession de Lyon, Nantes et Bordeaux aux autres villes, mesurées par les vitesses d'accès, sont ainsi inférieures de 37 % (pour Lyon) à 50 % (pour Bordeaux), aux capacités d'accession de Paris à l'ensemble des autres villes citées. Le handicap s'élève à 46 % (pour Lyon) et atteint 61 % (pour Bordeaux) si on sort Paris de la comparaison. Encore ces calculs ne prennent-ils pas en compte la régularité et la fréquence des liaisons avec Paris, qui amplifient en pratique la distorsion.

Que ces chiffres ne soient jamais cités dans les articles traitant de l'aménagement du territoire, ni dans les discours de nos responsables politiques, en dit long sur l'état de la réflexion sur le sujet, et plus encore sur le suivisme des rédacteurs de ces articles ou discours, qui répugnent moins à faire état des gains escomptés sur les liaisons avec Paris, lesquelles n'avantagent réellement que Paris comme nous venons de le voir.

Le constat massif qui manque au paysage, c'est celui de l'énorme handicap d'accession des villes "de province", handicap construit par l'arrivée des trains en étoile sur le territoire français et son aggravation par l'accélération continue des liaisons radiales au détriment des liaisons transversales (de proximité comme de plus long cours).

Car, beaucoup plus que l'accessibilité, c'est la capacité d'accession qui favorise la création d'activités, et donc d'emplois.

Le créateur d'activités à la recherche d'une bonne localisation ne regarde pas plus de cinq minutes les conditions d'accessibilité d'une ville candidate. Il regarde en revanche avec attention la carte de ses capacités d'accès au reste du territoire couvert par son activité envisagée. Les villes-carrefours l'intéresseront davantage que les villes bout-de-ligne, et ce d'autant plus que ces villes-carrefours proposeront des possibilités d'accès rapide dans plusieurs directions. La position de Paris sur les boucles de la Seine et au confluent de plusieurs affluents explique l'émergence d'une grande ville à cet endroit. Mais c'est d'en avoir fait le carrefour national des voies rapides ferroviaires qui explique que cette grande ville ait réussi à rassembler  dans ses murs et ceux de sa banlieue - cas unique en Europe, surtout dans un territoire très ouvert - le cinquième de la population française. Y avoir ajouté le carrefour national des voies aériennes a conforté son avantage concurrentiel. Et les capacités d'accession via Paris confortent simplement le "décideur" dans le constat de la supériorité de Paris pour son installation.

Les zélateurs des TGV/LGV comme outil de rabattage des passagers aériens vers les plateformes parisiennes ont tout compris, mais ...à l'envers. C'est la capacité d'accession à partir de nos sites qu'il faut élever. Non seulement les navettes coûtent cher, mais elles confortent l'avantage de situation du concurrent le plus favorisé !

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(1) - Les distances indiquées entre parenthèses sont les distances routières fournies par ViaMichelin, la SNCF ne fournissant pas d'indication de distances sur son site Voyages.sncf.  

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