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Billet de blog 10 janvier 2010

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Gestion des catastrophes virtuelles: Grippe, Climat

Je vais faire un parallèle hazardeux entre la gestion deux catastrophes annoncées, celle de l'épidémie de grippe A/H1N1 dite porcine, mexicaine, et le réchauffement climatique, objet du sommet de Copenhague avec le résultat que l'on sait.

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Je vais faire un parallèle hazardeux entre la gestion deux catastrophes annoncées, celle de l'épidémie de grippe A/H1N1 dite porcine, mexicaine, et le réchauffement climatique, objet du sommet de Copenhague avec le résultat que l'on sait.

Commençons par la grippe.

Vu de mai ou de juin 2009, les symptomes semblent inquiétants. La maladie se propage rapidement et touche des populations atypique. L'OMS, conseillée par un panel d'experts (que l'on sait désormais bien copains avec les laboratoires pharmaceutiques), déclare la pandémie et est bêtement suivie par beaucoup de gouvernements et (presque) tous les experts crient à la catastrophe, aux millions de morts, ... Par contre, si en été l'épidémie restait très virtuelle pour les Français, sa contagiosité rendait quasiment inéluctable son arrivée en France

En France, c'est le plan Marshall: Avec une organisation quasi militaire sous directive de Nicolas Sarkozy, l'on commande 94 millions de doses de vaccins, des dizaines de millions de doses de Tamiflu, antiviral à l'efficacité douteuse, ...
L'ampleur de la réaction n'est pas dénuée d'un égoïsme affiché. La France commande 10% des capacités de production mondiale afin de ne pas prendre le risque d'en manquer. Quand on sait que la France me pèse que 1% de la démographie mondiale, et les autres? Et bien, ils n'ont qu'à se débrouiller.
Bref le fiasco que vous connaissez tous avec un fort soupçon de connivence entre les organes décisionnels et réglementaires et l'industrie pharmaceutique. Pour plus de détails, lisez l'édition pilotée par M Philips, Grippe A/H1N1.

Ce qui est intéressant est la réaction des français. La communication était fortement basée sur la peur, avec entre autres le spectre de l'épidémie de grippe A H1N1 dite Espagnole de 1918. Portez un masque, ne vous serrez plus la main et lavez les souvent, et surtout ne vous faîtes plus la bise!
Globalement, les français (et ils ne sont pas les seuls) n'ont pas du tout réagi en suivant ces consignes. Ils se sont peu fait vacciner mais les dysfonctionnements organisationnels les y ont vite incité. Consciemment ou non, tout le monde a réalisé que les conditions médicales de 2009 étaient différentes de 1918, au sortir de la grande guerre. Ajoutez à cela que la grippe, on la voit passer tous les ans ... Et puis les résultats de l'épidémie dans les autres pays commençaient à percoler en Septembre: Contagieuse certes, mais pas très dangereuse.
Donc cette catastrophe virtuelle annoncée ne se réalisant pas, bof ...
Bon pour clore l'épisode de la grippe A/H1N1, il ne faut pas oublier que l'échelle de temps est de l'ordre de l'année. Donc la catastrophe virtuelle annoncée en juin 2009 nécessitait une réaction rapide.

Enfin, si la léthalité de la grippe A/H1N1 avait été au niveau de ce que l'on croit savoir de la grippe espagnole de 1918, je pense que l'on aurait un regard différent sur cette affaire.

Et maintenant, le réchauffement climatique.

On est encore un peu dans le virtuel pour le commun des mortels. 0,7 °C sur cent ans cela n'effraye pas trop même si certains signes sont palpables tels les reculs des glaciers, des changements dans les migrations et les zones de peuplement des espèces animales, etc.
Pour préciser les choses, j'ai encore une dose de scepticisme car le débat scientifique est loin d'être clos. Néanmoins, le climat s'est réchauffé et la théorie dominante (c'est presque une idéologie par moment) est que l'activité humaine en est le principal artisan, notamment par les émissions de CO2 et autres gaz à effet de serre.
Les rapports du GIEC sont assez convainquants, surtout le dernier, AR4, publié en 2007. Attention, c'est du lourd avec 3 rapports de 1000 pages chacun. Par contre le rapport de synthèse est plus abordable (100 pages). Néanmoins, la polémique scientifique persiste comme vous pouvez le constater ICI.

Rien ne sert de diaboliser les opposants au GIEC. La science avance en se remettant en cause perpétuellement (sinon, le soleil tournerait encore autour de la terre comme avant Gallilée et Copernic).

Donc il se dessine une certaine unanimité politique et médiatique pour accepter les conclusions de GIEC et ses projections assez catastrophiste dans l'avenir de la planête et d'humanité. Donc admettons les conclusions et prédictions du GIEC. On se retrouve alors dans une situation similaire à la Grippe A/H1N1: Un groupe d'expert, sous mandat de l'ONU nous prédit un avenir catastrophique

Alors pourquoi cet échec à Copenhague.
- Tout d'abord comme je l'ai déja dit, le phénomène est encore assez virtuel pour les citoyens des pays riches, essentiellement situé au Nord.
- Le climat est d'une extrème variabilité d'une année à l'autre. En climatologie, on considère qu'il faut analyser sur au moins 30 ans pour dégager une tendance. C'est donc difficilement perceptible pour l'être humain.
- Contrairement, à la grippe, la menace est à long terme, 50 ans, 100 ans et plus selon les scénarios. C'est long pour quelqu'un qui a des préocupations du style bouclage de fin de mois. C'est long pour le politique qui doit faire faire face à des échéances électorales de 2 à 5 ans max.
- L'avis des experts du GIEC est contredit par des scientifiques reconnus. Il y a même un "contre-GIEC" qui lui aussi tient ses conférences et publie des contre-rapports. A titre d'exemple, cette synthèse. Cela fait partie de la démarche scientifique, même s'il se peut qu'il y ait des lobbies derrière. De toute, façon, il y a aussi énormément de pression sur le GIEC, souvent politique. Bref tout cela brouille le message même si une sorte d'unanimisme politique et médiatique de bon-aloi s'est plus ou moins établi en France.
- Certaines contradictions des mouvements écologiques brouillent aussi le message. Il sont contre le nucléaire en général mais comme le nucléaire génère peu de CO2 ... Certes il y a les déchets nucléaires, cadeau pour les millénaires à venir. Oui, mais ils s'opposent au retraitement des déchets nucléaires ce qui semble une bonne pratique, cohérente des lois qu'ils ont poussés, imposant la récupération, le tri et le recyclage des déchets (vous triez vos poublelle, je pense).
- Enfin, et probablement le plus important, même si l'humanité toute entière disparaissait ce soir à minuit (ou retournait à l'age de pierre), cela n'arrêtera pas le réchauffement, l'inertie étant très importante. Cela va continuer 50 à 100 ans jusqu'à la rejointe d'un point d'équilibre à partir duquel la planête éliminera progressivement les gaz à effet de serre.
Donc, quel que soit l'ampleur des mesures prises, nous n'échapperons pas collectivement à un réchauffement global mais inégalement répartit. De même, la répartitions hygrométrique (pluie, eau douce) va bouger. De même, les océans vont monter inexorablement. Inévitablement, il va falloir s'adapter. Devinez qui va morfler ?
Le réchauffement, c'est aussi des nouvelles opportunités. Certains, l'on bien compris et les plans de l'exploitation du grand nord sont en cours d'élaboration (Alaska, Canada, Russie).
On va m'objecter qu'il n'y aura plus de pétrole, de gaz, de charbon. Certes, cela va se raréfier, être plus cher mais attention aux nouvelles découvertes et aux gisements du Grand Nord qui seront plus facilement exploitables car il va se réchauffer. Je prends le pari que cela peut durer encore 100 ans au moins. De plus on sait fabriquer de l'essence depuis du charbon (comme en Allemagne durant la guerre), du kérozène depuis le gaz (une énorme usine est en construction au Qatar), ...
Pourquoi agir. Parce que si l'on ne fait rien, l'effet de serre risque de s'amplifier jusqu'à générer un réchauffement de plus en plus fort, déstabilisant encore plus les équilibres climatiques et ce pour des millénaires.
On peut critiquer les modèles du GIEC car beaucoup de paramètres sont encore fixés de manière ad-hoc, le mécanisme sous jacent associé étant scientifiquement mal compris, ce que le GIEC est le premier à reconnaître. De même les simulations sur le long terme sont à très gros grain (l'atmosphère est maillée par de très gros cubes) faute de moyen de calcul suffisant. Cela devrait s'améliorer progressivement et j'attend avec impatience le cinquièmme rapport en cours d'élaboration. Donc selon les modèles et leur paramètres, il y a des divergences et une marge d'incertitude grandissante et déjà importante dès 2100.
Il y a aussi le risque de l'apparition d'un phénomène inconnu et non modélisé qui aggraverait le réchauffement (ex libération du méthane piègé au fond de l'Arctique) ou le freinerait (la bonne surprise!).
Néanmoins, comme le volume de rejet des gaz à effet de serre est toujours en forte croissance (certes moins exponentielle d'avant), l'avenir est tout sauf rose.
Donc pourquoi cela ne bouge pas. C'est simple, le phénomène est global et si la réaction n'est pas globale ou du moins de la part de 90% des gros contributeurs de CO2, cela n'aura pas d'effet.
Or les pays pauvres disent, à juste, aux pays industrialisés du Nord: Vous avez foutu le climat en l'air avec votre industrialisation et votre consommation effrenée. A vous de faire l'effort, moi je ne vais pas sacrifier ma maigre croissance. J'ai déjà du mal à nourrir ma population.
Ce discours, les pays riches ne veulent pas trop l'entendre, surtout les USA, car les gros pays émergeants (Chine, Inde, Brésil, ...) ne veulent pas eux aussi sacrifier leur croissance, ... Or la Chine, puis l'Inde vont bientôt dépasser les USA en terme de quantité de rejet.
Les populations des pays riches ne sont pas trop enclines à faire des sacrifices où à changer drastiquement de style et de niveau de vie, d'autant plus que la perception du risque reste assez virtuelle. Et puis, il y a l'idée sous-jacente que la technologie et la science vont bien trouver une solution.
Malgré les rodomontades de Nicolas Sarkozy, dans le genre "moi je ... vais vous faire bouger tout cela", Copenhague est un échec.
Or, le premier qui bouge sur un thème tel que la taxe Carbone, est mort car il se créé un désavantage compétitif interne accru.
Nicolas Sarkozy, après Copenhague, dans son volontarisme affiché, bombant le torse, a dit, en substance, "et bien moi, je vais la faire, tout seul cette taxe Carbone". Mais il a bien compris les enjeux sous-jacants car 93% des industries émettrices étaient exemptées, l'agriculture, la pêche, le transport, l'électricité étaient exemptées, ...

Donc un bête impot, verdi pour l'occasion par habileté politique et sens de l'image. De plus, il ne portait que sur les classes moyennes et basses (les riches copains restant protégés par le bouclié fiscal), donc totalement inégal, ce qu'a pointé à ma grande surprise le Conseil Constitutionnel.
En effet, les écologistes ont gagné la bataille de la communication. Il est désormais à la mode de se dire vert. Tous les partis ont verdi. Même les plus gros pollueurs s'y mettent. Exemple la campagne de promotion du parpaing, isolant, bon pour les économies d'énergie, ... Lorsque l'on sait la quantité de CO2 que génère la fabriquation du ciment, il y a de quoi rire, jaune.
La crise financière était une occasion de reprendre le contrôle des banques qui ont été sauvées par les états, et de revenir à un capitalisme beaucoup plus encadré comme à l'époque de Roosevelt, libéral mais très surveillé. L'occasion a été loupée.
Le monde est tellement imbriqué désormais qu'il va être difficile de changer de cap. La logique de croissance est omniprésente. C'est symptomatique, en France. Comme nous sommes en période de crise et d'augmentation du chomage, tout le monde a les yeux fixés sur un seul indicateur, la croissance.
A mon avis, une des solutions serait de créer une taxe Carbonne sur le transport (toutes formes) très progressive afin de relocaliser progressivement les usines, le différentiel de la valeur travail étant progressivement gommé entre une production plus locale créant peut être un cercle vertueux avec moins de transport, des emplois locaux, des usines neuves conçues moins polluantes, de l'agriculture moins tournée vers l'exportation et la culture intensive, ...
Mais on imagine bien que cela coince car c'est un mécanisme assez similaire aux droits de douane, ce que l'OMC s'occupe de démanteler depuis sa création. De plus c'est assez égoïste et l'on imagine bien le blocage du côté de la Chine et autres "usines du monde".

C'est donc difficile à gérer, difficile de motiver les populations, ... lorsque la perception de l'urgence n'est pas claire dans les esprits. Mais comme dit le dicton, gouverner c'est prévoir.

Vous avez deviné que je suis plutot pessimiste. Peut être l'appel d'Evo Morales ?

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