Avant-propos
Depuis le 7 octobre 2023, les chiffres et les statistiques de Gaza cinglent les oreilles. Ils se dispenseraient de commentaires par leur énormité. Pas de trêve olympique pour la population de Gaza, mais des records de destruction et de bombardements rappelant la fin de la IIe Guerre mondiale, la guerre de Corée et celle du Vietnam. Ces chiffres seraient-ils porteurs de nouveaux paradigmes dans cette tragédie qui secoue le Moyen-Orient ?
Le 7 août 2024, l’UNICEF[1] recense 39 623 tuées et 91 400 blessés à Gaza. Le bilan ne serait pas complet en oubliant la douzaine de milliers de personnes portées ensevelies sous les décombres ou « disparues ». Soit près de 145 000 victimes. In fine, une journée moyenne de bombardement de l’armée israélienne coûte la vie entre 139 à 169 civils, dont 60 % de femmes et d’enfants.
Cette comptabilité morbide comprend « les terroristes » du Hamas et leurs alliés tués au combat. À la mi-juillet, leurs pertes étaient estimées à 16 000[2]. « Le droit à se défendre » d’Israël autoriserait ainsi l’élimination « collatérale » d’un peu plus de deux victimes civiles pour chaque jour de combat et par « terroriste » ?
Les destructions matérielles ne sont qu’un pendant des pertes humaines. Plus de 60 % du parc immobilier est détruit ou gravement endommagé soit près de 151 265 bâtiments. La quasi-totalité des écoles et des hôpitaux sont inutilisable[3] et continuent à être bombardés parce que « centre de commandement ou de regroupement » des dirigeants « terroristes » et leurs hommes.
Le volume de décombres frôle les 42 millions de mètres cubes, soit 114 kilos de débris par mètre carré[4]. À cela, il faut rajouter les 330 000 tonnes de détritus recensées, soit l’équivalent de 150 terrains de foot. Ce volume augmente de 2000 tonnes par jour et inquiète même les autorités israéliennes[5].
Sur le plan militaire, la mobilisation de 200 000 réservistes israéliens sur 465 000 n’aura pas suffi à venir à bout des 20 000 à 30 000 combattants du Hamas et alliés après 309 jours de combats. Ces derniers auraient perdu de 75 à 50 % de leurs effectifs ! Ce ratio de pertes, selon des experts, est un indicateur de capitulation ou de débandade d’une force militaire organisée. La « victoire totale » et « l’éradication » du Hamas ne sont pas encore à l’ordre du jour[6] !
Les signes de distinction n’ont pas tardé à l’encontre des responsables israéliens : le Premier ministre Netanyahou et son ministre de la défense Yoav Gallant puis leurs homologues du Hamas, Yahya Sinouar, Mohammed Deif (décédé, semble-t-il, au cours d’un bombardement) et Ismaïl Haniyeh (assassiné à Téhéran par des « inconnus ») reçoivent collectivement une demande d’arrestation de la Cour pénale internationale pour crimes de guerre.
Des manifestations se déroulent un peu partout dans le monde contre la guerre.
En Israël, celles des parents d’otages israéliens avec jusqu’à 150 000 personnes[7] en juin 2024 rejointes par celles des Haredim, secte juive ultraorthodoxe, qui « préfèrent mourir » plutôt que de servir dans l’armée israélienne.
À l’étranger, c’est la jeunesse universitaire qui manifeste « pour une Palestine libre, pour le cessez-le-feu et contre le génocide ». Le Congrès américain est envahi au mois de juillet 2024 par des dizaines de manifestants de la « Voix juive pour la paix », lors de la visite de Netanyahu, pour l’arrêt du conflit et « laissez Gaza vivre ». Pour le Premier ministre israélien, ce sont des agents du Hamas et de l’Iran[8].
L’autre facette de ces manifestations est la montée nauséabonde de l’extrême droite israélienne via les exactions des colons dans les agglomérations palestiniennes, des tentatives de libération par la force de soldats arrêtés pour torture de prisonniers palestiniens. Ces tentatives ont lieu dans des bases militaires et sont soutenues par des membres du gouvernement et de la Knesset. Ces derniers justifient les exactions, les viols et la famine comme nécessaires dans leur lutte contre Hamas[9].
Le coût du conflit s’élèverait à la mi-août à plus de 84 milliards dollars[10]. Il est calculé à partir des chiffres du ministère des Finances israéliennes du mois de mai, pour une journée de guerre. En comparaison, la guerre de Corée a coûté un plus de 50 milliards de dollars pour trois ans de conflit[11]. La guerre du Vietnam a coûté 120 milliards de dollars[12] pour quatorze ans.
Le conflit entraîne le déplacement de centaines de milliers de personnes dans la bande de Gaza : 95% de la population aura été déplacée au moins une fois, voire plusieurs. Les évacuations à grande échelle touchent aussi les Israéliens proches des fronts de Gaza et de la frontière libanaise.
Des entreprises commencent à délocaliser pour « prévenir le pire ». Les investissements sont à la baisse.
Ces statistiques, aux calculs souvent biaisés, sont une fois encore la démonstration de l’adage de Clausewitz que la guerre est la « continuation de la politique par d'autres moyens ». Une politique, précisons-le, menée sous la forme d’une guerre entre États. Pourtant, l’État d’Israël répondait ici à une agression « terroriste », non celle d’un État ou d’un « proto-État », mais à celle d’une organisation politico-militaire islamique, le Hamas, pour la libération de la Palestine.
Le Hamas fut encouragé à sa naissance par ses détracteurs israéliens pour mettre en échec le mouvement national palestinien laïc, représenté par l’OLP et le Fatah sur le territoire de Gaza. Même l’université islamique à Gaza leur est redevable.
La créature Hamas a échappé à son deus ex machina et a pris ses marques. Elle prétend anéantir son bienfaiteur et devient de facto son interlocutrice principale. Depuis 2017, elle ne prétend pourtant plus qu’à une partie du territoire de la Palestine !
Dans ce face-à-face, les notables de l’OLP et du Fatah, représentés par Mahmoud Abbas, si prompts à négocier lors des Intifadas, sont déconsidérés auprès de la population palestinienne à Gaza et les territoires occupés. La population par ailleurs ne soutient pas majoritairement le Hamas.
Le dialogue est là, meurtrier et musclé entre les deux camps inégalement armés. Un dialogue qui se déroule sur le dos des populations palestinienne et israélienne.
Les otages israéliens sont traités par leur gouvernement avec le même mépris et cruauté que la population palestinienne. Abattre des otages qui se rendent, drapeau blanc à la main, à leur armée, révèle-t-il d’une « erreur tactique » israélienne ? Se distingue-t-elle des bombardements de la population palestinienne au sein de laquelle se trouvent ces otages ? Ou seraient-elles les victimes de la fameuse directive « Hannibal » ?
La mort d’otages ou de prisonniers tués par le « feu ami » n’est pas nouvelle. L’exemple de soldats américains, prisonniers de guerre vitrifiés par les explosions à Hiroshima et Nagasaki en est un exemple resté bien discret.
De part et d’autre, les populations civiles sont la « chaire à patron et à canon » au gré des évènements. Des victimes collatérales dans le jargon militaire.
Le chiffrage, comparaisons et ratios, veut analyser les impacts immédiats ou ultérieurs sur les populations civiles. Une comptabilité soumise aux soubresauts de la politique interne de la région et internationale, la crise économique en tâche de fond avec sa compétition entre les grandes puissances et toujours en filigrane le dépeçage du Moyen-Orient après la 1re Guerre mondiale.
Le maître d’ouvrage est la puissance incontestée de la planète, les États-Unis. Ils fournissent 65,6 % des livraisons d’armes à Israël. Cette aide militaire est continue depuis 1947 et s’élève à plus de 165 milliards de dollars[13]. Très modestement suivi par des acteurs de second ordre tel que l’Allemagne avec 29,7 % des livraisons d’armes, l'Italie avec 4,7 % des livraisons d’armes, et à petite échelle la Grande-Bretagne, et la France, la Chine, les pays arabes, l’Iran et leurs alliés locaux.[14]
Gaza
La bande de Gaza s’étend sur 365 km². Un bout de terre, riche d’une histoire millénaire et dynamique au carrefour de l’Afrique et de l’Asie. Elle se situe à l’ouest de l’Asie, qu’il est convenu d’appeler le Moyen-Orient ou le Levant. Ce territoire compte 2,375 millions d’habitants, dont 70 % de réfugiés issus de toute la Palestine de 1947 et leurs descendants. Une population qui se côtoie sur une longueur de 41 kilomètres et une largeur entre 6 à 12 kilomètres, soit l’une des plus fortes concentrations de population au monde et des plus dépourvues.
Le revenu journalier moyen jusqu’en octobre 2023 se monte à 13 dollars contre 82 dollars pour Israël. Le taux de chômage était de 30 % pour les hommes et plus de 50 % pour les femmes.
La rive méditerranéenne à l’Ouest est patrouillée par la marine israélienne … pour limiter la zone de pêche. Au Nord et à l’Est, des points de passage hautement sécurisés sont intégrés dans une barrière de sécurité d’une valeur d’un milliard de dollars. Les miradors et barbelés sont contrôlés par l’infanterie israélienne et des gardes-frontières, équipés du dernier cri de la télédétection et du tir automatique. Au Sud, l’armée égyptienne laisse passer au compte-goutte les habitants malades et les binationaux par son territoire.
Les autorités égyptiennes, en accord avec leurs collègues israéliens, ont installé force, plaques d’acier souterraines et autres détecteurs pour tenter de restreindre le flux de marchandises et d’armes en sous-sol. Avec un succès très relatif.
Le système des tunnels mis en place par le Hamas sous la bande de Gaza est surnommé le « métro ». C’est dire sa dynamique. Les tunnels auraient utilisé plus de béton et de ferraille que les habitations en surface. Même des voitures y passent ! L’observateur peut s’interroger sur la qualité et la quantité de la circulation des marchandises en circulation. Les équipements militaires aux mains du Hamas suggèrent un certain niveau de connivence entre les autorités égyptiennes et israéliennes pour être passés à ce point inaperçus depuis 2005. L’affirmation de la mi-août d’un porte-parole de l’armée israélienne sur la destruction en une semaine de cinquante tunnels, le long de la frontière avec l’Égypte,[15] laisse dubitative. Un tunnel non détecté, tous les 250 mètres, le long de la frontière durant tout ce temps !
Le Hamas se permettait, avant le 7 octobre, de valoriser, dans un reportage sur Al Jazeera, ses capacités de recyclage d’obus de gros calibre récupérés sur des navires de guerre anglais de la 1re Guerre mondiale, coulés au large de Gaza. Les obus sont reconvertis en roquettes expédiées sur Israël[16]. Ce recyclage s’est encore accentué depuis le 7 octobre avec 5 à 10% des munitions israéliennes non explosées[17].
Paradoxalement, la construction d’abris contre les bombardements ou des centres d’aides à la population gazaouie est peu ou prou évoquée et probablement inexistante. Les habitants prennent eux-mêmes les choses en main lors des ripostes israéliennes.
Dans cette prison à ciel ouvert selon les uns, camp de concentration pour les autres, le Hamas contrôle étroitement la vie quotidienne des Gazaouis, loin d’être majoritairement en accord avec cette mainmise sur leur vie quotidienne.
Toute opposition est écartée de gré ou de force. Les actions militaires ou non de cette « résistance » échappent à tout contrôle de la population qui fait les frais des réactions israéliennes. Le Hamas s’excuse quelquefois « auprès de son peuple » de la « gêne occasionnée ». Les mobilisations populaires autonomes sont récupérées et réorientées vers ou par l’activité militaire dont l’expression la plus courante est un bombardement aux roquettes sur Israël. La population de Gaza n’est jamais sollicitée pour s’armer et résister collectivement à l’envahisseur israélien. C’est le Hamas qui décide tout comme auparavant l’OLP. En 2018-2019 cela consistait par exemple en de grandes « marches du retour » devant la barrière de sécurité avec force pneus enflammés et plus de 200 morts et des milliers de blessés[18] ou alors des lâchers de cerfs-volants en flamme vers Israël.
Le conflit
Ce 7 octobre 2023, une partie des défenses et obstacles de « l’enveloppe sécurisée » de Gaza vole en éclat. Des attaques militaires ciblées, des massacres et des enlèvements de civils et militaires sont commis à plusieurs kilomètres de la bande par les miliciens du Hamas et leurs alliés. L’armée israélienne, si confiante dans ses capacités, reçoit là un retour d’expérience « inattendu ». La stratégie des « terroristes » ressemble à « petite échelle » à la sienne.
Les autorités civiles et militaires israéliennes ont autorisé la tenue du festival Supernova à Réïm, à la suite de son annulation dans le sud d’Israël, deux jours avant l’attaque. Une décision anodine si ledit festival ne s’était pas retrouvé à proximité immédiat du QG général de la Division de Gaza (143e division Fire Fox) en charge de la « garde » de Gaza. Cette base est l’une des principales cibles du Hamas. Le massacre des 364 festivaliers du 7 octobre aurait-il eu lieu si l’évènement s’était tenu dans un endroit moins « stratégique » et exposé ? La réalité du « bouclier humain » est-elle applicable dans ce cas pour les autorités militaires israéliennes ?
Cela peut paraître même moins paradoxal en examinant les autres sites pris d’assaut par le Hamas : Sufa, Nerim, Be’eri, Nahal Oz et Sdérot, situés sur un arc de près de 80 kilomètres des limites est de Gaza. Ces communes servent d’axes de pénétration aux attaques du Hamas, par tentative d’infiltration, par tunnel, voire par parapente en 2014. Toutes ces attaques furent liquidées ou repoussées par l’armée israélienne[19].
Ce 7 octobre 2023, ces mêmes communes subissent les plus grosses pertes humaines et militaires et les parapentes sont opérationnels. Elles sont à portée de mortiers moyens et lourds, des roquettes, des armes antichars tirées de Gaza et une nouveauté technique, les drones. À quel type de stratégie appartient une telle concentration civile (renforcé par un festival) à proximité d’un « front » et d’installations militaires ?
Les autorités israéliennes ont largement joué des aspects les plus abjects de cette attaque terroriste, soutenues en cela par de multiples médias de par le monde. Les "classiques" dans ce type de contexte : décapitation de bébés, femmes enceintes, éventrées, viols, cadavres brûlés, etc. Ces « preuves » sont de plus en plus contestées par des sources israéliennes et étrangères. Paradoxalement, les enquêtes « indépendantes » sont soigneusement « cadrées » par ces mêmes autorités[20]. Même la visite des blessés est soigneusement filtrée[21].
La date de l’attaque se veut symbolique : le 7 octobre 1973, jour de reconquête du canal de Suez par l’armée égyptienne. Elle servit de paravent au dialogue égypto-israélien, prémisse à la paix signée par le tandem Sadate-Begin en 1979. Le Hamas envisage-t-il cette ultime étape avec son ennemi ?
Comme l’attaque du canal de Suez en 1973, celle de Gaza de 2023 est moins surprenante qu’il n’y paraît. L’examen attentif des évènements politiques et militaires, à partir de l’évacuation unilatérale de Gaza par l’armée israélienne en 2005, sous la houlette d’Ariel Sharon, permet de saisir pour partie sa genèse et son déroulement. Les indices les plus visibles, cités par les spécialistes et observateurs militaires, réfèrent à l’amélioration tactique des groupes de combat du Hamas et de ses alliés. Les engagements, depuis l’évacuation de 2005, sont progressivement plus sévères, plus coûteux en hommes et en matériel, même si Israël garde le dessus[22].
À échéance du 7 octobre 2023, l’armée israélienne applique ses habituels « piliers doctrinaux » à savoir la « tonte de pelouse » d’Efraim Inbar et Eitan Shami de 2013[23] , « la doctrine Dahiya » de Gadi Eizenkott de 2008[24] et la discrète directive « Hannibal » du trio Yossi Peled / Gabi Ashkenazi / Yaakov Amidror de 1986[25]. Se rajoute à cela l’utilisation d’outils d’intelligence artificielle « pour optimiser le ciblage » dont le fameux Habsora (Évangile !) dont la tolérance d’une dizaine de victimes collatérales jusqu’au 7 octobre pour éliminer un membre exécutif du Hamas, passe à plus d'une centaine pour en neutraliser un membre subalterne[26].
Un document du Hamas de la fin 2022, tombé entre les mains des autorités israéliennes, intitulé « Le Mur de Jéricho »[27], reprenait point par point le scénario qui se déroule le 7 octobre, ne remit pas en cause ces approches doctrinaires et l’usage de la boîte à outils. Ce document est jugé irréaliste ou, très prosaïquement, « non réalisable par les troupes du Hamas » !
Ce manque de pertinence est inhabituel dans la politique « préventive » de l’état-major israélien et d’autres « services » depuis la « campagne libanaise » de 2006. Peut-on y lire une baisse de productivité des sphères dirigeantes de l’armée israélienne ? L’omniprésence américaine en début de conflit à la direction de l’armée israélienne serait-elle liée à cette déficience ?
L’usage des doctrines et des boîtes à outils est sans résultats probants sinon des massacres de civils palestiniens et israéliens, des destructions matérielles dont la majorité des 36 hôpitaux et écoles de Gaza traités comme des repères du Hamas. Au bout de plusieurs mois de combats, les forces israéliennes n’ont toujours pas « éradiquer » le Hamas dont « l’esprit reste présent » et les combattants également. « Les animaux humains » sont toujours là et le cabinet militaire israélien a disparu, confronté à la crise politique israélienne. Les familles d’otages manifestent pour un cessez-le-feu, la libération de leurs proches, la fin de la guerre et pour la démission de Netanyahu. Ces manifestations qui vont crescendo se renforcent par l’entrée en scène « politique » des juifs Hasidim qui refusent le service militaire au nom de leur foi. 10 000 d’entre eux seraient à instruire et à intégrer dans les forces armées ! La mobilisation des réservistes israéliens ne suffirait-elle plus ?
Nombre de ces réservistes refusent ou en tout cas, tentent d’éviter une deuxième affectation à Gaza. Le taux de présence est passé de 100% à 70%[28]. Les 26 000 professionnels de l’armée israélienne suffiront-ils à terme ?
L’armée israélienne consomme quotidiennement, toutes armes confondues, une quantité de matériel supérieure aux conflits précédents. Pourtant, elle se trouve en face d’une « armée » moins nombreuse, sans tanks ni aviation et loin de ses capacités de réserve et logistique.
Jusqu’à la fin juin 2024, l’armée israélienne aura reçu 173 livraisons d’armes par 230 cargos aériens du type C-17 et une vingtaine de navires[29]. Ces livraisons ne comprennent pas celles arrivées avec les visites du secrétaire à la Défense Lloyd Austin ou d’éventuels cargos en sous-traitance avec l’armée américaine. L’armée israélienne nécessite tous les deux jours l’équivalent d’un peu plus d’une livraison d’armes. Elle peut aussi bénéficier des stocks de l’armée américaine prépositionnés en Israël pour des conflits potentiels dans la région. Cela ne change pas la donne pour une armée considérée par certains comme « l’une des meilleures et la plus morale armée du monde ». À tout égard, son « économie des moyens » se réduit. Assiste-t-on au « croisement des courbes d’intensité stratégique » cher à Svetchine[30] ?
Ces livraisons sont doublées par un inhabituel « parapluie américain » : deux porte-avions puis trois depuis quelques semaines, avec des escadres et celle, omnisciente, du secrétaire à la défense Lloyd Austin en début de conflit. Sans oublier la noria de conseillers et d’instructeurs militaires. Le ministre de la Défense américaine Austin aurait-il présidé à la création du cabinet de guerre ?
Depuis le 6 août, le chef du Commandement militaire américain pour le Moyen-Orient, Michael Kurilla, est arrivé en Israël pour finaliser les préparatifs en réponse d’une probable attaque iranienne et ses Alliés, avec Herzi Halevi, chef d’état-major de l’armée israélienne[31].
Est-ce la réponse à la baisse de productivité de l’armée israélienne, sous perfusion américaine, ou signifie-t-elle une intervention plus musclée de l’impérialisme américain dans la région ? Ou les deux peut-être ?
La construction de la jetée « humanitaire » d’un montant de 320 millions de dollars sur les rivages de Gaza est-elle intégrée à ce dispositif ? Se veut-elle la continuité d’une fiction entretenue par les autorités américaines sur « nos boys » qui ne combattent jamais directement avec l’armée israélienne … tout en les soutenant inconditionnellement ? Les multiples démantèlements volontaires ou « involontaires » de cette structure, les réparations dans le port israélien d’Ashdod (au lieu d’Ashkelon plus proche !) et son « abandon » ne laissent toujours pas deviner la finalité « politique » de cette jetée. Sa vocation « humanitaire » n’est même plus sujette à caution[32].
Victimes civiles
L’attaque du Hamas se chiffre à près de 1 200 victimes civiles et militaires (sans tenir compte des blessés) et plus de 200 otages de tout âge, de sexe et de nationalités différentes. À ce jour, près de 40 000 à 52 000 personnes sont mortes sous les bombardements israéliens dans le cadre de son opération militaire « Épée de fer ». L’écart entre les deux chiffres est lié au nombre de victimes encore ensevelies sous les décombres ou disparues. Pour chaque victime israélienne, il y aurait donc 30 à 40 victimes palestiniennes.
Cette ponction mortifère sur la population gazaouie correspondrait entre 1,7% et un peu plus de 2% de ses habitants à ce jour.
Des chiffres qui, sans prétendre au génocide, correspondent au plus important massacre au Moyen-Orient depuis 1947. En d’autres périodes et continents, des massacres de même type furent exécutés à toute autre échelle sans porter le qualificatif de génocide :
- « Le viol de Nankin » en Chine en 1937 par les troupes japonaises compte entre 200 000 et 300 000 victimes.
- Les bombardements et massacres de Sétif en Algérie le 8 mai 1945, par l’armée française et ses milices comptabilisent entre 30 000 et 45 000 victimes.
- L’écrasement du soulèvement de Varsovie par l’armée allemande en 1944 totalise 200 000 tués civils (30 à 40 000 rien que pour les 5 et 6 août) et 15 000 insurgés[33].
- Les bombardements alliés de la IIe Guerre mondiale sur l’Allemagne et le Japon ont totalisé pour certains plus de 100 000 victimes civiles en une seule journée !
À Gaza, il ne s’agit pas « d’éradiquer » le Hamas, mais de l’affaiblir militairement et de soumettre la population palestinienne à la volonté d’un occupant. Le rapport de force se doit d’être en faveur d’Israël. Du côté palestinien, une autorité, le Hamas, doit être capable de mettre au pas « sa population » quand cela est ou devient nécessaire. Le Hamas reste à ce titre en phase avec les autorités israéliennes. La table des négociations est balisée par le rapport de forces qui se mettra en place à l’instigation du gouvernement américain. Il est paradoxal de réclamer un cessez-le-feu, pourtant indispensable à la population. Il n’entérinera qu’un statu quo dont les acteurs restent les mêmes.
Les accords en vue se réaliseront, vraisemblablement, hors et contre les revendications des populations palestiniennes et israéliennes à Doha et en Égypte. Les intermédiaires qataris et égyptiens assureront le dialogue, avec le secrétaire d’État américain, secondé par le directeur de la CIA et un spécialiste du Moyen-Orient de la Maison-Blanche. Ils seront en compagnie de responsables du Mossad et du Shin Bet. La délégation du Hamas négociera à partir de locaux proches.
Les pertes militaires
L’armée israélienne admet à la mi-juillet la perte de 700 hommes : ceux morts le 7 octobre et les 330 soldats tués à Gaza.
Du côté du Hamas, la fourchette de pertes proposée par les experts militaires se situe entre 10 000 et 17000 combattants. D’autres expertises se réfèrent à un ratio : un soldat israélien tué pour 20 à 40 combattants du Hamas. Un calcul qui amène cette fourchette de 6520 à 13040 combattants tués.
Cette variabilité entre les chiffres plafonds et planchers montre la difficulté d’obtenir une évaluation vraisemblable des pertes du Hamas. A contrario ceux de l’armée israélienne semblent sous-évalués sans appeler des commentaires.
Plus significatif est le ratio de perte par le « feu ami » dans le camp israélien. Un soldat sur cinq est tué par ses camarades de combat jusqu’au mois de mai ![34] S’agit-il d’une baisse du niveau tactique israélien ou d’un manque d’adaptation des nouvelles recrues ?
En dépit d’une mobilisation de près de 200 000 hommes, le manque d’expérience des conscrits israéliens, même après trois ans de service militaire, ne semble pas suffisant dans ce conflit. Ils n’ont pas connu les conflits précédents à Gaza. L’encadrement des vétérans n’est pas là. Les sous-officiers manquent à l’appel en raison de leur départ pour la vie civile. Les 26 000 professionnels de l’armée n’y suffisent pas. Tout comme la présence massive de l’aviation et de l’artillerie, des exactions, la répression et les exécutions.
La propagande militaire officielle a également évolué. La dynamique propagandiste du Hamas, diffusée et commentée largement par la chaîne Al-Jazeera[35], est axée sur un aspect offensif et guerrier, au plus près des combats et des cibles choisies. Elle s’adresse même aux parents des otages à certains moments. Du côté israélien, les reportages sont des plus « banalisés ». Les soldats se « déplacent » dans les ruines ! Ils tirent sur des cibles invisibles ou manœuvrent leurs chars sans but apparent dans la poussière des hélicoptères qui évacuent les blessés. Pas de prises de guerre, pas de photos d’ennemis tués, pas d’interviews de « héros ». Encore moins de remises de médailles. Quelques fois des enterrements. Une innovation sur le terrain : l’utilisation de prisonniers palestiniens attachés par deux en rang et à moitié nus. Blessé parfois, et en chaussettes, cet équipage sert de bouclier humain pour déminer et sécuriser le terrain des groupes de combat d’élite. L’homme, en deuxième position de cette cohorte, porte une caméra embarquée, reliée à un PC pour recevoir les ordres. Cette tactique éviterait la perte des chiens démineurs.
Les réseaux sociaux et les boucles privés prennent le relais pour vanter des exactions commises sur les personnes et les biens palestiniens. Des hommes aux mains liées, les yeux bandés et en slip à genoux et têtes baissées, rappellent plutôt la prison américaine de sinistre mémoire d’Abou Ghraib en Irak, remplacée ici par la prison militaire de Sdei Teiman avec ses 3 000 prisonniers. Des médecins israéliens en service dans les lieux s’interrogent sur la présence de paraplégiques durant des interrogatoires musclés et rythmés par des abus sexuels. Une nécessité selon des membres du gouvernement israélien[36].
Cette « retenue » dans les reportages militaires est devenue lieu commun même lors des réunions du gouvernement Netanyahu. Des participants sont soigneusement « floutés », d’autres portent des cagoules ! Les documents et les écrans sur les tables sont également « invisibles ». Idem pour les « tournées des popotes » du Premier ministre ou du ministre de la Défense qui sont souvent en chemise noire (!). Que signifient ces mises en scène ?
Sous les bombardements aériens et les tirs d’artillerie
Le résultat de bombardements sur une population civile est toujours dramatique et sanglant. Dans le cas de Gaza, depuis le 7 octobre, une analyse plus fine appelle à la réflexion sur les spécificités du conflit qui détonne par sa durée et ses changements quantitatifs et qualitatifs. Tous les chiffrages se retrouvent sur des courbes ascendantes.
Les références à la puissance explosive et au nombre de victimes, en matière de bombardement, restent à ce jour les explosions nucléaires américaines au-dessus des villes japonaises d’Hiroshima et de Nagasaki en août 1945.
Pour la première, la fission de l’uranium provoqua une explosion de 13 à 16 kilotonnes. Pour la deuxième, la bombe quoique de puissance supérieure (21 à 23 kilotonnes) et au plutonium, fit moins de victimes. Les deux explosions tuèrent plus de 200 000 personnes, soit immédiatement soit plus tard par irradiations. Les constructions ne résistèrent que peu ou prou au feu nucléaire. La destruction fut totale respectivement sur 12 km² et 6 km².
Partant de ces échelles, il est possible de mesurer les effets des bombardements de la IIe Guerre mondiale et des conflits qui suivirent (Corée, Vietnam, etc.) voir l’explosion du port de Beyrouth sur les populations civiles dans des situations et des conflits différents. Leur point commun restant les effets sur une population civile.
Dans le registre non nucléaire et non militaire, l’explosion du port de Beyrouth est un cas à part. L’explosion du nitrate d’ammonium stocké dans le port de Beyrouth correspondait, selon les experts, à 10 % de la puissance d’Hiroshima soit près de 1,3 kilotonne ou l’équivalent de 1 500 tonnes de TNT ou 2 200 tonnes de dynamite. Cette explosion ne provoqua ... que 235 morts, plus de 7 000 blessés et laissa 300 000 personnes sans domicile. Cette explosion était liée à la gestion anarchique et corrompue des stocks de nitrate, sans égard pour la sécurité des installations portuaires et des populations.[37] Des conditions proches de celles du site d’AZF de Total à Toulouse en septembre 2001.
En comparaison, les bombardements israéliens du 7 octobre 2023 au 1er novembre 2023, soit 25 jours, sur la bande de Gaza correspondent à 1,5 fois à la puissance d’Hiroshima soit 18 kilotonnes et provoquent près de 4 000 morts civils. Le parc immobilier est détruit à 30 %.
Du 7 octobre 2023 à la fin février 2024, l’armée israélienne aura largué l’équivalent de 16 bombes atomiques sur le territoire de Gaza. Le mois de février 2024 présentait le pic avec 4,6 bombes atomiques ou l’équivalent du tonnage de bombes reçu par Dresde, Hambourg et Londres au cours de la IIe guerre mondiale.
Durant les bombardements les plus intensifs du nord Vietnam entre mai et décembre 1972 (opérations Linebaker I et II) par l’aviation américaine, la moyenne quotidienne s’établissait entre 931 et 1 385 tonnes de bombes larguées majoritairement par des bombardiers stratégiques B52 sous forme de tapis de bombe. Ces bombardements comptabilisent en moyenne1 600 civils tués quotidiennement[38].
Au mois de février 2024, la moyenne quotidienne israélienne s’élève à 2 333 tonnes de bombes larguées sur Gaza et tuent 92 civils. Pour tuer un civil palestinien, il faut un peu plus de 25 tonnes de bombes contre « seulement » 0,86 tonne pour un civil vietnamien ! Ce sont souvent les mêmes types de bombes, parfois améliorées. Comment expliquer la baisse de l’effet létal de ces outils ?
Le Laos est considéré comme le pays le plus bombardé du monde, durant la guerre du Vietnam entre 1964 et 1973. Deux millions de munitions sont larguées sur le pays par les forces américaines pour tenter de bloquer la piste Hô Chi Minh. Cela correspond à près de 592 munitions par jour au cours de 550 000 raids aériens, soit 1 attaque toutes les 8 minutes !
On dépasse ou l’on flirte avec ces moyennes à Gaza ![39] Par munition, il faut entendre bombes et roquettes larguées par avion ainsi que les obus tirés par l’artillerie et les chars.
Du 7 octobre 2023 au 18 avril 2024, les forces israéliennes bombardent avec 300 000 munitions le territoire de Gaza soit 1 546 munitions par jour avec grosso modo un raid aérien toutes les 12 minutes.[40]
Si l’on rapporte le nombre de munitions à la surface du pays bombardé, Gaza l’emporte sur le Laos avec une durée de conflit inférieure. Près de 8,45 munitions ont été larguées sur un kilomètre carré au Laos, cette moyenne est près de 822 munitions par km² au mois d’avril 2024 à Gaza.
Certains spécialistes avancent qu’en début de conflit, Israël aurait largué en un mois 500 bombes de 900 kilos. Autant que deux ans de conflit en Ukraine ![41]
Si l’art de bombarder se mesure à la quantité de munitions tirées et larguées, la qualité de celle-ci donne une idée des effets sur la cible. Les médias se réfèrent le plus souvent aux bombes d’avions du type MK84 de 900 kilos (modèle préféré de l'aviation israélienne) ou MK82 de 200 kilos. Au 28 juillet, elle aurait reçu 25 000 bombes, dont 14 100 MK84 et 8 200 MK82[42].
Les bombes de classe MK sont développées à partir des années 1950. Elles connaissent peu d’évolution en tant que bombes « généralistes ». Les améliorations concernent leurs systèmes de guidage vers les cibles (laser ou autres), mais ces bombes passent alors dans d’autres classes à savoir les classes GBUxx et BLUxxx. La bombe de base restant la même.
La MK82, avec 89 kilos d’explosif, prend ainsi la dénomination GBU12 et GBU49. Pour les civiles, pas de différence. La MK82 et ses variantes possèdent une capacité explosive et fragmentaire capable de détruire un immeuble, voire plusieurs. À 16 mètres de sa cible, en plus de l’effet de souffle, c’est plus de 2 000 éclats métalliques à 2 400m/s qui se chargent de faire le vide même derrière 32 cm d’acier. À défaut de destruction d’immeuble, la MK82 et ses variantes laisseront un cratère de 4,6 à 10,7 mètres de diamètre et d’une profondeur de 0,76m à 4,27m. Autant dire que l’espérance de vie à proximité est faible : 49 % dans un rayon de 50 mètres. L’équipement de ces bombes permet également de configurer les détonateurs pour une explosion programmée au sol : par exemple à l’arrivée supposée des secours[43].
Ces bombes intègrent et optimisent la technique des bombardements mis au point par les Alliés au cours de la IIe Guerre mondiale. Le bombardement en plusieurs vagues d’une ville au tapis de bombes de types différents est remplacé par des bombes uniques à plusieurs effets (destruction d’immeubles, incendie, retardement des secours, etc.)
À Gaza, les photos aériennes amènent des journalistes à se poser des questions sur l'usage des bombes de gros calibres dont l'efficacité était déjà mise en cause en Irak par l’armée américaine (batailles de Bagdad et Falloujah) ainsi que les effets désastreux sur la population.
Si les bombardements aériens sont souvent évoqués dans les médias, la plus grosse masse de munitions utilisée est celle des obus d’artillerie et de chars : 155mm pour l’artillerie et 120mm pour les chars. Au début décembre 2023, 100 000 obus avaient été tirés en direction de Gaza, soit 1 878 obus par jour en moyenne. Les charges de ces obus peuvent varier depuis la simple tête explosive, en passant par l’obus incendiaire ou au phosphore. L’effet est moins visible, mais tout aussi létal que les bombes aériennes. Pour comparaison, l’armée soviétique avait tiré 180 000 obus par jour sur Berlin, pendant 10 jours, en avril et mai 1945, avant sa reddition[44].
Des effets économiques et humains
90 % de la population de Gaza aura été déplacée une fois voire plusieurs : dont 250 000 personnes lors de la dernière semaine de juillet. On recense 800 à 1 000 cas d’hépatite à la fin juillet. Choléra et polio[45] sont également aux aguets via les eaux usées qui stagnent dans les rues. Les surfaces agricoles qui pouvaient encore nourrir la population ont été labourées au bulldozer D9[46] dernier cri de la technologie américaine. La population vit au jour le jour dans une économie totalement délabrée, mais toujours ouverte au pillage, la spéculation et le vol.
L’économie israélienne paye le coût de sa guerre. Les statistiques économiques rejoignent l'amplitude des pertes humaines et matériel côté palestinien. Le coût de la mobilisation se situe en mai 2024 entre 40 à 50 milliards de dollars (soit 5,44 à 8,17 milliards de dollars par jour !) ce qui représente, grâce à l’aide US, seulement 5,3 % du PIB !
Le déficit budgétaire qui en découle se situe entre 2,25 et 8 %. La contraction économique serait de l’ordre de 1,9 % ! La pression sur les salaires et le niveau de vie des populations israéliennes et palestiniennes tendent à la « décroissance ».[47]
Les montants des dépenses militaires israéliennes ont connu une très forte croissance à partir de 2006. Ces dépenses passent de 7,3 milliards de dollars en 1992 à 8,6 milliards dollars en 2006. À partir de là, ce montant passe de 11,38 à 27,5 milliards de dollars, soit un facteur de 1,17 à 2,41 à nos jours[48] ! Ces guerres ne concernent plus des armées régulières. Les guerres asymétriques seraient-elles plus coûteuses ?
Une partie de la population israélienne dans le nord du pays et près de Gaza a été évacuée, la privant de son logement parfois de de son travail. Des entreprises sont à l’arrêt et pensent pour certaines à délocaliser. Le tourisme est en berne. Les investisseurs locaux comme étrangers ne sont pas au rendez-vous. L’instabilité gouvernementale renforce l'insécurité générale.
Une partie de la population reste mobiliser pour ses otages dont le sort dépend de moins en moins du Hamas, mais de la politique inconsidérée de son Premier ministre et derrière lui plus discret le gouvernement américain.
De quelques conclusions
La crise du Moyen-Orient a pris une ampleur que ni le Hamas ni le gouvernement israélien n’ont vue venir à partir du 7 octobre.
L’acte terroriste commis ce jour-là et les réponses « habituelles » des autorités israéliennes ne sont plus de mise. Les enjeux se situent à plus haut niveau et implique un impérialisme américain plongé dans une crise qu'il a du mal à gérer. Les assassinats de dirigeants palestiniens ou du Hezbollah ainsi que la mobilisation de forces américaines dans la région n’en sont qu’un aspect.
En tâche de fond, la crise économique empire, les alliances et les rivalités entre les divers acteurs dans les capitales occidentales et locales ne donnent que plus d’ampleur à la chose.
Que deviendront les populations civiles palestinienne et israélienne dans ce contexte ? Sauf mouvements de fond et sociaux remettant en cause le statu quo dans la région, elles resteront « la chaire à patron et à canon ».
Michael Maschek
Michael Maschek se consacre à la formation en management et gestion de projet à l’université. Il pratique avec passion la photo et sa version aérienne au drone. Il est l’auteur de Myrtom House, un quartier de Beyrouth en guerre civile, édité chez L’Harmattan en 2016. Un récit mi-réel, mi-fantaisiste sur une période de son adolescence vécue en début de guerre civile dans le quartier de Kantari à Beyrouth. Également édité chez L’Harmattan en 2020, Comprendre le Liban 2019-2020. Une chronique tenue au jour le jour des évènements sur le site Libnanews. Il a également coordonné la traduction du russe de Comment la révolution s’est armée de Léon Trotsky en cinq volumes.
Notes
[1] Unicef, Israël-Palestine : des milliers d'enfants usés par la guerre, 2024 https://www.unicef.fr/article/israel-palestine-les-enfants-paient-le-prix-de-la-guerre/#un-bilan-tragique, posté le 7 août. Voir également à ce propos l’article polémique sur les victimes du The Lancet www.thelancet.com Vol 404 July 20, 2024
[2] Interview de Michel Goya dans Guerre et Histoire n°79, juin 2024 et L’embrasement. Comprendre les enjeux de la guerre Israël Hamas, Perrin, 2024, Paris. À la mi-août dans un article du Times of Israel, The coffee was still hot dédié au commandant de la 98e brigade, le brigadier général Dan Goldfus, en opération à Gaza, il est évoqué le chiffre de 15 000 membres du Hamas tués et 1 000 terroristes en Israël.
[3] Op. cit. Unicef.
[4] Bloomberg, 15 août 2024. Gaza Reduced to 42 Million Tonnes of Rubble. What Will It Take to Rebuild? A titre de comparaison l’Allemagne en mai 1945 compte 400 millions de mètres cubes de débris suite aux bombardements alliés.
[5] Times of Israel, 1 août 2024, Les montagnes d’immondices de Gaza sont aussi une menace pour Israël
[6] Op. cit. Michel Goya et site Wikipédia en français de Tsahal
[7] Ouest France, 24 juin 2024, Guerre Israël-Hamas : combats à Rafah, manifestation à Tel-Aviv… Les dernières infos
[8] New York Times, 24 juillet 2024, Protesters Denounce Netanyahu’s Speech to Congress and Some Clash With Police
[9] Times of Israel, 5 août 2024, Le ministre des Finances pense que le blocage de l'aide humanitaire vers l'enclave est justifié et moral.
[10] Asharq al Awsat, 25 mai 2024, Cost of Israeli War on Gaza Reaches $62 Billion.
[11] Statista, 2024, Total annual United States military expenditure in gross terms and as a percentage of GDP during the Korean War from 1950 to 1953
[12] The Balance, 29 mars 2022, Vietnam War Facts, Costs, and Timeline
[13] Stimson, 13 octobre 2023, In Shadow of War, a Snapshot of US Military Assistance to Israel
[14] BBC, 15 avril 2024, Gaza war: Where does Israel get its weapons?
[15] Times of Israel, 15 août 2024, IDF: Dozens of tunnels razed on Gaza-Egypt border, 17,000 terror operatives killed in war
[16] Times of Israel, 15 septembre 2020, Hamas said to retrieve ammunition from British WWI warship sunk off Gaza coast
[17] New York Times, 28 janvier 2024, Where Is Hamas Getting Its Weapons? Increasingly, From Israel.
[18] Israël-Hamas : pourquoi la guerre ? Sous la direction d’Eric Fotorino. Texte de Vincent Lemire, L’enjeu est d’accepter un État palestinien pour sauver l’État d’Israël, Le 1 Philippe Rey, 2024.
[19] Op. cit. Michel Goya
[20] Jacques Baud, Opération Déluge d’Al-Aqsa. La défaite du vainqueur, Max Milo, 2024
[21] Deutsche Welle, 16 août 2024, bulletin d’information (11h) avec reportage sur les blessés palestiniens à Doha
[22] Op. cit. Michel Goya
[23] Wikipedia, Mowing the grass (consulté au mois d’août)
[24] Wikipedia, Dahia Doctrine (consulté au mois d’août)
[25] Wikipedia, Hannibal Directive (consulté au mois d’août)
[26] Slate, 18 février 2024, Gaza : l'IA Habsora au cœur de la stratégie israélienne
[27] New York Times, 1 décembre 2023, Israel had a blueprint for the Oct. 7 attacks a year ago. Officials dismissed it.
[28] Al Jazeera, 14 août 2024, bulletin d’information (21H). Ces bulletins quotidiens en arabe sont commentés et analysés alternativement par trois officiers en retraite de nationalité irakienne, jordanienne et libanaise. On est pas très loin du compte rendu d’état-major pour « grand public » avec un fort parti pris. Ils sont consultables en partie sur Youtube avec possibilité de traduction.
[29] JINSA, 23 juillet 2024, Infographic: U.S. Arms Transfers to Israel Since October 7
[30] Alexandre Andreievi Svetchine, Stratégie, L’Asymétrie, à paraître
[31] L’Humanité, 6 août 2024, Le général états-unien Michael Kurilla, chef du Commandement central des États-Unis (CENTCOM), est arrivé en Israël pour finaliser les préparatifs avec l’armée israélienne
[32] Defense News, 25 juillet 2024, What did the US military’s aid pier actually accomplish ?
[33]Guerre et Histoire n°80, août 2024, Jean Lopez, Varsovie, 1944. Une jeunesse assassinée. Il est intéressant d’observer dans ce dossier l’usage des égouts durant l’insurrection comparé à l’usage qu’en fait des tunnels le Hamas à Gaza.
[34] Times of Israel, 16 mai 2024. 5 soldiers killed, 7 hurt in 'friendly fire' incident in northern Gaza's Jabaliya
[35] Op. cit. la note 28. Voir les bulletins d’information en soirée diffusés depuis le 7 octobre par la chaîne Al Jazeera en arabe et en anglais.
[36] Radio France, 3 juin 2024, Peut-être pire que Guantánamo : un médecin dénonce la torture dans un camp de prisonniers israélien
[37] Institut des risques majeurs. 4 août 2022, Explosions au port de Beyrouth
[38] Guerre et Histoire n°79, juin 2024, « Linebacker » I et II : les B-52 sortent Nixon du Vietnam
[39] Wikipedia Laotian Civil War (consulté 15 août 2024)
[40] The Independent Task Force, Report of the Independent Task Force on the Application of National Security Memorandum-20 to Israel, 18 avril 2024.
[41] Op. cit. Michel Goya
[42] Op. cit. Michel Goya. Voir également Haaretz et le New York Times du 8 mai 2024 ainsi que Reuters du 30 juin 2024
[43] The Geneva International Centre for Humanitarian Demining, Explosive weapons effects. Final report, Février 2017
[44] Les Échos, 7 novembre 2022, Dans l'enfer de la bataille de Berlin
[45] France Info, 16 août 2024, A Gaza, un premier cas confirmé de polio depuis 25 ans, l'ONU réclame des "pauses humanitaires" pour vacciner les enfants
[46] Wikipédia IDF Caterpillar D9 (consulté le 17 août 2024)
[47] Anadolu Agency, 14 août 2024, Cost of genocide: Israel heads for economic downturn
[48] Statista, 2024, https://fr.statista.com/statistiques/1417346/budget-armee-israel/